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MADAGASCAR
CAS N° MAG/05 - LANTONIAINA RABENATOANDRO
CAS N° MAG/06 - HENRI RANDRIANJATOVO
CAS N° MAG/07 - MAMISOA RAKOTOMANDIMBY
CAS N° MAG/08 - RAYMOND RAKOTOZANDRY
CAS N° MAG/09 - RANDRIANATOANDRO RAHARINAIVO
CAS N° MAG/10 - ELIANE NAÏKA

Résolution adoptée à l'unanimité le Conseil directeur
à sa 185ème session (Genève, 21 octobre 2009)

Le Conseil directeur de l'Union interparlementaire,

saisi du cas des six parlementaires susmentionnés de Madagascar, qui a fait l'objet d'une étude et d'un rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires conformément à la « Procédure d'examen et de traitement, par l'Union interparlementaire, de communications relatives à des violations des droits de l'homme dont sont victimes des parlementaires »,

prenant note du rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires (CL/185/11.b)‑R.1), qui contient un exposé détaillé du cas,

tenant compte de la réunion que le Comité a tenue avec Mme Eliane Naïka le 18 octobre 2009 pendant la 121ème Assemblée,

considérant que le cas en question doit être replacé dans le contexte politique suivant :

  • en mars 2009, au terme de deux mois d'affrontements, l'ancien maire d'Antananarivo, M. Andry Rajoelina, s'est emparé du pouvoir avec le soutien de l'armée et une Haute Autorité de transition (HAT), autoproclamée et présidée par lui, a été mise en place; la HAT a suspendu l'Assemblée nationale et le Sénat et a contraint le Président élu, Marc Ravalomanana, à quitter le pays; le 23 avril 2009, la Haute Cour constitutionnelle s'est déclarée incompétente pour connaître de plusieurs requêtes visant à déclarer inconstitutionnelle la suspension du Parlement; la communauté internationale a largement condamné le coup d'Etat;

  • un dialogue politique, coordonné par l'Equipe conjointe de médiation pour Madagascar sous l'égide de l'Union africaine, de la SADC (South African Development Community - Communauté de développement d'Afrique australe), de l'OIF et des Nations Unies, a été instauré afin de rétablir l'ordre constitutionnel, la paix et la stabilité à Madagascar; le 9 août 2009, les quatre chefs de file des mouvances politiques de Madagascar sont parvenus à un accord sur la formation d'un gouvernement de transition largement représentatif, consensuel, neutre et pacifique (Accord de Maputo); l'Accord prévoit aussi l'annulation de toutes les sanctions administratives et pénales concernant des délits politiques dont ont été reconnus coupables des hommes et femmes politiques, des civils ou des militaires pendant la période de décembre 2002 à août 2009; une réunion qui a eu lieu fin août 2009 appelée Maputo II s'est terminée par un échec, faute d'un accord sur la présidence pendant la période de transition,
notant que les parlementaires concernés font tous partie du groupe dit légaliste qui est favorable au retour à l'ordre constitutionnel et soutient le Président Ravalomanana,

considérant les éléments suivants versés au dossier concernant la situation de MM. Lantoniaina Rabenatoandro, Henri Randrianjatovo, Mamisoa Rakotomandimby et Raymond Rakotozandry :

  • les quatre parlementaires ont été arrêtés le 23 avril par des militaires aux ordres de la Haute Autorité de transition (HAT) alors qu'ils s'apprêtaient, selon la source, à tenter d'ouvrir la session ordinaire du Parlement prévue pour le 2 mai 2009;

  • selon la source, l'arrestation s'est déroulée dans les conditions suivantes : après les avoir fouillés et tout volé, les militaires ont obligé les parlementaires concernés à se mettre à genoux au bord de la route avec une affiche portant les mots « SE M. le Président Marc Ravalomanana » attachée autour du cou; le sénateur Rabenatoandro et le député Randrianjatovo ont reçu chacun deux paires de gifles et les autres députés des coups de crosse de kalachnikov; après le passage des journalistes, ils ont été conduits par un camion de la gendarmerie à plusieurs endroits et finalement, vers 17 h.30, amenés à Ambohibao au bureau de la Commission nationale mixte d'enquête; après une troisième fouille, ils ont été enfermés et détenus jusqu'au samedi 25 avril 2009 dans des cellules séparées mesurant 1,50 m x 2,50 m, puis emmenés au tribunal d'Anosy devant le Procureur du tribunal de première instance; celui-ci leur a notifié les chefs d'inculpation, à savoir distribution d'armes, distribution d'argent, incitation à la guerre civile et à des troubles publics et destruction de biens publics, accusations qu'ils ont toutes rejetées; un mandat de dépôt leur a été décerné et ils ont été transportés à la prison d'Antanimora où ils ont été détenus; selon les sources, ils n'ont pu à aucun moment bénéficier de l'assistance d'un avocat;

  • le Ministre des affaires étrangères a fourni les informations suivantes : la légalité de l'arrestation des députés en question et de leurs poursuites n'est pas contestable dans la mesure où les faits qui leur sont reprochés sont visés aux articles 89, 91.1) et 318.1) du Code pénal; ils ont été inculpés de crimes de complot, d'incitation à la guerre civile et d'actes de nature à compromettre l'ordre public; les règles de la procédure pénale ont été respectées, elles aussi; les mesures judiciaires prises, y compris leur détention provisoire, sont justifiées par la nécessité non seulement de faire cesser les affrontements physiques entre les partisans des deux camps rivaux, mais aussi et surtout de prévenir la persistance et le développement de tels affrontements; des mesures ont été prises pour accélérer le traitement de leur cas et l'instruction touchait à sa fin;

  • s'agissant de l'état de santé des parlementaires concernés, notamment du sénateur Rabenatoandro, et de leurs conditions de détention, le Ministre des affaires étrangères a indiqué que les quatre hommes avaient fait l'objet d'une visite médicale après leur admission à la prison (Maison) centrale et que le médecin-chef avait organisé un plan de suivi médical pour chacun d'eux; les parlementaires, qui sont détenus dans le quartier réservé aux hautes personnalités incarcérées, peuvent recevoir librement les visites de leurs avocats et de leurs familles; selon la source, ils ont reçu la visite des ambassadeurs des Etats-Unis d'Amérique, d'Allemagne, d'Afrique du Sud et de France;

  • Le 18 août 2009, ils ont été libérés après avoir été condamnés à un an d'emprisonnement avec sursis; un appel est en instance;
considérant les éléments versés au dossier concernant M. Randrianatoandro Raharinaivo :
  • selon la source, M. Raharinaivo a été arrêté le 15 septembre 2009 après avoir fait, le même jour, l'objet d'une enquête de gendarmerie; ayant été remis au Parquet, il a été placé sous mandat de dépôt dans la prison centrale d'Antanimora; plusieurs accusations auraient été portées contre lui, mais une seule serait connue, à savoir incitation « à descendre dans la rue »; la source affirme que son arrestation est motivée par des considérations politiques et liée à l'affiliation de M. Raharinaivo au mouvement politique du Président Ravalomanana;
considérant les éléments versés au dossier concernant Mme Eliane Naïka :
  • le 12 septembre 2009 vers 11 heures, Mme Naïka a été arrêtée par un groupe de militaires armés de pied en cap et dirigés par le commandant Charles Randrianasoavina des Forces d'intervention spéciales (FIS) alors qu'elle se trouvait à Antananarivo à l'hôtel où logent d'habitude les parlementaires non originaires de la capitale; ivres, les militaires sont entrés avec fracas dans l'hôtel, ont défoncé les portes des chambres et les ont saccagées, emportant ce qui les intéressait; en arrivant dans la chambre de Mme Naïka, ils l'ont rouée de coups et l'ont emmenée, sans avoir de mandat d'arrêt, à la gendarmerie de Betongolo, où elle a été interrogée; le procureur l'a placée sous mandat de dépôt et elle a été emmenée à la prison de Manjakandriana;

  • Mme Naïka est accusée, entre autres, d'avoir organisé des attroupements sans autorisation et d'y avoir participé, de dégradation de biens publics, de violences et voies de fait, d'outrage aux forces de l'ordre et de rébellion; la procédure de flagrant délit aurait été appliquée, alors qu'il n'y avait pas de flagrant délit;

  • le 18 septembre 2009, le tribunal d'Anosy a prononcé sa libération provisoire; son procès devait avoir lieu le 13 octobre 2009; toutefois, elle a quitté le pays le 20 septembre,
considérant que des mandats d'arrêt ont été décernés contre 18 autres parlementaires qui sont entrés dans la clandestinité,

sachant que la Constitution malgache contient de nombreuses dispositions garantissant les droits fondamentaux et que Madagascar est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui consacre ces droits et tenue à ce titre de les respecter,

  1. remercie de sa coopération l'Ambassadeur et Représentant permanent de Madagascar auprès de l'Office des Nations Unies et des organisations internationales à Genève; 

  2. exprime sa vive préoccupation devant l'arrestation des six parlementaires qui, étant donné les circonstances, ne peut être considérée que comme arbitraire et illégale, ne serait-ce que parce qu'elle a été effectuée par un régime lui-même dépourvu de toute base légale et par des agents sans autorité pour le faire; considère que la manière dont ils ont été arrêtés montre que l'armée tenait à causer le maximum de souffrance morale, à inspirer la peur et à humilier; est alarmé par la brutalité qui a accompagné l'arrestation de Mme Naïka et prie instamment les autorités de facto d'en sanctionner les auteurs, dont l'identité est connue;

  3. note que MM. Lantoniaina Rabenatoandro, Henri Randrianjatovo, Mamisoa Rakotomandimby et Raymond Rakotozandry ont été arrêtés, selon les autorités, surtout pour « prévenir la persistance et le développement des affrontements physiques entre les partisans des deux camps rivaux »; conclut par conséquent que les accusations portées contre eux concernent des crimes potentiels et que ces accusations et les poursuites judiciaires engagées contre eux ne sont fondées ni en droit ni en fait, mais résultent de considérations politiques; observe par ailleurs que les circonstances humiliantes de leur arrestation témoignent du caractère politique et arbitraire de cette arrestation; 

  4. exhorte les autorités de facto à libérer immédiatement M. Raharinaivo comme elles s'y sont engagées en signant l'Accord de Maputo;

  5. est alarmé d'apprendre que des mandats d'arrêt ont été décernés contre 18 parlementaires, souligne que leur arrestation serait contraire à l'Accord de Maputo et engage donc les autorités de facto à tenir leur engagement au titre de cet accord et donc à annuler les mandats;

  6. souligne que la suspension du parlement n'enlève pas aux personnes concernées leur qualité de parlementaires et surtout ne les prive pas des droits fondamentaux qui leur sont garantis par la Constitution et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques auquel Madagascar est partie, tels que la liberté d'expression et de réunion, la liberté de ne pas faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraire et de ne pas être soumis à la torture ou à des mauvais traitements;

  7. prie le Secrétaire général de se mettre en rapport avec l'Equipe conjointe de médiation pour Madagascar et les organisations impliquées dans le processus de dialogue afin qu'elles veillent au respect des droits fondamentaux des parlementaires concernés;

  8. charge le Comité d'examiner la possibilité d'effectuer une mission à Madagascar, de poursuivre l'examen de ce cas et de lui faire rapport à sa prochaine session, qui se tiendra durant la 122ème Assemblée de l'UIP (mars-avril 2010).
Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 121ème Assemblée de l'UIP et réunions connexes" au format PDF (taille du fichier environ 633 Ko). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement.Get Acrobat Reader

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