COMBODGE
CAS N° CMBD/47 - MU SOCHUA |
Résolution adoptée à l'unanimité par le Conseil directeur
à sa 189ème session (Berne, 19 octobre 2011)
Le Conseil directeur de l'Union interparlementaire,
se référant au cas de Mme Mu Sochua, députée de l’opposition à l'Assemblée nationale du Cambodge, exposé dans le rapport du Comité des droits de l’homme des parlementaires (CL/189/11b)‑R.1), et à la résolution qu’il a adoptée à sa 188ème session (avril 2011),
rappelant les éléments suivants versés au dossier :
- Mme Sochua ayant annoncé publiquement qu’elle allait poursuivre le Premier ministre Hun Sen en diffamation, celui-ci lui a intenté un procès, citant notamment pour preuve la plainte de Mme Sochua à l’UIP; si la plainte de Mme Sochua pour diffamation a été rapidement rejetée, en revanche, celle du Premier ministre a prospéré dès la levée de l'immunité parlementaire de Mme Sochua par l'Assemblée nationale lors d'une séance à huis clos et par un vote à main levée, sans que ses arguments aient été entendus; en juin 2010, la Cour suprême a confirmé le verdict du tribunal municipal de Phnom Penh qui l’avait jugée coupable et condamnée à une lourde amende; comme Mme Sochua refusait de payer l’amende, celle-ci a été déduite de son traitement de parlementaire, bien qu’un tel refus de payer soit normalement passible d’une peine de prison;
- en novembre 2010, Mme Sochua avait intégralement réglé l’amende, mais n’avait toujours pas recouvré son immunité parlementaire; différents avis ont été émis sur les moyens de la rétablir dans son immunité jusqu’à ce que l’Assemblée nationale indique dans sa lettre du 12 avril 2011 qu'en vertu de l'article 535 du Code pénal, Mme Sochua devait attendre un an avant de soumettre une demande de réhabilitation à la Cour d'appel et que, si elle ne le faisait pas, son immunité serait automatiquement rétablie après un délai de cinq ans; le chef de la délégation cambodgienne à la 124ème Assemblée a déclaré que la réhabilitation était régie par le Code pénal, y compris dans le cas de parlementaires, et que, pour être réhabilitée, Mme Sochua ne devait pas commettre de nouvelle infraction pendant la période indiquée,
considérant que, d'après la source, Mme Sochua sera contrainte de soumettre une requête à la Cour d'appel pour être réhabilitée et pouvoir se présenter aux élections législatives de 2013; que, toutefois, la Cour d'appel ne serait pas tenue de rendre sa décision avant l'expiration du délai de cinq ans au-delà duquel la réhabilitation est automatique,
considérant qu’en mai 2011, alors qu’ils faisaient du porte-à-porte dans la bourgade de Battambang pour informer les habitants de leurs droits à la gratuité des soins de santé publique et d’éducation, Mme Sochua et les élus locaux qui l’accompagnaient auraient été cernés et menacés par des membres du parti au pouvoir, le Parti du peuple cambodgien (PPC), qui l’ont accusée de monter les villageois contre le gouvernement; notant que l’équipe a porté plainte auprès du gouverneur le lendemain et que Mme Sochua a signalé par écrit la menace au Ministère de l’intérieur; que, toutefois, aucune mesure n'aurait été prise; considérant en outre que, le 5 octobre 2011, un responsable communal aurait accusé Mme Sochua de fomenter des troubles sociaux au motif qu'elle dirigeait un groupe de jeunes gens qui informait les citoyens des modalités d’inscription sur les registres électoraux et aurait porté plainte contre elle; que ce responsable communal a retiré sa plainte et que l'affaire a été abandonnée,
rappelant que les organes et mécanismes des Nations Unies compétents pour les droits de l’homme ont relevé avec inquiétude le manque d’indépendance de la justice au Cambodge, et que, dans son rapport du 16 septembre 2010* au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge a dit que la liberté d’expression était l’un des principaux domaines de préoccupation, de même que les nombreux défis auxquels est confronté le système judiciaire, s’est inquiété de la réduction de l’espace politique laissé à l’opposition et a recommandé que la diffamation et la désinformation soient dépénalisées; considérant que, dans son rapport d'août 2011 (A/HRC/18/46), le Rapporteur spécial a réitéré ses préoccupations à propos de la liberté d'expression au Cambodge et, pour ce qui est du parlement en particulier, a recommandé à celui-ci de revoir le nouveau Code pénal afin de le rendre conforme aux dispositions du droit international des droits de l’homme portant sur les restrictions pouvant être apportées à la liberté d’expression, et de préserver le droit à la liberté d'expression de ses propres membres et protéger leur immunité parlementaire,
- réaffirme les préoccupations qu'il a exprimées dans sa résolution d'avril 2011concernant l’application des dispositions du Code pénal relatives au rétablissement de l’immunité parlementaire, qui a eu pour effet de pénaliser doublement Mme Sochua;
- compte que la Cour d'appel prendra sans retard une décision sur la requête de Mme Sochua dès qu'elle sera soumise, afin de lui permettre de se présenter aux élections de 2013, comme c'est son droit;
- engage une fois de plus l’Assemblée nationale à réviser la législation relative àl'immunité parlementaire en ce qui concerne non seulement son rétablissement, mais aussi sa levée, afin de faire de l'immunité parlementaire un outil efficace de protection contre des procédures qui peuvent être mal fondées et motivées par des considérations politiques;
- réaffirme les graves préoccupations qu'il a déjà exprimées quant à la procédure de diffamation entamée contre Mme Sochua par le Premier ministre, dans laquelle il continue de voir une instrumentalisation du judiciaire à des fins politiques; espère vivement que le Parlement cambodgien examinera de manière approfondie les recommandations du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Cambodge concernant la dépénalisation de la diffamation et leur donnera suite, notamment pour ce qui est de celles qui concernent le parlement lui‑même;
- est préoccupé par le fait qu'une plainte déposée par Mme Sochua auprès du gouverneur à propos des menaces portées contre elle et d'autres personnes par des membres du parti au pouvoir, alors qu’elles informaient les villageois de leurs droits, soit restée sans réponse, de même qu’un rapport adressé au Ministre de l'intérieur; considère que le parlement devrait lui aussi être préoccupé par cette question, car une telle inaction de la part des autorités risque d'inciter à la répétition de tels actes et qu'il devrait donc demander des comptes aux autorités compétentes; souhaiterait recevoir des informations sur les mesures que le parlement pourrait effectivement prendre;
- prie le Secrétaire général de communiquer la présente résolution aux autorités parlementaires et de les inviter à fournir les informations requises;
- prie le Comitéde poursuivre l’examen de ce cas et de lui faire rapport à sa prochaine session, qui se tiendra durant la 126ème Assemblée de l’UIP (mars-avril 2012).
Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 125ème Assemblée de l'UIP et réunions connexes" au format PDF (taille du fichier environ 794 Ko). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement. | |
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