Union interparlementaire | |
Communiqué de presse | |
No.137, Genève/Rome, 13 juin 2002 |
A PROMOUVOIR LE DROIT A L'ALIMENTATION
Le Président de la Chambre des Députés italienne, M. Pierferdinando Casini, est intervenu aujourd'hui devant le Sommet mondial de la FAO au nom de l'Union interparlementaire (UIP) pour transmettre le message de quelque 200 parlementaires de 80 pays, à savoir qu'ils sont fermement résolus à combattre plus efficacement la faim.
"L'Union interparlementaire, que j'ai l'honneur de représenter aujourd'hui, est fermement convaincue que l'engagement pris par les Etats au Sommet mondial de l'alimentation de 1996 et consistant à réduire de manière notable la faim et la pauvreté d'ici 2015, doit impliquer les institutions législatives nationales", a déclaré M. Casini. Ce dernier a expliqué ensuite que les participants à la réunion parlementaire de mardi à Rome, organisée par le Groupe interparlementaire italien et l'UIP, ont exprimé "leur préoccupation de voir que, cinq ans après le Sommet, l'objectif déclaré de réduire de moitié la population touchée par la malnutrition dans le monde semble encore plus éloigné que jamais. Seules quelques nations ont pris des mesures significatives à l'échelle requise pour atteindre cet objectif. Le taux de malnutrition dans le monde demeure élevé, chose inadmissible, tout comme le taux de réduction de ce chiffre", a martelé M. Casini.
"Lors de sa récente session à Marrakech, l'UIP a approuvé un message spécial au Sommet", a ajouté M. Casini, relevant que les parlements membres de l'UIP considèrent qu'il importe tout particulièrement :
Enfin, M. Casini a indiqué que "le paragraphe 10 de la Déclaration du Sommet mondial de l'alimentation : cinq ans après appelle les Etats à élaborer une série de directives pour concrétiser progressivement le droit à une alimentation suffisante pour tous. Nous sommes convaincus que ces directives devraient mettre en exergue le droit à l'alimentation comme norme contraignante et proposer des modalités concrètes de mise en œuvre. Elles devraient également préciser les obligations incombant aux gouvernements aux niveaux national et international, en gardant à l'esprit la responsabilité d'autres parties prenantes et la contribution attendue de leur part, y compris les organisations internationales et - éventuellement - le secteur privé". En conclusion, il a souligné la nécessité pour tous de s'attacher résolument à la réalisation des objectifs ambitieux et impératifs du Sommet mondial de l'alimentation. Les parlements et l'UIP mettront tout en œuvre pour offrir aux laissés-pour-compte de la planète des perspectives d'une vie d'espoir et de dignité.
Au cours de la réunion parlementaire tenue le mardi en présence de 10 Présidents de parlement, le Président Casini a souligné l'impérieuse nécessité d'assurer une plus grande ouverture des marchés aux produits en provenance des pays pauvres. "L'Europe, en particulier, ne saurait se désister sur ce point. Il y a de nombreux pays, notamment du continent africain et d'Amérique également, à économie essentiellement agricole reposant sur une ou deux cultures de rapport. Si le commerce de ces produits se heurte au protectionnisme, aucune possibilité de croissance ne s'offre à ces pays et il n'y a, pour leurs populations, aucun espoir réel de se sortir de la malnutrition et de la pauvreté", a relevé avec insistance le Président Casini. Il a souligné, par ailleurs, la nécessité d'ouvrir ces marchés avec cette mise en garde que "ce faisant, nous ne devons pas commettre l'erreur de se fier totalement aux règles du marché. Je ne crois pas à la valeur miracle du marché". Le Président du Sénat italien, M. Marcello Pera, en ouvrant la réunion parlementaire de mardi, a relevé deux facteurs importants dans la lutte contre la faim. "Le premier facteur est la bonne gouvernance, à savoir la consolidation de l'état de droit et la transparence de la gestion publique, la lutte contre la corruption et une plus grande efficacité de l'administration publique. L'autre facteur est la prévention et le règlement des conflits. Ces deux facteurs représentent une condition essentielle du développement". Il a ajouté que "la communauté internationale, la communauté des pays développés, a le devoir d'assumer ses responsabilités et de rechercher des solutions aux problèmes du développement. Cela exige également des politiques novatrices et courageuses de la part des pays concernés, afin que le cycle de la violence et de la négation des droits de l'homme cède la place au cycle de la croissance". Le Directeur général de la FAO, M. Jacques Diouf s'est également adressé aux parlementaires lors de leur réunion, tirant de nouveau la sonnette d'alarme en ces termes : "Aujourd'hui, environ 815 millions de personnes dans le monde sont sous-alimentées, dont 777 millions dans les pays en développement et 27 millions dans les pays en transition. Les efforts concertés de la communauté internationale, des gouvernements et des organisations non gouvernementales ont contribué, malgré l'augmentation démographique, à abaisser de 39 millions le nombre de personnes souffrant de la faim dans les pays en développement. Cependant, cette réduction moyenne annuelle de six millions est insuffisante pour atteindre l'objectif fixé pour 2015. Il faudrait pour cela une réduction de 22 millions par an". Il a lancé ensuite un appel aux parlementaires du monde : "Vos propositions de loi et vos votes de budget, vos questions écrites et orales, et votre contrôle de l'action gouvernementale sont des maillons indispensables de la chaîne internationale de solidarité. Votre action soutenue et continue peut contribuer à la victoire contre l'indifférence coupable devant la faim et ses conséquences dévastatrices dans le monde". Dans son message aux parlements du monde, la Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, a souligné que "dans le cadre des efforts déployés pour assurer une mondialisation positive, les parlements ont un rôle crucial à jouer pour déterminer les mesures à prendre aux niveaux local, national, régional et international, et intégrer les droits de l'homme dans le processus de prise de décision des gouvernements et des entités privées placées sous leur juridiction. C'est une tâche exaltante, qui exige des efforts à tous les niveaux : international, régional et national". Commentant les chiffres de la FAO, Mme Robinson a indiqué que "tous attestent de l'effarante ampleur de la famine en Afrique australe, qui touche quelque 13 millions de personnes. Il n'y a eu ensuite que des paroles, encore et encore. Ce que je veux faire comprendre, c'est que pour changer et accélérer les choses, il nous faut passer aux actes et faire preuve de plus d'efficacité; nous avons besoin d'un cadre à cet effet et les droits de l'homme en font partie intégrante". Le Secrétaire général de l'Union interparlementaire, M. Anders Johnsson a déclaré que "l'Union interparlementaire est fermement convaincue que les engagements majeurs en matière économique et politique pris par les Etats doivent nécessairement impliquer les institutions législatives nationales. Le parlement contrôle l'action de l'exécutif et c'est encore lui qui adopte les lois et approuve le budget national. Les parlementaires, en tant que représentants élus, ont un rôle particulier à jouer, s'agissant notamment d'une question aussi importante que le droit à l'alimentation"". Il a relevé ensuite que "remplir les engagements du Sommet mondial de l'alimentation s'avère une tâche difficile, probablement plus difficile que ne l'imaginaient certains participants au Sommet. Il importe encore plus, dès lors, que la communauté internationale fasse un bilan critique des réalisations et des échecs enregistrés au cours des cinq dernières années, analyse les problèmes et mette au point de nouvelles stratégies, y compris en matière de législation nationale. Les conclusions des experts de la FAO sont loin d'être réconfortantes à cet égard". Pour le Président du Groupe interparlementaire italien, M. Antonio Martino, qui est également le Ministre de la Défense de l'Italie, "la sécurité alimentaire - à savoir que tous les citoyens du monde aient de quoi se nourrir pour survivre - est à la fois un problème politique et un impératif moral". Les politiques de promotion agricole et de distribution alimentaire se sont améliorées, bien que des millions de personnes demeurent des laissés pour compte et n'aient aucun espoir réel de survivre, a martelé M. Martino. Selon le Ministre de la Défense, "la coopération internationale est une condition sine qua non à remplir pour atteindre les objectifs auxquels on aspire tant, pour s'ouvrir aux autres et à d'autres pays et pour faciliter l'accès à l'alimentation". Il a rappelé enfin que "les conflits et problèmes politiques sont souvent à l'origine des crises alimentaires. La guerre et les hostilités sont un prélude à la famine, comme nous l'a enseigné l'histoire de l'Europe, l'Europe où la famine et les hostilités sont allées de pair à travers les siècles". Deux experts ont également participé à la réunion parlementaire organisée par le Groupe interparlementaire italien et l'UIP. Le Rapporteur de l'ONU pour le droit à l'alimentation, M. Jean Ziegler, s'est dit optimiste : "C'est de la part des parlements que vont venir le soutien, l'assistance et la solidarité dont nous avons essentiellement besoin pour sauvegarder ce nouveau droit humain". Il a fait ensuite état du problème de la législation nationale. "Pour faire valoir le droit à l'alimentation devant la justice, il nous faut - comme l'a dit Mme Robinson tout à l'heure - une loi-cadre. Mais c'est évidemment beaucoup plus compliqué que ça. Il ne suffit pas de faire une loi consacrant le droit à l'alimentation. Quand on parle de loi-cadre, il s'agit d'abord de faire un inventaire de toutes les lois existantes dans un pays donné, pour avoir une vue d'ensemble de celles à caractère négatif pouvant porter atteinte au droit à la terre et à l'eau, en violation du droit à l'alimentation, et on y remédierait. Ensuite, il y a un certain nombre de mesures positives dont nous avons constaté l'effet immédiat, même dans les pays plus démunis". M. Jeffrey Sachs, Directeur du centre de développement international de l'Université de Harvard, a souligné l'interdépendance de bon nombre de défis. "On ne peut pas traiter du problème de la faim sans s'occuper des problèmes de santé. On ne peut non plus s'attaquer aux problèmes de la faim et de la santé sans s'occuper des problèmes de l'éducation. On ne peut, par ailleurs, s'attaquer aux problèmes de la santé, de la faim et de l'éducation sans se préoccuper de la détérioration de l'environnement et des problèmes climatiques connexes, comme la sécheresse, qui touche durement à l'heure actuelle une grande partie de l'Afrique australe. Il nous faut donc une solution globale à ces défis. Que reste-t-il à faire alors ? A mon avis, la tâche qui reste à faire est la plus facile, pour ainsi dire : il s'agit de l'aide qu'attendent les pays pauvres des pays riches dans cette lutte.
|