CONFERENCE PARLEMENTAIRE SUR L'OMC Genève (Suisse), 17 et 18 février 2003
Organisée conjointement par l'Union interparlementaire et le Parlement européen
DECLARATION FINALE adoptée par consensus le 18 février 2003
Nous, parlementaires, assemblés à Genève à la faveur de la Conférence parlementaire sur l'OMC pour y débattre de questions liées au commerce multilatéral, sommes convaincus de la nécessité d'une dimension parlementaire de l'OMC. Notre but est d’accroître la transparence des activités de l’OMC.
Nous sommes attachés à promouvoir une nouvelle libéralisation du commerce qui tienne compte des politiques de développement nationales dans le cadre d'un système équitable fondé sur des règles. L'adhésion de nouveaux pays à l'OMC est cruciale si l'on veut en faire une organisation réellement universelle. Notre but est de promouvoir un commerce qui profite à tous et à tous les pays, qui amplifie le développement et qui réduise la pauvreté.
Aussi souscrivons-nous aux objectifs énoncés dans le Programme de Doha pour le développement, lequel place les préoccupations des pays en développement au cœur du système commercial multilatéral et leur accorde une place de choix dans le cycle de négociations en cours. Nous nous félicitons de ce que le mandat de Doha traite des préoccupations qu'inspire aux pays en développement la question de l'accès aux marchés d'exportation. Nous nous réjouissons de l'intention affichée d'éliminer progressivement les subventions aux exportations agricoles, et nous considérons que la création du Fonds global d'affectation spéciale, auquel chaque pays développé doit souscrire, permettra d'accroître fortement les ressources allouées à l'assistance technique en matière de mise en oeuvre.
Néanmoins, les événements intervenus depuis la Réunion ministérielle de Doha suscitent de graves préoccupations. Les progrès enregistrés à ce jour ne sont pas encourageants et certaines échéances fixées à Doha pour les négociations sont passées sans aucun résultat. Nous déplorons que les échéances sur le traitement spécial et différencié pour les pays en développement, et sur l'assouplissement de l'Accord sur les ADPIC pour améliorer l'accès aux médicaments n'aient pas été respectées. Une solution alternative d'urgence sur certaines pandémies doit être mise en œuvre.
Parallèlement, nous nous inquiétons de l'absence de progrès sur la question fondamentale de l'amélioration de l'accès réel aux marchés. Il faut impérativement qu'un accord soit trouvé sur la réduction des obstacles au commerce dans l'agriculture, le textile et les vêtements. Les aides à l'agriculture dans les pays riches sont, globalement, près de quatre fois plus élevées que l'aide au développement allouée aux pays pauvres. Nous pensons que ces pratiques de distorsion du commerce, et leurs conséquences sociales, sont inacceptables.
Nous nous engageons vivement à soulever ces questions dans nos parlements et à entamer un dialogue avec nos négociateurs commerciaux respectifs et, dans le même temps, à poursuivre notre processus parlementaire relatif à l'OMC, en particulier dans la perspective de la prochaine Réunion ministérielle à Cancún.
Nous sommes convaincus, en effet, que l'époque où la politique extérieure et, plus particulièrement, la politique commerciale étaient l'apanage du pouvoir exécutif est révolue. Les relations internationales façonnent les politiques intérieures, et les relations extérieures relèvent désormais des affaires intérieures. Sans les garde-fous semblables à ceux qui s'appliquent généralement en politique intérieure, cette évolution engendrera inévitablement un déficit démocratique au niveau international. Une participation démocratique réelle est un objectif important qui doit être lié à la transformation démocratique de l'ensemble de la structure et du contenu de la gouvernance économique mondiale. Notre initiative, et les travaux qui en découleront, sont les bases nécessaires à la réalisation de cet objectif ultime de démocratisation. Aussi sommes-nous parfaitement conscients de la nécessité pour les parlements d'être associés à la gestion de la chose publique, qui dépasse les frontières nationales.
L'OMC est désormais bien plus qu'une simple organisation chargée du commerce international. Contrairement à la plupart des traités internationaux, les accords de l'OMC non seulement lient les nations quant à la définition des objectifs communs mais prévoient leur mise en œuvre au moyen d'un mécanisme efficace de règlement des différends. Les décisions de l'OMC ont un impact croissant sur les services, sur la distribution de l'eau, de l'électricité, du gaz, etc., sur les droits de propriété intellectuelle, sur les marchés publics, sur la santé publique, sur l’éducation, sur l'emploi, sur la sécurité alimentaire et sur l'environnement, ainsi que sur la gestion des ressources naturelles telles que forêts, pêches et eau.
Les parlements des différentes nations, en tant que représentants légitimes de leurs populations, ont fait œuvre de pionnier en encourageant l'évolution pacifique des sociétés. Une interface parlementaire est nécessaire pour assurer une meilleure représentation des citoyens dans le processus des négociations multilatérales. Les parlements incarnent la souveraineté populaire et peuvent, en toute légitimité, contribuer à en exprimer la volonté au niveau international. Leur rôle est aussi d'aider les citoyens à comprendre et à affronter les défis que pose la mondialisation dans leur vie quotidienne, et à en traduire les préoccupations en politique nationale et multilatérale.
Aussi est-il important de promouvoir une dimension parlementaire de l'OMC. Sur la base des progrès et des décisions prises d'un commun accord aux précédentes réunions du Comité de pilotage post-Doha, nous sommes résolus à faire avancer un processus interparlementaire avec l'OMC qui s’articulerait autour de réunions parlementaires régulières tenues initialement une fois par an et à l’occasion des conférences ministérielles de l’OMC. Nous proposons que ces réunions soient appelées "Conférences parlementaires sur l’OMC".
Cette activité aurait pour but de superviser les activités de l'OMC et d'en promouvoir l'efficacité, d'entretenir le dialogue avec les négociateurs gouvernementaux et la société civile et de faciliter l’échange d’informations, la confrontation des expériences et le renforcement des capacités des parlements nationaux en matière de commerce international, notamment en ce qui concerne l’OMC, et d’influer sur le cours des discussions à l’OMC.
Nous appelons l'Union interparlementaire et le Parlement européen, en tant qu'organisateurs conjoints de cette réunion, à donner suite aux objectifs adoptés par consensus par le Comité de pilotage post-Doha et à les mettre en œuvre. Nous espérons nous réunir à la prochaine Conférence ministérielle à Cancún pour y dresser le bilan des progrès accomplis.