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COMMERCE EQUITABLE ET MECANISMES NOVATEURS DE FINANCEMENT POUR UN DEVELOPPEMENT DURABLE

Résolution adoptée à l’unanimité par la 128ème Assemblée
(Quito, 27 mars 2013)


La 128ème Assemblée de l’Union interparlementaire,

affirmant que le commerce équitable vise deux objectifs : offrir de vraies perspectives de développement aux petits producteurs et aux travailleurs des pays en développement; et exercer sur le système commercial mondial et les entreprises privées un impact positif qui les incite à concourir davantage à la justice, à l’inclusion sociale, et au développement durable, tout cela en conformité avec les normes et les politiques de l’Organisation internationale du travail (OIT),

sachant que le commerce équitable a un impact positif sur le revenu des producteurs et des travailleurs, en particulier des femmes, des pays en développement ainsi que sur l’emploi dans les pays développés et sur le développement durable,

rappelant l’Accord de partenariat que les membres du groupe des Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et la Communauté européenne et ses Etats membres ont signé à Cotonou (Bénin) le 23 juin 2000 (Accord de Cotonou) et modifié à Luxembourg le 25 juin 2005 et à Ouagadougou (Burkina Faso) le 22 juin 2010, et en particulier son article 23 i) dans lequel les parties souscrivent à la promotion du commerce équitable; et note que la réalisation des objectifs du commerce équitable est liée aux besoins et exigences du développement durable; et insistant sur le respect des principes du commerce équitable, en particulier dans le contexte du dialogue, de la transparence, du respect et de l'égalité qui doivent prévaloir dans le commerce international,

rappelant le Consensus de São Paulo adopté à la onzième session de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) tenue à São Paulo (Brésil) du 13 au 18 juin 2004, et les décisions prises lors du Sommet de Rio+20 tenu en juin 2012 au Brésil, et énoncé dans le Document final "L’avenir que nous voulons", où l’on indique que, étant donné la dimension sociale et humaine de la mondialisation, "les stratégies de développement doivent être formulées de manière à promouvoir une croissance économique soutenue et inclusive, le développement social et la protection de l’environnement, et, partant, l’intérêt de tous, et à intégrer davantage les aspects économiques, sociaux et environnementaux à tous les niveaux, en tenant compte des liens qui existent entre ces divers aspects, de façon à assurer un développement durable dans toutes ses dimensions",

notant que l’Union européenne est actuellement le plus grand marché de produits du commerce équitable, avec 60 à 70 pour cent des ventes mondiales,

considérant que le commerce équitable doit reposer sur les principes de pérennité, d’équité, de transparence et d’égalité des sexes, de façon à réduire l’écart entre riches et pauvres,

sachant qu’il faut trouver de nouveaux modes de financement du développement durable pour éliminer la pauvreté, assurer une éducation primaire à tous, promouvoir l’égalité des sexes et l'émancipation des femmes, et combattre les grandes pandémies,

sachant en outre qu’il faut des systèmes judiciaires solides et indépendants pour rendre la justice avec diligence et efficacité afin de permettre le développement durable,

consciente de la nécessité de faire face aux changements climatiques et au réchauffement de la planète, qu’il convient de considérer comme l’effet des activités de l’homme, et de la nécessité d'accroître les investissements publics et privés et d’intensifier la coopération internationale afin d’améliorer la sécurité alimentaire face à la menace des changements climatiques, et considérant à cet égard que les responsabilités et obligations de tous les pays doivent reposer à tout moment sur les principes d’équité et de responsabilité commune mais différenciée,

consciente également de la nécessité de disposer d’instruments internationaux régissant le commerce international en vue d’assurer l’égalité des chances entre pays développés et pays en développement, et en leur sein,

consciente en outre de la nécessité d’atteindre les objectifs de développement arrêtés au niveau international, dont les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) de manière à accélérer le développement durable,

rappelant les résolutions antérieures de l’UIP, et en particulier la résolution de la 104ème Conférence interparlementaire (Jakarta, 2000), intitulée "Financement du développement et nouveau modèle de développement économique et social propre à éliminer la pauvreté" et la résolution de la 112ème Assemblée (Manille, 2005), intitulée "Le rôle des parlements dans la mise en place de mécanismes internationaux novateurs de financement et de commerce propres à permettre le règlement du problème de la dette et la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement",

rappelant en outre le quatrième Forum de haut niveau sur l'efficacité de l'aide (Busan, décembre 2011) dont les participants se sont engagés à "développer davantage les mécanismes financiers novateurs en vue de mobiliser des financements privés à l'appui d'objectifs de développement communs",

se référant au travail novateur du Groupe pilote sur les financements innovants pour le développement,

se référant aussi au Document final de la Conférence Rio+20, où l’on peut lire ce qui suit : "Nous estimons que les mécanismes innovants de financement peuvent aider les pays en développement qui décident d’y recourir à mobiliser des ressources supplémentaires aux fins de leur développement. Ces mécanismes devraient compléter les modes traditionnels de financement et non s’y substituer. Sans méconnaître les progrès considérables qui ont été faits dans le domaine des sources innovantes de financement du développement, nous recommandons que les initiatives déjà prises soient transposées à plus grande échelle lorsqu’il y a lieu",

confirmant que le respect, par les pays développés, de leurs engagements financiers et des principes relatifs à l’efficacité de l’aide est, pour l’instant, insuffisant pour que les OMD et autres objectifs de développement puissent être atteints,

soulignant que, étant donné l’ampleur des moyens financiers que nécessite le développement durable, il convient de mobiliser des ressources financières auprès de l’ensemble des agents privés et publics, voire des deux, et ce, par divers moyens et instruments, en prenant des mesures pour prévenir le détournement de ces ressources vers des activités illicites,

observant qu’un certain nombre de secteurs clés de l’économie mondiale ne sont pas imposés dans certains pays en dépit de leurs externalités négatives,

se félicitant de l’augmentation non négligeable des fonds placés par des fondations privées dans des projets de développement durable, ce qui ne saurait exonérer les Etats de leurs responsabilités envers les citoyens,

considérant l’importance croissante des envois de fonds des migrants dans le financement du développement des pays pauvres et à revenu intermédiaire, et préoccupée  par le coût souvent excessif de ces envois de fonds,

soulignant que les changements climatiques seront particulièrement préjudiciables aux pays en développement et que les mesures de financement visant à en prévenir ou en atténuer les effets et à réduire la pauvreté énergétique contribueront à la réalisation des OMD,

tenant compte du rôle et de l’action de l’Organisation mondiale du commerce (OMC),

  1. appelle les parlements à promouvoir et à soutenir le commerce équitable et les autres initiatives de commerce encadrées par des organismes indépendants, qui contribuent à l’amélioration des conditions sociales et environnementales et, de ce fait, à la réalisation des OMD et à la mise en œuvre d’un programme du développement pour l’après-2015, appelle l’Union européenne à continuer de promouvoir et soutenir le commerce équitable et les autres initiatives de commerce encadrées par des organismes indépendants et à mettre en œuvre l’article 23 i) de l’Accord de Cotonou;
  2. appelle aussi tous les gouvernements à continuer de promouvoir et d’appuyer le commerce équitable et à en faire un élément obligatoire des objectifs de développement durable (ODD), qui seront intégrés dans le programme de développement pour l’après-2015;
  3. appelle également l’Union européenne à continuer de promouvoir et de soutenir le commerce équitable et les autres initiatives de commerce encadrées par des organismes indépendants, et à mettre en œuvre l’article 23 i) de l’Accord de Cotonou;
  4. invite les pays développés à donner des moyens financiers aux pays en développement, par le truchement de leurs mécanismes de coopération en matière de développement, pour leur permettre d’élaborer de nouveaux produits de commerce équitable et faire en sorte que les consommateurs aient accès à toutes les informations nécessaires pour faire les bons choix;
  5. demande que le commerce équitable respecte les normes pertinentes établies par Fair Trade International, qui prévoient entre autres des critères minimaux et progressifs destinés à garantir que tous les produits portant la certification commerce équitable soient élaborés et commercialisés selon des normes de justice économique et sociale, et dans le respect de l’environnement, en veillant tout particulièrement au respect des normes de l’OIT;
  6. demande aussi que soient établis des partenariats pour le développement entre les gouvernements, les autorités locales, les entreprises et les citoyens, comme l’initiative Fair Trade, pour assurer l’accès au marché aux producteurs défavorisés, garantir des revenus durables et favoriser une agriculture et des pratiques de production sur le plan environnemental durable;
  7. demande fermement que des procédures de certification du commerce équitable soient mises en place sous l’autorité des Etats et dans le cadre des organisations régionales compétentes en matière de commerce et de l’OMC;
  8. exhorte les parlements et les gouvernements à rechercher les nouveaux modes de financement nécessaires pour répondre aux besoins de développement et à définir des instruments et mécanismes potentiels d’affectation des ressources;
  9. encourage les parlements et les gouvernements à étudier le potentiel des nouveaux modes de financement ci-après aux plans national, régional et/ou international :
    • l’application d’une taxe aux transactions financières, qui pourrait prendre différentes formes;
    • la taxation des émissions de CO2, qui pourrait également prendre différentes formes;
    • la taxation des activités mondialisées, telles que les transports maritimes et aériens;
    • l’établissement de partenariats public-privé visant à combattre les grandes maladies, tels que l’Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination et la campagne efficace du Rotary International visant à éradiquer le paludisme; et
    • l’emploi de mécanismes de garanties et d’assurance destinés à stimuler le financement privé du développement, tels que les mécanismes de garantie de marché;
  10. prie instamment les parlements de jouer un rôle actif tant par la législation que par des mesures réglementaires pour alléger les taxes et droits prélevés sur les produits du commerce équitable;
  11. demande aux parlements et aux gouvernements de mieux prendre en compte les envois de fonds des migrants dans la définition des stratégies de développement et l’élaboration de leur financement et souligne que les pays d’accueil de travailleurs migrants ne doivent pas imposer des restrictions indues aux envois de fonds vers les pays d'origine de ces travailleurs mais doivent au contraire en alléger le coût étant donné qu’il s’agit d’une source cruciale de devises pour ces pays;
  12. souligne que ces apports financiers novateurs ne doivent pas représenter une charge supplémentaire pour les pays en développement, qu’ils doivent compléter les flux d’aide publique au développement existants sans réduction de leur montant, qu’ils doivent être compatibles avec une stratégie de développement axée sur un programme de développement pour l’après-2015, et être aussi prévisibles et durables que possible;
  13. souligne également que la transparence des mécanismes novateurs de financement et leur examen par le public sont des conditions indispensables à leur mise en place, propose que les programmes en place fassent l’objet d’études de cas visant à définir des orientations et demande que les mécanismes disparates de contrôle et d’évaluation soient harmonisés de manière à réduire le coût des transactions et à permettre d’évaluer de manière indépendante le fonctionnement des nouveaux modes de financement et de leur effet sur le développement;
  14. met en garde contre le risque d’associer des structures complexes aux mécanismes novateurs de financement, risquant d’empêcher une affectation transparente des ressources qui en découlent aux projets de développement, à en faciliter l’examen pour le public et à permettre de mesurer correctement leur contribution à la réalisation des objectifs de développement;
  15. demande que soit envisagée la possibilité de confier l’affectation du produit des mécanismes novateurs de financement à des institutions régionales ou mondiales;
  16. plaide pour la coordination des activités des ONG pertinentes et pour une meilleure utilisation des programmes existants et de l'expérience acquise;
  17. exhorte les parlements et les gouvernements des pays développés et en développement à promouvoir la coopération internationale dans la lutte contre l’évasion fiscale et à amplifier leurs efforts dans le domaine fiscal, surtout en ce qui concerne le recouvrement d’impôt et la lutte contre la fraude fiscale, notamment contre la fuite des capitaux vers des paradis fiscaux, ce qui est essentiel pour conduire une politique budgétaire de qualité et accroître les recettes des Etats, et suppose en particulier de reconnaître et de protéger les droits de propriété, en particulier pour les femmes, de disposer d’un registre foncier et d’améliorer le climat du commerce et de l’investissement dans les pays en développement;
  18. appelle au renforcement et à l’élargissement de l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) comme moyen d’améliorer la transparence des revenus et la responsabilisation dans les industries extractives, et invite les parlements à soutenir et à suivre de près des processus de l’ITIE dans leurs pays respectifs;
  19. invite les gouvernements des pays développés à amplifier leur aide aux autorités fiscales, au pouvoir judiciaire et aux organes de lutte contre la corruption des pays en développement;
  20. invite en outre les gouvernements des pays développés à lutter contre la corruption active dont se rendent coupables dans des pays en développement des sociétés domiciliées sur leur propre territoire;
  21. exhorte les pays, tant développés qu’en développement, à intensifier leurs efforts de lutte contre la corruption en mettant en place des systèmes judiciaires efficaces et impartiaux, de manière à mieux rentabiliser les dépenses et investissements publics;
  22. appelle les gouvernements et les ONG à œuvrer à la réalisation des engagements qu’ils ont pris en vertu de l’Accord de Copenhague et des autres accords internationaux relatifs aux changements climatiques;
  23. encourage les parlements et les gouvernements à étudier de manière approfondie des possibilités d’instauration de mécanismes de financement innovants pour aider les pays en développement à lutter contre les changements climatiques;
  24. appelle en outre tous les gouvernements, en particulier ceux des pays en développement, à œuvrer à la réalisation du développement durable en améliorant le niveau d’instruction des citoyens et en donnant aux femmes, aux enfants et aux autres groupes défavorisés les moyens de s’émanciper, et encourage les parlements et les gouvernements à étudier de manière approfondie les possibilités d’instauration de mécanismes de financement innovants pour l’éducation;
  25. appelle enfin à la tenue d'une conférence parlementaire internationale sur le commerce équitable qui débattrait des moyens de parvenir au commerce équitable, et du rôle des parlements à cet égard;
  26. invite les Etats qui ne l’ont pas encore fait à rejoindre le Groupe pilote sur les financements innovants pour le développement fondé en 2006, et à participer à tous les dispositifs existants de financement du développement durable;
  27. appelle les parlementaires et l’UIP à jouer un rôle central en faveur du commerce équitable, dans une perspective de développement durable.


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