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CAS N° GMB/01 - LAMIN WAA JUWARA - GAMBIE

Résolution adoptée sans vote par le Conseil interparlementaire
à sa 165ème session (Berlin, 16 octobre 1999)


Le Conseil interparlementaire,

se référant à l'exposé du cas de M. Lamin Waa Juwara, membre de la Chambre des représentants de la Gambie dissoute en 1994, qui figure dans le rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires (CL/165/12b)-R.1) et à la résolution qu'il a adoptée à sa 164ème session (avril 1999),

tenant compte des informations et commentaires communiqués par les services du Procureur général et Secrétaire d'Etat à la Justice en date du 6 juillet et du 2 août, ainsi que par le Président du Parlement en date du 24 août 1999,

rappelant les éléments suivants versés au dossier :

  • Le 29 juillet 1998, la Haute Cour a rejeté la demande en réparation déposée par M. Juwara pour les nombreuses arrestations et détentions arbitraires dont il avait été victime de la part d'agents du Conseil provisoire de gouvernement militaire (AFPRC) qui a pris le pouvoir après la dissolution du Parlement en 1994, et a conclu que les défendeurs dans cette affaire ne pouvaient pas être traduits en justice pour les agissements qui leur étaient reprochés car l'article 13 de l'annexe 2 de la Constitution de 1997 garantissait aux membres de l'AFPRC, à ses officiers et à ses candidats l'immunité de poursuites pour tout acte commis ou omis dans l'exercice de leurs fonctions alors que l'AFPRC était au pouvoir.
  • M. Juwara a de nouveau été arrêté à son domicile le soir du 18 mai 1998, sans mandat d'arrêt, et détenu au secret jusqu'à ce que la Cour suprême ordonne sa libération sous caution le 8 juin 1998. La nuit de son arrestation, M. Juwara, cruellement maltraité par des agents de sécurité, a été grièvement blessé; selon des articles de presse reprenant les déclarations de M. Juwara assortis de photos, il a tout d'abord été agressé à son domicile par des agents placés sous le commandement de l'officier Amadou Suwareh; sur le chemin de la prison centrale Mile Two, où il a été placé en détention, le véhicule de police dans lequel il se trouvait s'est arrêté à Denton Bridge; M. Juwara aurait été tiré hors du véhicule et violemment frappé avec des câbles et des lanières en caoutchouc jusqu'à ce que quelqu'un crie : " Baba Jobe, Baba Jobe, ça suffit "; tous soins médicaux lui auraient été refusés pendant son séjour en prison, apparemment sur l'ordre du Secrétaire d'Etat à l'Intérieur, M. Momoudou Bojang,

considérant que, selon les informations fournies par les services du Procureur général et Secrétaire d'Etat à la Justice, "le Gouvernement poursuit l'examen de l'affaire afin de parvenir à une solution définitive",

rappelant qu'en juin 1998 M. Juwara et d'autres personnes ont été déférés au tribunal de première instance de Brikama et accusés de "complicité de vandalisme et d'actes de vandalisme" pour avoir "intentionnellement endommagé le chantier de construction à la mosquée de Brikama"; que le tribunal de première instance de Brikama les a acquittés le 22 février 1999 en prononçant un non-lieu; que, toutefois, l'Etat a fait appel de ce jugement et que l'affaire devait être entendue le 27 juillet 1999,

notant que les services du Procureur général et Secrétaire d'Etat à la Justice, évoquant dans une lettre datée du 23 septembre 1999 une invitation antérieure du Comité à une audition, informaient le Comité de la position officielle du Gouvernement gambien qui avait décidé "de faire tout son possible pour rencontrer le Comité des droits de l'homme des parlementaires par l'entremise du Procureur général ou de son représentant ... en vue de faciliter un échange de vues direct"; que, bien qu'un représentant n'ait pu assister à la présente session du Comité, les services du Procureur général et Secrétaire d'Etat à la Justice ont, dans une lettre datée du 8 octobre 1999, réaffirmé "leur volonté de rencontrer le Comité à l'occasion d'une session ultérieure...",

notant que, dans sa communication du 24 août 1999, le Président de l'Assemblée nationale faisait observer que l'affaire de M. Juwara était devant le tribunal compétent et donc entre les mains de la justice et que, par conséquent, l'Assemblée ne pouvait intervenir,

  1. remercie le Président du Parlement de ses observations ainsi que le Procureur général et Secrétaire d'Etat à la Justice des informations et des commentaires communiqués par ses services et apprécie vivement l'esprit de coopération dont ils ont fait preuve; espère qu'une rencontre avec le Comité pourra effectivement être organisée à sa prochaine session;
  2. tient à préciser qu'il ne suggère nullement au Parlement d'entraver la bonne marche de la justice; tient cependant à rappeler, comme il n'a cessé de le faire, que les parlements sont le gardien des droits de l'homme et qu'ils doivent en garantir le respect en adoptant des lois, en veillant au fonctionnement indépendant et impartial du pouvoir judiciaire et en contrôlant l'action de l'Exécutif;
  3. note avec une profonde préoccupation que l'article 13 de l'annexe 2 de la Constitution de 1997, qui a pour effet de consacrer l'impunité pour les crimes commis par les agents de l'AFPRC, est contraire aux normes internationales auxquelles la Gambie a souscrit, et souligne que le Parlement, en qualité de législateur, est compétent pour faire en sorte que le droit national soit conforme aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme;
  4. rappelle également les préoccupations qu'il a exprimées à propos des graves allégations faisant état de sévices infligés à M. Juwara alors qu'il était en garde à vue, et affirme que le Parlement, dans l'exercice de sa fonction de contrôle du pouvoir exécutif, devrait enquêter sur les allégations de violations des droits de l'homme qui lui parviennent, telles que des allégations de sévices infligés à des personnes en garde à vue;
  5. réitère son désir de connaître a) le résultat de l'enquête ouverte pour punir les auteurs des sévices infligés à M. Juwara, dont l'identité est apparemment connue, et b) l'issue de l'appel du jugement rendu par le tribunal de première instance de Brikama dans l'affaire de la mosquée de Brikama;
  6. rappelle que la Gambie a adhéré à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants ainsi qu'au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, qui garantissent le droit de ne pas faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraires et de ne pas être soumis à des tortures, à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants; rappelle aussi que les articles 9 et 6 de la Constitution gambienne contiennent les mêmes garanties et souligne en conséquence que les autorités gambiennes, y compris le Parlement, ont le devoir de faire respecter ces droits fondamentaux;
  7. prie le Secrétaire général de communiquer cette résolution aux autorités compétentes en les invitant à fournir les informations demandées;
  8. prie le Comité des droits de l'homme des parlementaires de poursuivre l'examen de ce cas et de lui faire rapport à sa prochaine session (avril-mai 2000).


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