|
MESSAGE PARLEMENTAIRE A LA TROISIEME CONFERENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCES
Adoptée sans vote par le Conseil de l'Union interparlementaire à sa 168ème session (La Havane, 7 avril 2001)
La mondialisation n'a pas seulement changé
radicalement le cadre de la coopération internationale
pour le développement, elle a aussi fait surgir de nouveaux
défis, en particulier pour les pays les moins avancés
(PMA). Ces derniers doivent à présent assumer des
devoirs et responsabilités supplémentaires sous
la forme de conditions et obligations qui leur sont imposées
notamment dans le cadre multilatéral en matière
de commerce, d'investissement et de propriété intellectuelle.
Aux obligations et responsabilités
des PMA ne répondent pas toujours des obligations correspondantes
pour les pays industrialisés, et ce en dépit des
objectifs fixés comme le chiffre de 0,7 % du produit
national brut à consacrer à l'aide publique au développement
(APD). Ne se sentant pas liés par ces obligations, les
pays développés n'agissent pas avec le sérieux
exigé. Aussi faut-il plus d'équilibre et de justice
entre pays pauvres et pays riches dans le nouveau système
mondial émergent.
Durant la dernière décennie,
l'Union interparlementaire a appelé à maintes reprises
à l'amélioration et à la réforme du
système de développement international, notamment
en ce qui concerne le commerce, l'architecture financière
et la sécurité alimentaire ainsi que la gouvernance.
La troisième Conférence des Nations Unies sur les
PMA est l'occasion de relancer l'amélioration du système
de développement international à l'aube du nouveau
millénaire.
Pour les pays les moins avancés, des
mesures d'ordre intérieur et extérieur doivent être
prises, qui soient complémentaires et se renforcent mutuellement.
Le clivage Nord-Sud doit céder le pas à un pacte
de développement entre réformateurs dans les pays
donateurs comme dans les pays bénéficiaires qui
soient attachés à la réalisation des objectifs
de développement et qui soient capables, si besoin est,
de pratiquer l'autocritique et non l'invective.
En tant que parlementaires représentant
nos électeurs des villes et des villages, des régions
à forte densité de population et des régions
reculées, nous appelons la Conférence à relever
les grands défis qu'affrontent les peuples et les gouvernements
des PMA.
- Les PMA doit être les maîtres d'uvre de
leurs propres politiques. Les objectifs internationaux de développement
sont des objectifs de base qui ne peuvent pas être atteints
par une approche rigide, mécanique. Ils doivent être
convertis en objectifs spécifiques à chaque pays
et en plans nationaux très précisément
définis par les PMA eux-mêmes avec la pleine
participation des citoyens et - si nécessaire - avec l'appui
des donateurs et des organisations internationales.
- En tant que parlementaires, nous sommes particulièrement
conscients de la nécessité de la bonne gouvernance,
condition préalable au développement durable. Les
PMA ont encore beaucoup à faire pour remettre de l'ordre
chez eux, pas seulement pour en être récompensés
par les donateurs, mais aussi dans leur propre intérêt.
De fait, les formes participatives de gouvernance démocratique
sont la clef de l'élimination de la pauvreté, au
même titre qu'une gestion transparente et vérifiable
de la dépense publique et un système d'impôt
équitable assurant les rentrées fiscales. En outre,
il apparaît clairement que la pauvreté ne pourra
être éliminée qu'avec la pleine participation
des femmes. L'Exécutif doit répondre de sa gestion
et son action doit être soumise aux contrepoids démocratiques
(contrôle parlementaire, état de droit et mesures
efficaces de lutte contre la corruption).
- Les PMA n'ont encore retiré aucun avantage de leur
participation plus active au système commercial mondial
où, pour l'instant, ils ne sont que des acteurs marginaux.
Alors que le commerce s'est développé de par le
monde, la part des PMA y est demeurée faible. Ils buttent
sur de nombreuses difficultés. Certaines sont locales :
faiblesse des institutions, insuffisance des infrastructures et
sous-qualification de la main-d'uvre, et il faut renforcer
la capacité des PMA à participer aux échanges
commerciaux. Les difficultés se présentent aussi
sous la forme d'obstacles tarifaires et non tarifaires, particulièrement
pour les types de biens et de services où les PMA jouissent
d'un avantage comparatif solide. Les exportations agricoles des
PMA, qui ont pourtant un fort potentiel de croissance, sont entravées
par les restrictions commerciales et les subventions, y compris
celles que pratiquent d'autres pays en développement. Les
exportations de produits manufacturés de base (comme les
textiles) où les PMA ont des capacités et des atouts
incontestables se heurtent aussi à des restrictions. Nous
appelons la Conférence à mettre au point des arrangements
concrets pour éliminer les obstacles qui empêchent
les PMA de connaître un développement durable. Les
recettes commerciales donneront aux PMA les flux de revenus non
conditionnels qui sont essentiels pour leur développement
autonome et assureront l'intégration des PMA au système
économique mondial.
- Les PMA manquent cruellement de financement pour leur développement.
Ils ne bénéficient pas d'investissements étrangers
directs importants et n'ont aucune capacité à emprunter
sur les marchés financiers internationaux. Ils sont lourdement
tributaires de l'APD et, étant donné la faiblesse
des revenus, l'épargne nationale y est extrêmement
faible. Bien que les Nations Unies aient fixé un objectif
de 0,15 % du produit national brut des pays développés
pour l'APD aux PMA, les niveaux réels ont baissé
de près de 50 % dans les années 1990 et sont
tombés au niveau historiquement le plus bas de 0,05 %.
Si, dans l'immédiat, les pays donateurs ne devaient prendre
qu'une seule mesure, ce serait d'inverser ce déclin et
de s'engager à atteindre l'objectif fixé, voire
un objectif plus ambitieux. Il ne faut pas que les stratégies
réalistes de lutte contre la pauvreté échouent
faute de financement extérieur. Dans le même temps,
les PMA doivent pouvoir attirer les investissements privés,
tant locaux qu'étrangers, en créant un climat propice
à l'investissement mais, surtout, en mettant fin à
la fuite des capitaux et utilisant leurs propres capitaux à
des fins productives locales, notamment par des mécanismes
de micro-crédit. Le G-8 et d'autres entités peuvent
faire beaucoup pour encourager les investissements étrangers
du secteur privé dans les PMA. Il faut aussi que les conditions
imposées aux PMA par les partenaires de développement
multilatéraux et bilatéraux ne mettent pas en danger
la fragile cohésion économique et sociale de ces
pays.
- Si le volume de l'aide est un élément important,
sa qualité ne l'est pas moins. L'aide doit désormais
être plus souple et plus prévisible. Depuis que l'aide
au développement existe, elle est en partie liée.
Or, l'aide liée est propice à la corruption, détourne
les ressources des priorités et accroît les dépenses
connexes des PMA. Délier l'aide devrait être
pour la communauté internationale un domaine où
manifester sa volonté politique et donner la priorité
aux intérêts réels des PMA.
- Le piège de l'endettement des PMA n'a pas été
véritablement desserré malgré des appels
divers et des efforts concrets. Même l'Initiative PPTE renforcée,
quoique bienvenue, ne pourra vraisemblablement apporter une solution
durable au problème de la dette. Aussi appelons-nous à
nouveau les donateurs bilatéraux et multilatéraux
à s'engager à prendre des mesures qui allègent
l'endettement écrasant des PMA et ouvrent la voie à
une croissance accrue, à l'investissement et à la
lutte contre la pauvreté dans ces pays. Il faut aussi veiller
à ce que les pauvres soient les premiers à bénéficier
des ressources libérées par l'allégement
de la dette dans le cadre d'une stratégie plus générale
de lutte contre la pauvreté. Enfin, il faut impérativement
que l'allègement de la dette soit financé par des
ressources complémentaires et qu'il ne se fasse pas au
détriment de l'aide à d'autres pays en développement.
- Les ressources naturelles et environnementales sont
le patrimoine commun et les actifs des pauvres. Ce sont les pauvres
qui souffrent le plus de la dégradation de la terre, des
sols, des ressources en eau et des ressources forestières,
indispensables à leur sécurité alimentaire,
à leur existence et à leur survie même. Les
règles et normes multilatérales en matière
de commerce, d'investissement, de propriété intellectuelle
ou d'environnement doivent contribuer à la préservation,
la régénération et la mise en valeur de ces
actifs, et en prévenir l'érosion. Ces règles
et normes doivent donc être continuellement revisitées
dans la perspective des pauvres et des PMA.
Au nom de la communauté parlementaire mondiale, l'Union
interparlementaire invite la Troisième Conférence
des Nations Unies sur les pays les moins avancés à
agir dans le sens d'un progrès réel, et non imaginaire.
Nous sommes convaincus que la communauté internationale
possède et la vision et les ressources pour avancer. Cette
conférence sur les pays les moins avancés pourrait
ainsi être la dernière du genre. Nous invitons chacun
à manifester la volonté politique requise pour qu'il
en soit ainsi.
Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 105ème Conférence et réunions connexes de l'Union interparlementaire" au format PDF (taille du fichier environ 478K). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement. | |
Conseil interparlementaire | Page d'accueil | Principaux domaines d'activités | Structure et fonctionnement
|