| LA DEMOCRATIE A L'ERE NUMERIQUE FACE AUX MENACES POUR LA VIE PRIVEE ET LES LIBERTES INDIVIDUELLES 
Résolution adoptée à l’unanimité par la 133ème Assemblée(Genève, 21 octobre 2015)
 La 133ème  Assemblée de l'Union interparlementaire,
 
rappelant les  principes directeurs de la Charte des Nations Unies,
 
rappelant également les droits de l’homme et  les libertés fondamentales inscrits dans la Déclaration universelle des droits  de l’homme et les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme  pertinents, y compris le Pacte international relatif aux droits civils et  politiques, et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux  et culturels,
 
rappelant en outre la résolution sur le thème Trouver un équilibre entre sécurité nationale,  sécurité humaine et libertés individuelles, et déjouer la menace qui pèse sur  la démocratie : le rôle des parlements, adoptée par la 118ème  Assemblée de l'UIP (Le Cap, avril 2008),
 
prenant note de la résolution 69/166 de  l'Assemblée générale des Nations Unies, en date du 18 décembre 2014, intitulée Le droit à la vie privée à l'ère du  numérique
 
prenant  note également du rapport de la  Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme sur le droit à la vie  privée à l'ère du numérique,
 
rappelant les Principes directeurs des  Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme et sachant que la société civile et les  entreprises commerciales peuvent jouer un rôle important dans l'amélioration  comme dans la limitation de l'exercice des droits de l’homme, y compris du  droit à la vie privée et à la liberté d'expression à l'ère du numérique,
 
considérant que les droits fondamentaux s’appliquent aussi dans le cyberespace,
 
consciente de l'interdépendance entre la démocratie et le droit à la vie privée, à la  liberté d'expression et d'information, d'une part, et un internet libre et  ouvert, d'autre part, et sachant que  le droit à la vie privée est universellement reconnu, qu'il est protégé par le  droit international et que les citoyens du monde entier s’attendent à ce que ce  qu’il soit garanti en droit et en fait,
 
consciente également que, dans le domaine  de la surveillance numérique, l’adoption d’une loi et sa mise en application  sont insuffisantes, et que les garanties procédurales sont parfois médiocres et  le contrôle peu efficace,
 
préoccupée par les programmes de surveillance généralisée des communications numériques et  autres formes d'expression numériques qui constituent des violations du droit  des individus à la vie privée, notamment lorsqu’ils sont déployés à l’échelle  extraterritoriale, et qui présentent une menace pour la liberté d’expression et  d’information, ainsi que pour d’autres droits de l’homme fondamentaux, y  compris la liberté de réunion pacifique et d’association, compromettant ainsi  la démocratie participative,
 
reconnaissant qu’il est nécessaire de renforcer les capacités des parlementaires et des  instances parlementaires spécialisées et de leur donner les moyens de repérer  les lacunes législatives et d’adopter des lois sur la protection des droits de  l’homme, y compris le droit à la vie privée, et sur la prévention des  violations de ces droits,
 
affirmant la responsabilité des parlements d'établir, dans le respect des principes et des  engagements internationaux, un cadre juridique complet afin d'exercer un  contrôle efficace des actes des institutions publiques et des organismes de  surveillance agissant en leur nom, et de veiller à ce que tous les auteurs de  violations des droits de l'homme et des libertés individuelles aient à répondre  de leurs actes,
 
exprimant la nécessité de consulter tous les  intervenants concernés, y compris les groupes de la société civile, le monde  universitaire, la communauté technique et le secteur privé et de les associer à  l'élaboration des politiques relatives à l'ère numérique,
 
reconnaissant l'importance et l'expertise des institutions nationales des droits de l’homme,  des organisations non gouvernementales et des défenseurs des droits de l'homme,  ainsi que leur rôle en matière de suivi, d’élaboration des politiques, de  consultation et de sensibilisation, et se  félicitant du renforcement de la coopération entre ces organismes et les  responsables, et les parlements et les parlementaires, à travers le monde,
 
prenant  acte du travail et de la contribution de ces entités, notamment les  Principes internationaux sur l’application des droits de l’homme à la  surveillance des communications (dits "Principes nécessaires et  proportionnés"), auxquels ont adhéré plus de 400 organisations non  gouvernementales ainsi que l’Initiative mondiale des réseaux TIC,
 
affirmant que des systèmes de  communication sûrs et sans faille sont nécessaires pour le bien du public et la  protection des droits fondamentaux,
 
considérant les conclusions du rapport  du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du  droit à la liberté d'opinion et d'expression, sur l'utilisation du cryptage et  de l'anonymat,
 
reconnaissant la contribution des  parlements aux décisions permettant le nécessaire consensus national et  international pour une action concertée et efficace sur ces questions, et leur  influence sur ces décisions,
 
 
appelle les parlements à participer à  l'élaboration et à la mise en œuvre d'une stratégie d'ensemble pour permettre à  terme que toute la population jouisse des bénéfices considérables que  l'Internet peut apporter dans les domaines économiques, sociaux, culturels et  environnementaux pour atteindre les Objectifs du développement durable adoptés  par les Nations Unies;
 souligne que cette stratégie d'ensemble  doit viser à construire juridiquement et éthiquement un écosystème numérique  capable de garantir à tous les citoyens les mêmes droits et une défense  effective de leur liberté, par une éducation de tous à la maîtrise du  numérique, et d’assurer un équilibre des acteurs de nature à empêcher tout abus  de position dominante;
 souligne également que toutes les lois  traitant de la surveillance, de la vie privée et des données à caractère  personnel doivent s’inspirer des principes de légitimité, de légalité, de transparence,  de proportionnalité et de nécessité, ainsi que de la primauté du droit;
 appelle les parlements à revoir les  cadres nationaux et les pratiques de leur pays de manière à promouvoir et à  renforcer le rôle et la participation du public à l'ère numérique, la libre  circulation de l'information, des savoirs et des idées, et l'égalité d'accès à  l'Internet, de manière à améliorer la démocratie au XXIème siècle, encourage les parlements à lever  toutes les restrictions juridiques à la liberté d'expression et à la  circulation de l'information, et à défendre le principe de la neutralité du  Net;
 engage les parlements à revoir  soigneusement les lois nationales et les pratiques des institutions publiques  et/ou des organismes de surveillance agissant en leur nom afin de s'assurer qu'elles  se conforment au droit international et respectent les droits de l'homme, en  particulier en ce qu'elles touchent à la vie privée et appelle les parlements à veiller, dans le cadre de cet examen, à ce  que les sociétés privées et publiques ne soient pas contraintes de coopérer  avec les autorités par des actes portant atteinte aux droits de l’homme de  leurs clients, en tenant toutefois compte des exceptions prévues par le droit  international des droits de l’homme;
 appelle les parlements à veiller à ce  que les cadres juridiques nationaux soient pleinement conformes au droit  international des droits de l'homme, en ce qui a trait à l’interception, l'analyse,  la collecte, la conservation et l'utilisation commerciale de données et à  diffuser des rapports et informations des Etats et de l'UIP sur les cas  pertinents;
 engage les parlements à revoir leurs  lois de manière à interdire l’interception, la collecte, l’analyse et la conservation  des données à caractère personnel, y compris lorsque de telles activités sont  menées à l’échelle extraterritoriale ou de manière généralisée, sans le  consentement éclairé de la personne concernée ou l’injonction en bonne et due  forme d’un tribunal indépendant ayant des motifs raisonnables de soupçonner la  personne en cause d’être partie prenante à des activités criminelles;
 souligne que les mesures visant à  protéger la vie privée doivent être harmonisées à l’échelle nationale et  internationale, et appelle les  parlements à veiller à ce que les mesures de ce type prévues par la législation  nationale ne puissent être privées d’effet par la signature d’accords secrets  et informels visant à partager des informations avec des Etats étrangers ou des  multinationales;
 appelle les parlements à adopter des  lois abordant tous les aspects de la protection des données, tant pour le  secteur public que privé, et prévoyant, au minimum, des critères stricts  réglementant l’autorisation d’intercepter, de collecter, d’analyser et de conserver  les données, des limites claires et précises concernant l’utilisation des  données interceptées et collectées, ainsi que des mesures de sécurité  garantissant la conservation dans les meilleures conditions de sécurité  possibles, l’anonymat et la destruction appropriée et permanente des données,  et recommande la création d’instances  nationales de protection des données, indépendantes et efficaces, dotées des  prérogatives requises pour contrôler les pratiques et traiter les plaintes,  tout en engageant par ailleurs les parlements à veiller à ce que leur cadre  national de protection des données respecte scrupuleusement le droit  international et les droits de l’homme, en faisant en sorte que les mêmes  droits soient garantis pour les activités hors ligne et en ligne;
 appelle également les parlements à  veiller par la voie législative à ce que la collaboration entre les  gouvernements et les sociétés, entités ou autres organismes à divers programmes  de surveillance soit soumise au contrôle parlementaire, dans la mesure où cela  ne compromet pas la conduite d’enquêtes judiciaires;
 appelle  en outre les parlements nationaux et les gouvernements à inciter le secteur  privé des technologies à honorer ses obligations de respecter les droits de  l’homme, en tenant compte des Principes directeurs des Nations Unies relatifs  aux entreprises et aux droits de l'homme, la clientèle de ces sociétés devant  être pleinement consciente du mode de collecte et des conditions de stockage,  d’utilisation et de transmission de ses données, et appelle enfin les parlements à promouvoir l’harmonisation des  contrats d’utilisation à l’échelon mondial et à peser en faveur de la recherche  de techniques de protection des données conviviales de nature à contrer toutes  les menaces pesant sur la sécurité d’Internet;
 engage les parlements à rejeter  l’interception des télécommunications et les activités d’espionnage mises en  œuvre par tout Etat ou acteur non étatique impliqué dans tout processus, ayant  une incidence négative sur la paix et la sécurité internationales ainsi que sur  les droits civils et politiques, en particulier ceux consacrés par l’article 12  de la Déclaration universelle des droits de l’homme et l’article 17 du Pacte  international relatif aux droits civils et politique qui dispose que “nul ne  sera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa  famille, son domicile ou sa correspondance” et que “toute personne a droit à la  protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes”;
 reconnaît que les parlements doivent  définir, de manière relativement détaillée, les conditions dans lesquelles  pourrait être autorisée une remise en cause du droit à la vie privée, mettre en  place des procédures judiciaires strictes d’autorisation de la surveillance des  communications et contrôler la mise en œuvre de ces procédures, les limites  relatives à la durée de la surveillance, la sécurité et le stockage des données  et la protection contre les abus;
 souligne que, étant entendu qu’il y aura  toujours des cas où la sécurité nationale sera invoquée à l’échelon national à  propos d’outils technologiques susceptibles de menacer la sécurité et la  prospérité d’un Etat, les parlements doivent s’assurer de leur capacité à  superviser l’action de l’Exécutif et veiller à ce qu’un équilibre soit trouvé  entre la sécurité de la nation et les libertés individuelles, afin que les  mesures prises au nom de la sécurité nationale et de la lutte contre le  terrorisme n’enfreignent en aucune manière les droits de l’homme et ne  remettent nullement en cause la démocratie et les droits de l’homme;
 engage instamment les parlements à examiner et instaurer, le cas échéant,  des mécanismes de contrôle efficaces, indépendants et impartiaux, et à les  intégrer dans leur cadre juridique; souligne que les parlements doivent analyser toute lacune du contrôle qu’ils exercent,  ainsi que ses motifs, en veillant à ce que leurs instances de contrôle,  notamment les commissions et les médiateurs parlementaires disposent des  ressources et des autorisations requises, ainsi que des prérogatives  indispensables pour analyser l’action des institutions publiques et/ou des  organismes de surveillance agissant en leur nom, y compris les activités de  collaboration avec des organismes étrangers dans le cadre de programmes  d’échange d’informations ou d’opérations conjointes, et présenter des rapports  à ce propos;
 appelle les parlements à reconnaître la  contribution vitale que la société civile et le public peuvent apporter au suivi  de l’Exécutif et encourage les  parlements et les parlementaires à développer et organiser des consultations,  ainsi qu’à accueillir favorablement l’apport de toutes les parties prenantes, y  compris les institutions nationales des droits de l’homme, le secteur privé, la  société civile, la communauté technique, le secteur universitaire et les  utilisateurs, à leurs activités de suivi, d’élaboration et de mise en œuvre des  politiques;
 engage  fortement les parlements à veiller  à ce que les tentatives de restriction des voix de la démocratie en ligne,  comme celles des journalistes, d’autres acteurs des médias et des défenseurs  des droits de l’homme, par des moyens tels que l’emprisonnement, le  harcèlement, la censure, le piratage, le filtrage illégal, le blocage, la  surveillance et autres mesures répressives, soient strictement interdites par  les lois nationales conformément au droit international des droits de l’homme,  aux traités et aux conventions;
 recommande vivement aux parlements d’adopter, dans le cadre de leur fonction  de contrôle, des lois destinées à protéger les lanceurs d’alerte formant un  ensemble cohérent et conforme aux normes et aux bonnes pratiques à l’échelon international;
 appelle les parlements à remplir leur rôle de garant de la responsabilité des  gouvernements et des sociétés privées dans les cas de violations des droits de  l’homme tels  que le droit à l’intégrité physique et psychologique, le droit à la vie privée,  à la liberté d’expression et aux autres libertés individuelles, cette  responsabilité incluant des sanctions destinées à garantir la justice et à agir  comme force de dissuasion, parmi lesquelles les poursuites pénales, les amendes  administratives, la suspension ou le retrait des licences commerciales et le  versement d’indemnités aux personnes lésées;
 appelle également les parlements à veiller à ce que les dispositions  légales et administratives nécessaires soient prises pour combattre la traite  des êtres humains perpétrée grâce à l’Internet, le harcèlement sexiste et la  cyber-violence qui vise les femmes et les enfants en particulier;
 souligne que les victimes de violations  du droit à la vie privée et autres libertés individuelles doivent disposer de  voies de recours efficaces et appelle les parlements à prévoir dans la législation des garanties de procédure de  nature à faciliter l’accès aux voies de recours effectivement mises en place;
 engage fortement les parlements à assurer la protection de l’information  dans le cyberespace et dans les infrastructures associées afin de sauvegarder  la vie privée et la liberté individuelle des citoyens en établissant des  activités de coopération et des relations, aussi bien formelles qu’informelles,  entre les nations qui pourraient ainsi échanger des informations et des données  d’expérience; appelle les parlements  à mettre en place une coopération technique et procédurale ainsi qu’une  collaboration visant à réduire le risque de cyber-infractions et de  cyber-attaques et, dans ce contexte, à moderniser les traités d’entente d’ordre  juridique pour faire face aux défis multidimensionnels de l’ère numérique, y  compris celui de la rapidité de réaction;
 se félicite de la nomination du  Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à la vie privée et invite l’UIP à entamer la discussion  avec lui, ainsi qu’avec le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la  promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, le  Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits  de l’homme et le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la  protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans le cadre de  la lutte antiterroriste, et à  collaborer avec ces derniers à l’élaboration d’un recueil des bonnes pratiques  législatives dans ce domaine;
 appelle les parlements à veiller à ce  que leurs gouvernements respectifs coopèrent pleinement avec le Rapporteur  spécial des Nations Unies sur le droit à la vie privée, le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression, le Rapporteur  spécial sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des  droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, y compris en ce qui concerne les défis émergeant à  l’ère numérique; invite les  parlements à se tenir informés des recommandations de ces Rapporteurs spéciaux et,  si besoin, à élaborer le cadre législatif nécessaire à leur mise en œuvre;
 invite l’UIP à élaborer, en coopération  avec les parties prenantes concernées, y compris les organisations  internationales et régionales, la société civile et les experts des droits de  l’homme, des programmes de renforcement des capacités à l’intention des instances  parlementaires chargées de contrôler le respect du droit à la vie privée et des  libertés individuelles dans un environnement numérique. 
 
 
| Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 133ème Assemblée et réunions connexes de l'Union interparlementaire" au format PDF (taille du fichier 1050 Ko). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement. |  |  PAGE D'ACCUEIL
  ASSEMBLEE  DOMAINES D'ACTIVITES  STRUCTURE ET DOCUMENTS |