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PHILIPPINES

CAS N° PHI/07 - ANTONIO F. TRILLANES

Résolution adoptée à l'unanimité par le Conseil directeur
à sa 184ème session (Addis-Abeba, 10 avril 2009)

Le Conseil directeur de l'Union interparlementaire,

saisi du cas du sénateur Trillanes (Philippines), qui a fait l'objet d'une étude et d'un rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires conformément à la « Procédure d'examen et de traitement, par l'Union interparlementaire, de communications relatives à des violations des droits de l'homme dont sont victimes des parlementaires »,

prenant note du rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires, qui contient un exposé détaillé du cas (CL/184/12.b)-R.1),

considérant les éléments suivants :

  • M. Antonio F. Trillanes, alors lieutenant dans la Marine nationale philippine, a été arrêté le 27 juillet 2003 et placé en détention pour avoir participé à ce qu'il est convenu d'appeler la « mutinerie de l'hôtel Oakwood », lors de laquelle plus de 300 militaires s'étaient rendus à l'hôtel Oakwood, à Makati, pour faire connaître leurs doléances sur la corruption qui régnait au sein des forces armées des Philippines, et avaient dénoncé en particulier ce qui a ensuite été connu sous le nom de « Greenbase Documents »; l'incident s'était terminé sans heurt avec la signature de l'accord d'Oakwood qui prévoyait une enquête indépendante sur les allégations de corruption et la poursuite de seulement cinq membres du groupe, dont M. Trillanes, en application de la loi martiale; cependant, M. Trillanes et 30 autres personnes ont par la suite été accusés de tentative de coup d'Etat – délit qui ne donne pas droit à une libération conditionnelle;

  • Alors qu'il était en détention préventive, M. Trillanes a été autorisé à s'inscrire sur les listes électorales en décembre 2006, à déposer, en février 2007, un dossier de candidature aux élections sénatoriales, à voter le 14 mai 2007, à être proclamé sénateur-élu et à recevoir l'investiture le 29 juin 2007; il a obtenu le onzième score, avec 11 189 671 suffrages, et il a été élu Président de la Commission sénatoriale de réorganisation de la fonction publique et du gouvernement;

  • Le sénateur Trillanes a d'abord été incarcéré au Centre de détention du Service de renseignement de l'Armée, puis à la prison de la Marine de Fort Bonifacio et est actuellement détenu au quartier général de la police nationale des Philippines; durant sa campagne électorale, M. Trillanes a été autorisé à rencontrer régulièrement ses partisans et toutes les personnes souhaitant le voir; après son élection en juin 2007, cette règle a continué à s'appliquer et il a bénéficié d'amples droits de visite et a même été autorisé à tenir en prison une première réunion de la Commission sénatoriale dont il était élu président; cependant, quelques mois après son élection, cette situation a changé, à tel point qu'à présent il n'est pratiquement plus en mesure d'exercer son mandat; il a demandé à être autorisé à assister aux séances du Sénat – et le Sénat a introduit de son côté une requête dans ce sens – mais ces demandes ont été rejetées en dernière instance par la Cour suprême; bien que l'ancien directeur de la prison de la Marine, le colonel Luciardo D. Oneba, ne se soit pas opposé à ce que M. Trillanes assiste aux séances du Sénat mais ait simplement recommandé que « l'on vienne chercher le sénateur et qu'il soit véhiculé, à l'aller et au retour, avec un dispositif de sécurité suffisant du Sénat, chaque fois qu'il devra assister à une séance, dont l'objet devra être indiqué » et, dans une lettre datée du 19 juillet 2007 au tribunal d'instance, le Chef d'état-major de l'Armée des Philippines, le général Hermogenes Esperon, a affirmé à propos du sénateur Trillanes qu'il ne serait fait « aucun obstacle, d'aucune sorte, à l'élection et à l'accomplissement de ses obligations, conformément au mandat qu'il tient du peuple »;

  • Pour rejeter la demande de M. Trillanes, la Cour suprême s'est fondée essentiellement sur le précédent Peuple c. Romeo Jalosjos, dans lequel elle avait estimé que « le fait d'autoriser le prévenu-demandeur à assister aux réunions du Congrès et des commissions, à raison de cinq jours par semaine ou plus, ferait pratiquement de lui un homme libre […] Une situation aberrante comme celle-ci élèverait non seulement le prévenu-demandeur à une classe spéciale, mais irait aussi à l'encontre de l'objet du système pénitentiaire »; les sources ont fait remarquer qu'il n'était pas pertinent de se référer à cette affaire, car contrairement au sénateur Trillanes, le parlementaire concerné avait déjà été condamné en première instance au moment du dépôt de la requête, pour deux chefs d'accusation de détournement de mineur et six chefs d'accusation pour actes de luxure (attentats aux mœurs), et avait tenté de se soustraire à la justice;

  • Les sources signalent en outre l'affaire de l'ancien Gouverneur de la région autonome du Mindanao musulman, M. Nur Misuri, qui a été libéré sous caution en avril 2008, bien qu'il fût à l'époque jugé pour rébellion, infraction qui ne donne pas droit à la libération conditionnelle, pour avoir organisé un soulèvement dans la province de Jolo (Mindanao), qui a coûté la vie à des centaines de personnes,

  • Le 25 juillet 2007, le Sénat a adopté la Résolution n° 3 intitulée « Résolution exprimant la conviction du Sénat que le sénateur Antonio F. Trillanes IV devrait être autorisé à participer aux séances et aux autres fonctions du Sénat, conformément à l'état de droit »; le Sénat a noté entre autres qu'il était « peu probable, sinon impossible, au vu de tous les éléments », que le sénateur Trillanes quitte le pays s'il bénéficiait de la libération conditionnelle et a renvoyé à l'affaire de Justiniano Montano, sénateur de Cavite, en ces termes : « Au début des années 50, M. Justiniano Montano, sénateur de Cavite, s'est retrouvé dans une situation analogue à celle du sénateur Trillanes. M. Montano avait été inculpé et placé en détention pour meurtre multiple, crime qui, comme le délit dont est accusé M. Trillanes, ne peut donner lieu à une libération conditionnelle, mais la Cour suprême lui a accordé la libération conditionnelle pour qu'il puisse assister aux séances du Congrès et s'acquitter de ses autres obligations en tant que sénateur-élu du pays »;

  • Le chef de la minorité au Sénat a déposé une motion signée par tous les sénateurs sauf trois, pour autoriser Trillanes à participer aux auditions du Sénat par vidéoconférence; la motion est en cours d'examen à la Commission sénatoriale du règlement; le Sénat est en train d'amender son règlement pour que ses membres puissent participer à ses séances par vidéoconférence,
sachant que les Philippines sont partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) qui consacre le droit à une procédure équitable et qu'en tant que membre du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, les Philippines se sont engagées à observer les normes les plus strictes en matière de droits de l'homme,
  1. rappelle que tout prévenu, qu'il soit incarcéré ou non, a le droit d'être jugé sans retard indu et que les personnes incarcérées doivent être jugées dans les meilleurs délais; affirme qu'une diligence particulière est de mise lorsqu'il s'agit de parlementaires, leur détention les empêchant d'exercer efficacement leur mandat et privant leurs électeurs de représentation au Parlement;

  2. demeure à cet égard vivement préoccupé de ce que M. Trillanes soit poursuivi et en détention préventive depuis plus de cinq ans, période qui, à la lumière de la jurisprudence internationale, semble aller à l'encontre de ses droits fondamentaux au sens de l'article 9, paragraphe 3, et de l'article 14, paragraphe 3 c) du PIDCP; souhaite savoir où en est la procédure judiciaire le concernant et s'il est probable qu'elle aboutisse rapidement;

  3. rappelle en outre qu'il est un principe bien établi qui veut qu'une personne soit libérée en attendant d'être jugée, sauf si les autorités peuvent démontrer que des raisons suffisantes justifient le maintien en détention; estime qu'il y a d'amples raisons, à la lumière du précédent judiciaire dans lequel le sénateur a été libéré en attendant son procès, pour que M. Trillanes soit autorisé à assister aux séances du Sénat et ait à sa disposition tous les moyens nécessaires à l'exercice utile de son mandat parlementaire;

  4. observe que le fait de priver les 11 millions de citoyens qui ont voté pour lui de représentation au Parlement ne peut que nuire au processus démocratique; prend donc acte avec intérêt de la motion du Sénat visant à ce que M. Trillanes soit autorisé à participer aux séances du Sénat par vidéoconférence et de l'amendement que le Sénat envisage d'apporter à son règlement pour que ses membres puissent participer à ses travaux par vidéoconférence, et espère que l'amendement sera adopté sous peu;

  5. souhaite enfin savoir si le Parlement a ouvert une enquête sur les accusations de corruption au sein de l'Armée, portées par M. Trillanes et ses coaccusés;

  6. charge le Secrétaire général de faire part de la présente résolution aux autorités, en les invitant à communiquer les informations demandées;

  7. charge le Comité de poursuivre l'examen de ce cas et de lui faire rapport à sa prochaine session, qui se tiendra durant la 121ème Assemblée de l'UIP (octobre 2009).
Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 120ème Assemblée de l'UIP et réunions connexes" au format PDF (taille du fichier environ 779 Ko). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement.Get Acrobat Reader

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