Union interparlementaire | |
Communiqué de presse | |
No.202, Genève/New York, 3 mars 2005 |
Sept pays en développement, au premier rang desquels on trouve le Rwanda, sont classés parmi les 17 pays comptant plus de 30% de femmes au Parlement selon la nouvelle carte mondiale des femmes en politique (2005) publiée par l'Union interparlementaire (UIP) et la Division de la promotion de la femme de l'ONU.
Dix ans après la Quatrième conférence mondiale sur les femmes (Beijing), les progrès ont été constants mais lents. Entre 2000 et 2005, la proportion des femmes parlementaires dans le monde est passée de 13,4 à 15, 7%, franchissant pour la première fois le seuil des 15%. Changement majeur depuis 2000 : c'est aujourd'hui le Rwanda qui occupe la première place avec 48,8% de femmes à la Chambre basse du Parlement (et 34,6% à la Chambre haute). Présentée le 3 mars au Siège de l'ONU (New York), à l'occasion de la 49ème session de la Commission de la condition de la femme, cette carte est le fruit d'une enquête mondiale réalisée par l'UIP pour recueillir des données sur le nombre de femmes tant dans la branche législative que dans la branche exécutive au 1er janvier 2005. C'est la mise à jour de la carte déjà publiée en 2000.
Le cas du Rwanda reflète les mesures prises dans un certain nombre de pays en situation d'après conflit pour assurer la participation des femmes aux instances de décision. La Constitution du Rwanda fixe un seuil de 30% pour les femmes au Parlement et au Gouvernement. D'autres pays eux aussi en situation d'après conflit (Burundi, Afghanistan et Iraq) lui ont emboîté le pas, en concevant des mécanismes qui permettent à un nombre minimum de femmes de siéger dans les instances de décision. Le Parlement suédois, où les résultats se sont eux aussi améliorés depuis 2000, vient désormais au deuxième rang, suivi de près par les autres pays nordiques. La paire Rwanda-Suède illustre un autre élément qui ressort de la carte mise à jour : les pays en développement - Rwanda, Cuba, Costa Rica, Mozambique, Argentine, Afrique du Sud et Guyana - ont presque autant de chances que les pays développés de figurer en bonne place.
Selon le Président de l'UIP, le sénateur chilien Sergio Páez "ces bons résultats sont un signe encourageant qui montre que les efforts faits au niveau des pays et au niveau international pour renforcer la présence des femmes en politique donnent des résultats, lentement mais sûrement". Néanmoins, le Président de l'UIP ajoute que "cette progression ne permet pas, tant s'en faut, d'atteindre la parité dans les parlements à travers le monde. L'UIP, à travers sa réunion des femmes parlementaires et toute une série de projets d'assistance technique, poursuivra ses efforts pour faire de cet objectif une réalité".
Les chiffres montrent que le nombre total des femmes parlementaires a progressé de 17% en cinq ans. Même si cela peut paraître encourageant, le Secrétaire général de l'UIP, Anders B. Johnsson, fait observer que le chemin restant à parcourir promet d'être long et difficile "si l'on s'en tient à ce chiffre de 17% à moyen terme, il nous faudra attendre jusqu'en 2025 pour que la représentation totale des femmes au Parlement franchisse le seuil critique de 30% et jusqu'en 2040 pour atteindre la parité", a-t-il indiqué, ajoutant "Je ne suis absolument pas convaincu que les femmes ou les hommes sauront être aussi patients".
La carte 2005 présente en outre un classement par région des chiffres sur les femmes parlementaires. Le classement régional d'ensemble reste sensiblement identique à celui de 2000, les pays nordiques venant en tête suivis par les Amériques, le reste du continent européen, l'Asie, l'Afrique sub-saharienne, la région du Pacifique et les pays arabes. Ce classement reflète clairement les différences existant entre les pays en ce qui concerne l'adoption et la mise en oeuvre au fil des années de politiques en faveur de la parité, allant de de mesures volontaristes à des campagnes de sensibilisation plus vigoureuses et à des initiatives de nature à promouvoir les femmes en politique. Sur les 58 pays ayant tenu des élections en 2004 à la Chambre basse du Parlement, 49 ont enregistré une augmentation du pourcentage des femmes. La plus forte augmentation a été observée au Bélarus. La Tunisie, le Niger, l'Ouzbékistan et la République de Corée viennent immédiatement après. Ces quatre pays ont appliqué des mesures volontaristes soit directement au Parlement, soit dans les partis. Bien que le classement régional pour 2005 soit similaire à celui de 2000, on observe des évolutions relatives. Le plus grand changement est le doublement du pourcentage des femmes parlementaires dans le monde arabe (de 3,5 à 6,5%). Même si cette amélioration est due pour l'essentiel à quelques pays seulement (le Maroc a vu le nombre de ses femmes parlementaires passer de quatre à 38, la Jordanie de trois à 13 et la Tunisie de 21 à 43), cette tendance à la hausse devrait se confirmer grâce aux résultats des élections en Iraq, et aux réformes politiques engagées dans un certain nombre de pays. Toutefois, les résultats pour la région arabe se situent toujours très en deçà de la moyenne mondiale et devront être observés de près. Autre progression régionale très nette : l'Afrique sub-saharienne.
Pour présenter l'image la plus complète possible du rôle que les femmes jouent en politique aujourd'hui, la carte 2005 contient en outre des données sur le nombre des femmes aux postes ministériels. La Suède, avec 52,4% de femmes ministres, se situe au premier rang avec l'Espagne (50%). Cela fait de la Suède le seul pays au monde à respecter le principe de la parité en politique. Il n'est pas surprenant qu'il y ait des recoupements très nets entre les deux classements (ministres et parlementaires) que donne la carte. Quarante-six pays ont franchi le seuil des 20% de femmes au Parlement contre 44 pays pour les femmes aux portefeuilles ministériels. Le Parlement n'est pas plus ouvert aux femmes que le pouvoir exécutif, et inversement - la clé se situe plutôt dans l'évolution de la culture politique. Ce qui est décevant à propos des chiffres sur les femmes ministres, c'est que ces dernières continuent, pour l'essentiel, à se voir confier des portefeuilles "sociaux" (enfants/questions féminines, affaires sociales, éducation, santé). Les femmes ont beaucoup moins de chances que les hommes d'occuper un portefeuille économique ou d'être ministre de la défense ou bien encore d'être ministre des affaires étrangères de leur pays.
Les progrès les moins sensibles que montre la carte 2005 par rapport à 2000 concernent les postes de chefs d'Etat ou de gouvernement et la présidence des parlements. Les femmes continuent à se heurter à des obstacles de taille pour accéder au niveau le plus élevé de l'Etat. Le nombre des femmes chefs d'Etat ou chefs de gouvernement a en fait diminué ces cinq dernières années (passant de 4,7% en 2000 à 4,2% aujourd'hui). Et la liste des pays où une femme est soit présidente, soit première ministre est très semblable à la liste établie il y a cinq ans, hormis le cas des Philippines et du Mozambique. Au sein des parlements, il est toujours aussi difficile, proportionnellement, pour les femmes de devenir présidentes. Ici aussi, on constate une légère dégradation depuis 2000 puisque l'on est passé de 10,7 à 7,5%. On notera, toutefois, que les femmes dans les pays en développement et les pays en transition ont en fait plus de chances de devenir présidentes du Parlement que dans les pays développés. Commentant ce résultat, le Secrétaire général de l'UIP a souligné la concentration de femmes présidentes de Parlement dans la région des Caraïbes. "Nous venons de recevoir des informations, malheureusement après l'impression de la carte, confirmant que les deux Chambres d'Antigua-et-Barbuda sont présidées par des femmes. Cela porte le total, pour janvier 2005, à 21 femmes présidentes d'assemblée (soit 8,3%). Un tiers de ces femmes présidentes vient des pays de la région des Caraïbes. Le très faible pourcentage de femmes au plus haut niveau de l'Etat est décevant. Il confirme que de nombreuses nations continuent à nourrir envers les femmes des préjugés culturels et à leur opposer des obstacles durables". Heureusement, les progrès se confirment et certaines évolutions favorables peuvent déjà être soulignées : ainsi, l'Ukraine est aujourd'hui dotée d'une première ministre. Depuis février 2005, l'Uruguay a une femme à la tête du Parlement, une première dans son histoire. Le futur gouvernement, qui entrera en fonction en mars, devrait compter trois femmes ministres alors que le précédent gouvernement n'en comptait aucune.
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