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CAS N° CMBD/01 - SAM RAINSY - CAMBODGE

Résolution adoptée sans vote par le Conseil interparlementaire à sa 160e session
(Séoul, 15 avril 1997)


Le Conseil interparlementaire,

se référant à l'exposé du cas qui figure dans le rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires (CL/160/14a)-R.1) et à la résolution qu'il a adoptée à sa 159e session (septembre 1996) concernant le cas de M. Sam Rainsy (Cambodge),

prenant en considération la communication de S. M. le Roi du Cambodge datée du 14 mars 1997 et celle du premier Premier Ministre, le prince Norodom Ranariddh, datée du 15 février 1997,

prenant également en considération les informations communiquées par les sources le 28 février, les 10, 21 et 24 mars et le 7 avril 1997,

rappelant qu'en mai 1995 M. Sam Rainsy a été expulsé de son parti, le FUNCINPEC, et qu'il a en conséquence été exclu de l'Assemblée nationale bien qu'il n'existe aucune disposition à cet effet dans la législation cambodgienne; qu'il a constamment exprimé la crainte qu'en dernière analyse M. Rainsy n'ait été déchu de son mandat pour avoir exercé son droit à la liberté d'expression, et qu'il a formulé l'espoir que la situation de M. Rainsy serait réexaminée rapidement par les plus hautes autorités du Cambodge dans un esprit conforme aux principes de la démocratie et au respect des droits de l'homme,

rappelant qu'à ce jour M. Rainsy n'a pas eu la possibilité de faire entendre sa cause par un tribunal ni en particulier de saisir le Conseil constitutionnel ­ compétent en cette matière ­ qui n'a pas encore été mis en place; rappelant à cet égard que, dans sa lettre du 3 septembre 1996, le premier Premier Ministre a indiqué que les textes de loi portant création du Conseil supérieur de la magistrature et du Conseil constitutionnel avaient déjà été adoptés par l'Assemblée nationale; que lui-même et le second Premier Ministre, M. Hun Sen, n'avaient pas encore réussi à s'entendre sur la nomination des membres de ces organes; que dans sa lettre du 14 mars 1997 S. M. le Roi du Cambodge indique qu'il a demandé instamment aux deux Présidents du gouvernement royal d'assurer le fonctionnement de ces deux organes dans les meilleurs délais,

rappelant qu'en novembre 1995 M. Sam Rainsy a créé un nouveau parti politique, le Parti de la nation khmère (PNK) qui, le 11 décembre 1995, a officiellement été déclaré illégal par le gouvernement et invité à cesser ses activités,

considérant que, dans sa lettre du 15 février 1997, le premier Premier Ministre indique que la situation politique au Cambodge évolue rapidement; qu'à la suite d'une initiative qu'il a prise en sa qualité de président du FUNCINPEC, un Front uni national a été créé et une plate-forme politique a été rédigée " sur les bases d'une libre adhésion aux plus hautes valeurs communes d'union nationale et de reconstruction nationale. L'organisation de M. Sam Rainsy et lui­même ont décidé spontanément d'adhérer à cette proposition constructive du premier parti politique du Royaume. "; que M. Rainsy, dans une lettre du 28 février 1997, confirme que le prince Ranariddh et lui­même ont conclu une alliance politique qui pourrait même permettre de régler le problème posé par la perte de son siège à l'Assemblée nationale,

considérant cependant que, si les deux Premiers Ministres ont déclaré depuis que le Parti de la nation khmère n'était pas illégal, celui-ci n'a pas encore été officiellement reconnu par les autorités et que ses membres ont été l'objet de graves manoeuvres d'intimidation dans certaines des provinces; considérant à cet égard que le texte de la loi relative aux partis politiques prévue par la Constitution n'a même pas encore été déposé au Parlement alors que des élections législatives doivent avoir lieu en 1998,

rappelant qu'il n'a cessé d'exprimer son inquiétude pour la sécurité personnelle de M. Rainsy, qui est l'objet de menaces dont certaines émanent même des hautes sphères du pouvoir,

considérant que le 30 mars 1997 la direction du PNK a organisé une manifestation pour réclamer la mise en place d'un système judiciaire juste, équitable, indépendant et honnête; que, lorsque les quelque 300 manifestants se sont rassemblés devant l'Assemblée nationale, quatre grenades à main ont été lancées dans la foule, causant la mort de 19 personnes, dont le garde du corps de M. Rainsy, et en blessant plus de 100 autres,

considérant que les sources font état de graves anomalies dans l'organisation de la sécurité aux abords de la manifestation, qui semblent indiquer que les agresseurs bénéficiaient de la complicité de la police, des témoins oculaires ayant déclaré que les forces armées présentes sur les lieux avaient aidé les assaillants à s'enfuir sans être inquiétés,

considérant que les deux Premiers Ministres sont convenus de créer une commission d'enquête indépendante; que, cependant, le second Premier Ministre, M. Hun Sen, qui a demandé que les instigateurs soient traduits en justice, a également déclaré que le Ministère de l'Intérieur devrait enquêter sur les organisateurs de la manifestation et les arrêter s'il apparaissait qu'ils avaient agi illégalement; que cette déclaration a été interprétée comme une menace contre M. Sam Rainsy,

considérant que, selon les sources, des efforts ont été déployés pour impliquer M. Sam Rainsy dans l'affaire du meurtre du beau­frère de M. Hun Sen, Khov Samuth, en novembre 1996,

considérant que l'une des principales préoccupations exprimées par le Représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU pour les droits de l'homme au Cambodge dans son rapport à la 53e session de la Commission des droits de l'homme (E/CN.4/1997/85) a trait à l'administration de la justice et qu'il y souligne que les autorités politiques et militaires doivent respecter l'intégrité et l'indépendance de la magistrature,

  1. sait gré à S. M. le Roi de sa volonté constante d'apporter sa coopération au Comité et à l'Union interparlementaire;
  2. remercie également le prince Ranariddh, premier Premier Ministre, de l'information qu'il a communiquée et de son concours;
  3. est alarmé par l'odieuse agression à la grenade perpétrée le 30 mars 1997 contre des citoyens khmers qui exerçaient pacifiquement leur droit à la liberté de réunion et tout particulièrement par les sérieuses allégations selon lesquelles les assaillants bénéficiaient de la complicité des forces de sécurité;
  4. note qu'une commission spéciale d'enquête a été constituée et demande instamment aux autorités de veiller à ce qu'elle puisse s'acquitter de ses fonctions sans ingérence d'aucune sorte;
  5. demeure profondément préoccupé par les menaces qui pèsent sur la sécurité personnelle de M. Sam Rainsy; souligne de nouveau que chaque Etat a le devoir de veiller à la sécurité de ses ressortissants et engage une fois encore le gouvernement à protéger M. Rainsy en toutes circonstances;
  6. note avec inquiétude que M. Rainsy pourrait être l'objet de fausses accusations et souhaite recevoir des informations détaillées sur l'action judiciaire le concernant;
  7. regrette de constater que le Conseil constitutionnel ne siège toujours pas, ce qui prive le pays de l'organe chargé non seulement de veiller au respect de la Constitution mais aussi de s'assurer que des citoyens comme M. Sam Rainsy puissent faire entendre leur cause, ainsi que la Constitution le prévoit;
  8. note avec satisfaction que le Parti de la nation khmère bénéficie actuellement d'une reconnaissance de fait; s'inquiète cependant de constater qu'il n'a pas encore été officiellement enregistré et demande instamment aux autorités de procéder à son enregistrement le plus rapidement possible;
  9. prie le Secrétaire général de faire part de ces considérations et préoccupations à S. M. le Roi du Cambodge;
  10. prie aussi le Secrétaire général de communiquer la présente décision au Président de l'Assemblée nationale, aux premier et second Premiers Ministres et au Ministre de la Justice du Cambodge, en les invitant à prendre d'urgence ces questions en considération;
  11. prie enfin le Secrétaire général de porter ses préoccupations à propos de ce cas à la connaissance de toutes les personnes et organisations susceptibles de le faire évoluer vers un règlement satisfaisant;
  12. prie le Comité des droits de l'homme des parlementaires de poursuivre l'examen de ce cas et de lui faire rapport à sa prochaine session (septembre 1997).


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