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NECESSITE D'APPORTER UNE SOLUTION RADICALE AU PROBLEME DE LA DETTE DU MONDE EN DEVELOPPEMENT

Résolution adoptée sans vote par la 88e Conférence interparlementaire
(Stockholm, 18 septembre 1992)


La 88e Conférence interparlementaire,

profondément préoccupée par la persistance et l'aggravation du problème de l'endettement des pays en développement,

constatant que cet endettement atteint maintenant 42 pour cent du PNB des pays concernés, contre 37,7 pour cent en 1982,

consciente que plus d'un milliard d'êtres humains dans le monde vivent dans le dénuement total et que le niveau élevé d'endettement de nombreux pays en développement représente un obstacle majeur à la croissance et au développement durable dont ils ont tant besoin,

consciente également que le service de la dette de bon nombre de pays dépasse la totalité du budget national qu'ils consacrent à l'éducation, au logement, à la santé, aux programmes environnementaux et aux activités sociales et économiques correspondantes, et qu'il absorbe un pourcentage excessif de leurs recettes annuelles en devises, accaparant ainsi des fonds dont ils auraient besoin pour financer des initiatives économiques et le développement humain,

sachant que l'endettement international a non seulement une incidence économique et financière, mais revêt aussi une dimension politique, qu'il entrave le progrès social dans de nombreux pays en développement et représente une menace pour la stabilité politique et le développement démocratique, aggrave les conflits entre les pays en développement et les pays industrialisés et pèse sur les relations internationales,

préoccupée par le fait que le faible niveau de l'épargne à l'échelle mondiale compromet l'approvisionnement en capitaux nécessaire au tiers-monde,

consciente que, bien que de nombreux pays en développement aient réussi à faire face aux problèmes de la dette, l'endettement, en particulier de certains pays en développement pauvres demeure une source de préoccupation majeure,

profondément préoccupée par les conflits régionaux qui aggravent les problèmes économiques et sociaux actuels dans les zones touchées et sont ainsi à l'origine de flux de plus en plus importants de réfugiés,

ayant à l'esprit la nécessité d'attacher une plus grande importance encore aux problèmes Nord-Sud et convaincue que la crise de la dette ne peut être réglée de manière efficace dans un cadre mondial, avec la participation de toutes les parties concernées, créanciers et débiteurs, puisque l'incapacité persistante des pays débiteurs d'honorer leurs obligations en matière de remboursement de la dette, constitue une menace pour l'économie mondiale,

notant l'intérêt que l'Union interparlementaire n'a cessé de porter aux problèmes du développement en général et au dialogue Nord-Sud, et estimant que les conférences de l'Union, tant statutaires que spécialisées, regroupant des représentants des Etats du Nord et du Sud, offrent un cadre privilégié particulièrement propice à ce dialogue,

se déclarant profondément préoccupée par la précarité du système financier et monétaire international résultant en particulier des changements politiques qui sont survenus en Europe centrale et orientale et qui ont encore ajouté aux lourdes responsabilités et charges financières de la communauté internationale,

convaincue que l'annulation de la dette, une gestion plus rigoureuse de ressources naturelles limitées et une plus grande coordination des politiques économiques permettraient de réduire les déséquilibres actuels,

consciente que les femmes et les enfants sont particulièrement vulnérables aux retombées d'un endettement en progression constante, que les femmes sont gravement touchées par l'actuelle détérioration de la situation économique, et que les enfants non seulement souffrent de l'inefficacité et de l'insuffisance des services offerts en matière de santé et d'éducation, mais encore devront, dans l'avenir, assumer la responsabilité de rembourser les dettes de leurs parents,

préoccupée de ce que les négociations multilatérales d'Uruguay piétinent depuis plus de cinq ans en raison de conflits d'intérêts entre les pays développés et que, de ce fait, les exportations des pays en développement continuent de se heurter à des obstacles commerciaux, ce qui limite la capacité des pays débiteurs de servir leur dette,

prenant note des résolutions adoptées par les Nations Unies au sujet de la dette extérieure des pays du tiers-monde,

prenant également note des résolutions déjà adoptées par l'Union interparlementaire, notamment de la résolution de la 73e Conférence interparlementaire (Lomé, 1985) sur le rôle des parlements et leur contribution à l'élimination de la pauvreté par l'allégement du fardeau de la dette internationale, et de la résolution de la 74e Conférence interparlementaire (Ottawa, 1985) sur la contribution des parlements à la détermination des mesures et actions à entreprendre pour éliminer le fardeau de la dette extérieure qui pèse sur les pays en développement,

1. exhorte les gouvernements et les parlements des pays industrialisés à redoubler d'efforts pour promouvoir l'épargne, à oeuvrer résolument à la libéralisation des échanges agricoles ainsi qu'à l'élimination du protectionnisme et des barrières commerciales et à mener à bon terme les négociations en cours du GATT;

2. invite les pays donateurs à annuler totalement ou partiellement les prêts accordés au titre de l'aide publique au développement, à oeuvrer en faveur de l'allégement du reste de la dette, en échange de l'engagement ferme de la part des pays bénéficiaires de protéger l'environnement et de procéder à des réformes économiques et politiques, et à encourager les banques privées à participer plus activement à la recherche de solutions durables au problème de la dette;

3. invite également les gouvernements et les parlements à contribuer au renforcement de la capacité qu'ont le Fonds monétaire international, la Banque internationale de reconstruction et de développement (BIRD)/Banque mondiale et les banques de développement régional de résoudre la crise de la dette, en particulier par les mesures suivantes :

  • le Fonds monétaire international doit, dans sa politique de réglementation, s'employer à améliorer les conditions d'une croissance à long terme, et par là favoriser l'emploi. Cette politique ne doit pas se fonder uniquement sur des critères économiques mais doit aussi tenir compte de facteurs sociaux, écologiques et politiques;
  • le Fonds monétaire international doit davantage tenir compte des politiques des pays créanciers dans ses activités de contrôle;
  • le budget militaire des pays débiteurs doit être davantage pris en compte dans la politique de réglementation du FMI;

4. demande que la BIRD/Banque mondiale et le Fonds monétaire international soient dotés d'institutions parlementaires qui observent et suivent leurs activités et s'assurent que leurs politiques prennent en compte la responsabilité conjointe des pays débiteurs et créanciers afin de :

  • favoriser dans le tiers-monde un développement durable, socialement juste et respectueux de l'environnement, en mettant l'accent en particulier sur les droits de l'homme, la démocratie et une réduction des dépenses militaires;
  • associer les pays bénéficiaires, et en particulier les populations concernées, à tous les stades de la planification et de la réalisation de projets, pour leur conférer une "dimension humaine" fondamentale;

5. invite les gouvernements et les parlements des pays en développement à adopter un système d'économie de marché, socialement juste et soucieux de l'environnement et à garantir la protection de la propriété, la concurrence et l'établissement des prix en fonction du marché ainsi que la liberté de commerce et d'entreprise;

6. recommande que les gouvernements et les parlements des pays en développement s'emploient résolument à lutter contre l'inflation, à consolider leurs budgets, à stimuler l'initiative privée, à déréglementer et à libéraliser leur économie et qu'ils mettent pleinement à profit toutes les possibilités qu'offre le marché pour résoudre leurs problèmes d'endettement, sans sacrifier ni compromettre un développement durable, équitable et socialement et écologiquement rationnel;

7. demande aux gouvernements des pays débiteurs d'éviter les projets de prestige, de mettre en place une politique d'investissements productifs propres à attirer l'épargne locale disponible et de lutter efficacement contre la fuite des capitaux;

8. invite les gouvernements créanciers représentés au Club de Paris à étudier la possibilité de faire bénéficier les pays en développement à faible revenu et/ou lourdement endettés de mesures d'allégement de la dette (remise, rééchelonnement, octroi de nouveaux crédits, allégement des intérêts, conversions de la dette) en s'inspirant du modèle appliqué à l'Egypte et à la Pologne dont les dettes ont été rééchelonnées avec succès;

9. exhorte pays développés et pays en développement à encourager les investissements directs dans les pays débiteurs;

10. compte que la BIRD/Banque mondiale et le Fonds monétaire international continueront, par leur politique de réaménagement de la dette, à aider les pays en développement fortement endettés à réduire leur dette;

11. rappelle aux gouvernements des pays développés que, selon l'objectif fixé il y a plusieurs années par les Nations Unies, ils doivent consacrer 0,7 pour cent de leur PNB à l'aide publique au développement et les invite instamment à prendre les mesures nécessaires pour se rapprocher de cet objectif;

12. engage la communauté internationale à soutenir, notamment en apportant une assistance technique et financière appropriée, les efforts déployés par les pays en développement pour offrir une protection sociale aux groupes économiques les plus faibles tout en exécutant des programmes de stabilisation et de restructuration économiques;

13. invite les membres de l'Union interparlementaire venant de pays donateurs à encourager une participation active et une représentation de haut niveau de leur pays à la Conférence internationale sur l'assistance à l'enfant africain, que l'Organisation de l'unité africaine tiendra du 25 au 27 novembre 1992 à Dakar (Sénégal);

14. demande aux membres de l'Union interparlementaire d'encourager les institutions bilatérales et multilatérales compétentes à accorder des ressources additionnelles qui puissent servir à appuyer les efforts supplémentaires que devraient faire les pays en développement pour protéger les enfants, leur vie et leur développement;

15. invite la communauté internationale et les organisations internationales à intensifier la coopération dans tous les domaines, de sorte que l'écart entre le Nord et le Sud ainsi qu'entre l'Est et l'Ouest ne se creuse pas davantage et à encourager parallèlement une politique de détente au niveau économique, social et écologique;

16. demande à tous les gouvernements et parlements, ainsi qu'à toutes les organisations internationales concernées d'accélérer l'exécution des mesures prévues dans la Déclaration de Paris et dans le Programme d'action des années 90 en faveur des pays les moins avancés;

17. recommande que, dans le cadre de l'Union, soit créé un véritable Forum Sud-Sud afin de permettre aux parlementaires des pays en développement de coopérer plus étroitement dans le domaine du développement économique, en particulier dans leurs efforts pour gérer et alléger la dette de leur pays;

18. recommande de mettre en place un système efficace, dans le cadre du Comité de soutien au dialogue Nord-Sud et à travers les rapports périodiques des Groupes nationaux, pour vérifier le respect des recommandations et des résolutions de la prochaine conférence interparlementaire sur la dette du tiers-monde.


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