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EGYPTE
CAS N° EGY/02 - AYMAN NOUR

Résolution adoptée à l'unanimité par le Conseil directeur
à sa 183ème session (Genève, 15 octobre 2008)

Le Conseil directeur de l'Union interparlementaire,

se référant au cas de M. Ayman Nour, membre de l'Assemblée du peuple d'Egypte au moment du dépôt de la plainte, exposé dans le rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires (CL/183/12b)-R.1), et à la résolution qu'il a adoptée à sa 182ème session (avril 2008),

tenant compte de la lettre du Président de l'Assemblée du peuple en date du 29 mai 2008 par laquelle celui-ci communiquait la réponse du Procureur général à la demande du Comité visant à obtenir l'autorisation d'envoyer une délégation rendre visite à M. Nour; tenant compte également de sa lettre du 31 août et de celle du 13 octobre 2008 qui a été remise en main propre au Secrétariat de l'UIP,

considérant que l'immunité parlementaire de M. Ayman Nour, fondateur du parti d'opposition Al-Ghad, qui s'est présenté aux élections présidentielles de septembre 2005, lors desquelles il a terminé deuxième, derrière le Président Moubarak, a été levée le 29 janvier 2005, après quoi il a immédiatement été arrêté et inculpé de faux et usage de faux aux fins de fonder son parti; que le 24 décembre 2005, il a été déclaré coupable et condamné à cinq ans d'emprisonnement, condamnation qui a été maintenue en dernière instance et qu'il purge actuellement; que l'état de santé de M. Nour serait précaire; que M. Nour a introduit une demande de libération pour raisons de santé en août 2006, laquelle a été rejetée sur la base d'un rapport médical officiel transmis aux autorités pénitentiaires en janvier 2007, affirmant que le maintien de M. Nour en détention ne mettait pas sa vie en danger; que les recours contre cette décision ont été rejetés, le 31 mai 2007 par le Tribunal du Caire chargé de juger les infractions majeures, le 31 juillet 2007 par le Conseil d'Etat et, en dernier ressort, le 17 mars 2008, par la Haute Cour administrative; qu'à la mi-mai 2007, M. Nour a été brutalisé par des agents de sécurité du tribunal où il devait assister à une audition dans une autre affaire; que le 6 septembre 2007 l'un de ses co-accusés, M. Ayman Hassan Ismail El-Refa'y, qui était revenu sur sa déposition contre lui, a été retrouvé pendu dans la cellule qu'il partageait avec trois autres détenus; et que les autorités soutiennent qu'il s'est suicidé,

notant plus particulièrement les détails ci-après, exposés dans le rapport du Comité:

  • l'immunité parlementaire de M. Nour a été levée en moins d'une journée, le Président de l'Assemblée ayant reçu la demande de levée de l'immunité le vendredi 29 janvier 2005 à 1 heure du matin, la Commission des affaires constitutionnelles et législatives s'étant réunie de 11 heures à 11 h.35 pour examiner son cas, et la plénière de 12 h.20 à 14 heures, heure à laquelle elle a voté la levée de l'immunité de M. Nour; les sources ont fait remarquer que les procédures de levée d'immunité prennent normalement plusieurs mois, voire plusieurs années, et ont mentionné à ce propos les cas de MM. Fa'ek El Tenneihi, Ragab Helal Hemeida, Hany Serour, Emad El-Gelda et Mamadou Ismail (membre de la Chambre haute), accusés respectivement de falsification de procurations, de fourniture de sang contaminé à des hôpitaux, de corruption et d'homicide,

  • M. Nour a été accusé, puis condamné par la suite, pour avoir falsifié des signatures pour faire enregistrer son parti politique, ce qui nécessite, selon l'article 7 de la loi sur les partis politiques, 50 signatures; le Président de l'Assemblée du peuple a déclaré à cet égard que M. Nour, qui avait déjà réuni bien plus de 50 signatures, avait besoin d'en rassembler un plus grand nombre, car ses précédentes demandes d'enregistrement avaient été rejetées et qu'un plus grand nombre de signatures apporterait « la preuve de la popularité de son parti » et aurait plus de poids sur la décision de la Commission des affaires des partis politiques; toutefois, selon les sources, les précédentes demandes de M. Nour avaient été rejetées, non pas faute de signatures, mais parce que la Commission des affaires des partis politiques avait estimé que le programme de son parti ne différait pas de ceux d'autres partis politiques,

  • Ayman Hassan Ismail El-Refa'y, l'un des co-accusés de M. Nour, était revenu sur sa déposition contre celui-ci au tribunal, arguant qu'elle lui avait été soutirée sous la pression; la Cour a conclu qu'aucun élément attestant de cette contrainte n'avait été fourni; en prison, M. Ismail avait demandé l'autorisation de faire de nouvelles dépositions dans l'affaire Nour; M. Nour en avait informé le Procureur le 21 août, puis à nouveau le 1er septembre 2007, en lui adressant un rapport qu'il avait reçu de M. Ismail et en lui demandant – sans résultat – de l'entendre; le 6 septembre 2007, M. Ismail a été retrouvé pendu dans la cellule qu'il partageait avec trois autres détenus; d'après les autorités, il se serait pendu avec un drap à la porte de la cellule, ses codétenus n'auraient rien remarqué et l'auraient trouvé mort à l'heure de la prière du matin; les autorités affirment que M. Ismail s'est suicidé; le Procureur a opposé une fin de non-recevoir aux demandes répétées de M. Nour d'être entendu à ce sujet; il aurait également refusé de répondre à ses requêtes répétées en réexamen,

  • le cas de M. Nour n'a pas bénéficié d'un examen approfondi, car la Cour de cassation est compétente uniquement pour veiller à l'application de la loi, mais pas pour statuer quant au fond de la cause;

  • le 12 mai 2007, alors qu'il était au tribunal pour une affaire de droit du travail, M. Nour aurait été brutalisé et roué de coups par des agents de sécurité parce qu'il aurait refusé de monter plusieurs étages à pied, en raison de son état de santé, et aurait demandé à emprunter l'ascenseur, se plaignant de problèmes d'articulations; les autorités ont classé sa plainte contre les agents en question, au motif que les témoignages recueillis auraient prouvé que les accusations portées par M. Nour étaient fausses; selon les sources, cette affaire n'a jamais été portée devant les tribunaux,

  • M. Nour souffre de diverses affections, notamment de diabète et d'hypertension; il souffre d'une affection cardiaque et a des endoprothèses coronaires, raison pour laquelle il a introduit une demande de libération anticipée pour raisons de santé, au titre de l'article 36 de la loi N° 396/1956, qui prévoit la libération anticipée des détenus atteints d'une maladie menaçant leur pronostic vital ou risquant d'entraîner une incapacité permanente; dans le cadre de la procédure, le Procureur général/le Parquet du district sud du Caire a établi un comité de trois membres pour examiner les faits; en janvier 2007, ce comité a conclu que l'affection du détenu « [n'était] qu'une maladie, qui se [traduisait] par un taux élevé de sucre sanguin et une hypertension qui [n'avait] entraîné ni insuffisance cardiaque congestive ni raideur des genoux » et que son maintien en détention ne mettait pas sa vie en danger « s'il [recevait] les soins médicaux appropriés et s'il [était] régulièrement mis sous observation médicale lors de fréquentes visites à l'hôpital spécialisé de la prison pour y être suivi et traité »; à la demande de M. Nour, des médecins et professeurs de médecine, enseignant à l'hôpital universitaire Al-Qasr El-Ainy et dans les universités d'Ain Shams et d'Alexandrie, ont établi des rapports dans lesquels, se fondant sur les informations médicales rassemblées par le comité de trois membres, ils arrivaient à la conclusion que les affections dont souffrait M. Nour mettaient sa vie en danger et que son maintien en détention aboutirait à une incapacité, et doutaient, pour certains, que le traitement requis pût être administré dans des hôpitaux pénitentiaires; dans son arrêt du 31 juillet 2007, la Haute Cour administrative conclut qu'il a été établi que le syndrome de M. Nour affecte ses reins et pourrait causer une sténose des artères coronaires, mais ne doute pas du rapport du comité de trois membres selon lequel les affections de M. Nour ne constituaient pas au moment de l'examen une complication mettant sa vie en danger; il a été constamment allégué que M. Nour ne recevait pas le traitement médical nécessaire et les informations des autorités tendant à prouver le contraire ont été contredites par des informations communiquées par les sources;

  • selon les sources, M. Nour n'a ni repas spéciaux, ni traitement médical pour le diabète, en dépit d'une décision de justice du 4 septembre 2007, en faisant obligation aux autorités,
considérant que plusieurs demandes du Comité tendant à effectuer une mission et à recueillir des informations directement auprès des autorités compétentes et de M. Nour, de sa famille et de son avocat, pour clarifier les informations parfois contradictoires versées au dossier ont été rejetées malgré les efforts du Président de l'Assemblée du peuple pour organiser la mission en question et, plus particulièrement pour arranger une rencontre avec M. Nour, rencontre que le Procureur général a néanmoins jugée contraire au droit égyptien et dont il a estimé qu'elle constituait une ingérence dans la justice égyptienne,

considérant qu'en mai 2008, le Procureur général a réaffirmé sa position antérieure et souligné qu'il n'existait aucun précédent d'un organisme étranger ou représentant d'un organisme étranger qui aurait rendu visite à un détenu égyptien; notant à cet égard que l'organisation internationale non gouvernementale Human Rights Watch/Middle East Watch (HRW/MEW) avait été autorisée à mener une mission d'information en Egypte en janvier et février 1992 pour enquêter sur des arrestations, des pratiques concernant les détentions, ainsi que sur des allégations de torture concernant des personnes détenues par les forces de sécurité; que la délégation de HRW/MEW, composée uniquement de ressortissants étrangers, avait pu visiter six prisons égyptiennes, y compris la prison de Tora Liman, sur une période de huit jours; que dans une lettre communiquée par le Président de l'Assemblée du peuple, l'administration pénitentiaire dit cependant ne pas avoir d'information à ce sujet; que le rapport de mission, publié en mars 1992, indique clairement que les représentants de HRW/MEW ont été autorisés à s'entretenir avec des détenus sur leur lieu de détention; qu'en outre, le sociologue égyptien Saad Eddin Ibrahim, fondateur de deux organisations importantes de défense des droits de l'homme, a reçu la visite de l'ancienne Ministre canadienne des affaires étrangères, Flora McDonald, d'ambassadeurs de différents pays de l'Union européenne, du Président de l'Université américaine du Caire, ressortissant américain, ainsi que de représentants d'Amnesty International et de Human Rights Watch, lorsqu'il était incarcéré à la prison de Tora Farm de 2000 à 2003,

notant que fin mai 2008 M. Nour aurait été victime d'une intoxication alimentaire qui a gravement endommagé sa santé, lui laissant des marques sur la peau; qu'il n'aurait pas été conduit à l'hôpital avant une semaine; que dans sa lettre du 31 août 2008 le Président de l'Assemblée du peuple a fourni des documents indiquant que selon les autorités, M. Nour avait été conduit à l'hôpital le 8 juin 2008 en raison d'une suspicion d'attaque cardiaque et y aurait reçu le traitement nécessaire avant d'être reconduit en prison,

ayant à l'esprit enfin, que le 23 juillet 2008, le Président Moubarak, en vertu du décret présidentiel N° 200, a amnistié plus de 1 500 détenus ayant purgé la moitié de leur peine, comme c'était le cas de M. Nour; que, cependant, la condamnation pour faux et usage de faux a été exclue du décret alors que, selon les sources, il s'appliquait à des crimes et délits au nombre desquels, le meurtre, la torture, la corruption, l'espionnage et les atteintes à la sûreté de l'Etat, ainsi qu'à soixante autres crimes, et ne s'appliquait donc pas au cas de M. Nour; qu'un autre décret d'amnistie pris en octobre excluait également les condamnations pour faux et usage de faux; que, selon le Président de l'Assemblée du peuple, tous les décrets présidentiels d'amnistie adoptés depuis 2002 excluent les condamnations pour faux et usage de faux; que, cependant, d'après la source, la majorité des décrets d'amnistie pris auparavant par le Président Moubarak n'excluaient pas la condamnation pour faux et usage de faux,

  1. remercie le Président de l'Assemblée du peuple de sa coopération non démentie, en particulier de ses lettres du 31 août et du 13 octobre 2008, et regrette que le Comité n'ait pu le rencontrer à la session qu'il a tenue durant la 119ème Assemblée;

  2. regrette vivement que le Procureur général n'ait pas autorisé le Comité à rendre visite à M. Nour, bien que l'autorisation de rendre visite à des détenus égyptiens ait été accordée par le passé à des étrangers, notamment à des organisations non gouvernementales des droits de l'homme;

  3. reste profondément préoccupé par l'état de santé de M. Nour qui, d'après le comité tripartite, nécessite des contrôles médicaux réguliers et des visites fréquentes à l'hôpital; souligne dans ce cadre que, dans son jugement de juillet 2007, la Haute Cour administrative a indiqué qu'au moment de son examen par le comité tripartite en janvier 2007, sa vie n'était pas en danger et que plus de 18 mois se sont écoulés depuis lors sans qu'un autre examen détaillé de son état de santé n'ait été pratiqué;

  4. regrette profondément que M. Nour n'ait pu bénéficier des décrets d'amnistie édictés en juillet et en octobre 2008 et demande au Président d'amnistier M. Nour;

  5. estime que l'état de santé de M. Nour n'est pas la seule raison qui justifierait une grâce, mais également le fait que la contrefaçon dont les tribunaux égyptiens l'ont déclaré coupable n'a porté atteinte aux droits ou à la vie de personne et semble avoir été sans fondement dans la mesure où M. Nour avait recueilli bien plus des 50 signatures nécessaires à l'enregistrement du parti Al-Ghad;

  6. rappelle que l'Égypte, en tant que membre du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, s'est engagée à observer les normes les plus strictes en matière de droits de l'homme et estime que l'amnistie de M. Nour irait dans le sens de cet engagement;

  7. espère sincèrement qu'une rencontre entre le Président de l'Assemblée du peuple et le Comité pourra être organisée à la faveur de la prochaine Assemblée de l'UIP pour leur permettre de maintenir le dialogue et charge le Secrétaire général de prendre les dispositions nécessaires à cette fin;

  8. charge le Comité de poursuivre l'examen de ce cas et de lui faire rapport à sa prochaine session, qui se tiendra durant la 120ème Assemblée de l'UIP (avril 2009), lors de laquelle il espère pouvoir clore ce cas suite à un règlement satisfaisant.
Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 119ème Assemblée de l'UIP et réunions connexes" au format PDF (taille du fichier environ 663 Ko). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement.Get Acrobat Reader

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