D'après la dernière analyse réalisée par l'Union interparlementaire (UIP), les femmes occupent désormais un nombre record de sièges parlementaires suite aux élections et renouvellements législatifs qui se sont tenus dans 54 pays en 2008. Elles détiennent en moyenne 18,3 % des sièges parlementaires à l'échelle mondiale, soit une augmentation de 60 % par rapport à 1995, où elles ne comptaient que pour 11,3 % des parlementaires.
Pour la première fois, 15 % des chambres parlementaires (soit 39 sur 264), dans 32 pays, ont franchi le seuil des 30 % de femmes. Quarante pourcent de ces chambres se trouvent en Europe, un tiers en Afrique et 23 % en Amérique latine. A l'opposé, un quart des assemblées parlementaires comptent moins de 10 % de femmes.
Si la tendance générale est à une augmentation de la représentation des femmes dans les parlements, en revanche, la progression n'est pas la même dans tous les pays. La proportion de femmes dans les parlements fluctue régulièrement d'une année sur l'autre. Ainsi, au cours des cinq dernières années, les femmes ont enregistré une progression dans 60 % des renouvellements législatifs et marqué le pas, voire accusé un recul dans les 40 % restants.
Pour le Président de l'UIP, M. Theo-Ben Gurirab, « il est dommage que tous les parlements de la planète n'affichent pas une progression. Malgré des progressions remarquables enregistrées en 2008, en particulier en Afrique où une majorité de femmes ont été élues à la chambre basse du Rwanda, il reste encore beaucoup à faire dans les pays où les femmes sont largement sous-représentées dans les organes de décision ». En effet, dans quatre cas, les élections législatives de 2008 n'ont permis à aucune femme d'obtenir un siège, ce qui porte à neuf à l'échelle mondiale le nombre de chambres parlementaires ne comptant aucune femme.
Quinze pour cent des chambres franchissent la barre des 30 % de femmes
Le nombre de parlements qui ont franchi le seuil des 30 % de femmes fixé par les Nations Unies a considérablement augmenté au cours de la dernière décennie. En 1998, seules six chambres uniques ou chambres basses avaient atteint cet objectif. Toutes ces chambres se trouvaient en Europe. Aujourd'hui ce chiffre a été multiplié par quatre, puisque 24 chambres basses ou uniques comptent désormais plus de 30 % de femmes. Ces résultats ne sont plus l'apanage des seuls parlements européens puisque désormais des pays au sortir de conflits et des pays en développement d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine franchissent ce cap. Ainsi, le Parlement rwandais est entré dans l'histoire avec l'élection d'une majorité de 56,3 % de femmes à la chambre basse. En Angola, les femmes ont obtenu 37 % des sièges lors des premières élections post-conflit. Enfin, 15 chambres hautes ont aussi atteint l'objectif, ce qui porte le nombre total de chambres parlementaires comptant plus de 30 % de femmes à 39 sur 264 (soit 15 %).
A l'opposé, un quart des chambres parlementaires (51 chambres uniques ou chambres basses et 14 chambres hautes, sur un total de 264 chambres) comptent moins de 10 % de femmes. Neuf chambres ne comptent même aucune femme (principalement dans les Etats insulaires du Pacifique et dans les Etats arabes du Golfe). A cet égard, le constat du Secrétaire général de l'UIP, M. Anders B. Johnsson, est le suivant : « avec autant de parlements comptant si peu de femmes, l'heure n'est pas à l'autosatisfaction. Nous devons persévérer dans notre ambition de parvenir à des institutions politiques paritaires ».
A l'échelle régionale
Un parlementaire sur cinq ayant obtenu un mandat en 2008 était une femme, record annuel en matière de renouvellements. Sur les 2 656 femmes qui ont obtenu un mandat parlementaire, 1 707 femmes ont été élues au suffrage direct, 878 au suffrage indirect et 71 ont été nommées. Si les femmes ont obtenu un nombre record de sièges lors des renouvellements de 2008, leur progression n'a pas été la même partout.
L'ensemble de l'Amérique latine a enregistré des progressions remarquables. Les femmes y ont obtenu 26,5 % des sièges en moyenne, dans les 12 chambres renouvelées. Au total, les femmes détiennent 21,5 % des sièges parlementaires de la région et se placent donc juste derrière les pays nordiques (qui affichent une moyenne régionale de 41 % de femmes). Les progrès réalisés au cours de l'année sont dus aux bons résultats enregistrés à Cuba (43,2 %) et dans les chambres hautes du Belize (38,5 %) et de la Grenade (30,8 %). Aux Etats-Unis, les deux chambres du Congrès ont tenu des élections lors desquelles les femmes ont enregistré leurs meilleurs scores avec 17 % dans chaque chambre.
La progression constante observée en Europe ne s'est absolument pas démentie dans les 19 chambres qui ont été renouvelées, où les femmes ont obtenu plus de 21 % des sièges à pourvoir. Outre le Bélarus, l'Espagne, l'Ex-République yougoslave de Macédoine qui ont élu plus de 30 % de femmes, des progrès ont également été enregistrés à Monaco, où la représentation des femmes est passée à 25 %, en France, où elle est passée à 21,9 % à la chambre haute, et en Serbie, où les femmes représentent désormais 21,6 % des parlementaires. Inversement, la représentation des femmes a diminué en Roumanie (11,4 %), à Malte (8,7 %) et en Géorgie (6,0 %). Le changement de mode de scrutin en Roumanie, d'un scrutin proportionnel à un scrutin mixte où la plupart des parlementaires sont élus à la majorité, a contribué à une diminution du nombre de femmes élues.
L'Afrique a continué à faire de grands pas en avant en 2008. Le Rwanda a renforcé son avance en élisant plus de 56 % de femmes à sa chambre basse, améliorant ainsi encore le record qu'il avait établi en 2003, avec près de 49 % de femmes. L'Angola a pour sa part élu plus de 37 % de femmes lors des premières élections tenues depuis 1992, ce qui signale le retour à un processus démocratique. Il rejoint ainsi plusieurs pays d'Afrique australe, à savoir l'Afrique du Sud, le Mozambique, la Namibie et la Tanzanie, qui comptent plus de 25 % de femmes au Parlement. D'après le Président de l'UIP, « la région de l'Afrique australe a fait des progrès considérables en ce qui concerne l'accès des femmes à la vie politique durant les dix dernières années et ces dernières ont été d'importants moteurs de changement ».
L'Asie a enregistré le taux de progression le plus lent des 15 dernières années en matière d'accès des femmes au Parlement, pour atteindre une moyenne régionale de 17,8 %. De nettes améliorations ont toutefois été observées en 2008. En tout, 14 chambres ont été renouvelées et les femmes y ont obtenu 19 % des sièges à pourvoir. La plus forte amélioration est celle du Népal, où les femmes ont obtenu 32,8 % des sièges grâce à l'instauration de quotas qui garantissaient un tiers des sièges parlementaires aux femmes. De son côté, le Bhoutan a élu pour la première fois de son histoire les 47 membres de l'Assemblée nationale, au scrutin majoritaire. Les femmes y ont remporté quatre sièges. Enfin, c'est en République islamique d'Iran, que les femmes ont fait leur moins bon score, avec à peine 2,8 % des sièges.
Seuls quatre renouvellements ont eu lieu dans les Etats arabes en 2008. Les femmes y ont obtenu plus de 9 % des sièges en moyenne. A Djibouti, elles ont obtenu neuf sièges sur les 56 à pourvoir, soit deux de mieux par rapport à 2003, date à laquelle elles ont fait leur entrée au Parlement. Des élections anticipées ont eu lieu au Koweït et, comme lors des dernières élections, tenues moins de deux ans auparavant, aucune des candidates n'a été élue. Toutefois, deux femmes ont été nommées au gouvernement et ont donc obtenu des sièges parlementaires (les ministres siégeant également au Parlement). Il n'y avait pas de femme parmi les 35 membres nommés au Conseil consultatif du Qatar. Le Qatar est l'un des trois pays à n'avoir jamais eu de femme parlementaire, les deux autres étant l'Arabie saoudite et les Etats fédérés de Micronésie.
C'est dans les Etats insulaires du Pacifique que les femmes ont enregistré leurs moins bons résultats, avec moins de 4 % en moyenne. Les Parlements de Nauru, des Palaos, des Tonga et de Vanuatu ont été renouvelés et seuls cinq des 131 sièges à pourvoir sont échus à des femmes. Deux femmes ont été élues à la chambre haute des Palaos. Cela faisait dix ans qu'il n'y avait plus de femme au Parlement. A Vanuatu, deux femmes ont été reconduites. Lors des élections à Nauru, à la chambre basse des Palaos et aux Tonga, aucune femme n'a été élue. Toutefois, aux Tonga, une femme a été nommée au gouvernement et est donc automatiquement devenue membre du Parlement.
Ce qui se cache derrière les chiffres
Les systèmes électoraux et les modes de fonctionnement des partis ont une grande incidence sur le taux d'élection des femmes. Davantage de femmes sont en effet élues dans les systèmes de représentation proportionnelle (6 % de plus en moyenne) que dans les systèmes fondés sur le scrutin majoritaire. L'utilisation de mesures spéciales ou de quotas entre aussi en ligne de compte. Ainsi, en 2008, les pays qui ont recouru à des mesures spéciales ont élu en moyenne 24 % de femmes au Parlement, contre 18 % dans les autres pays. Ce constat se vérifie lorsque l'on se penche sur les 39 chambres qui ont dépassé les 30 % de femmes : 27 d'entre elles appliquent des quotas et six autres sont des chambres nommées.
Femmes présidentes de parlement
Fin 2008, 31 des 264 assemblées parlementaires que compte la planète étaient présidées par des femmes (soit 11,7 %). La proportion de femmes occupant la fonction suprême du Parlement est restée pratiquement inchangée depuis une dizaine d'années. Les présidentes de parlement se trouvent majoritairement en Europe, où elles sont au nombre de 13. Elles sont dix sur le continent américain, six en Afrique et le Pakistan et Israël ont eux aussi une femme pour présidente du Parlement. En 2008, pour la première fois de leur histoire, l'Ouzbékistan, le Rwanda et la Serbie ont vu leur Parlement se doter d'une femme pour présidente.
Les facteurs influant sur la représentation des femmes au Parlement
La publication de l'UIP intitulée Egalité en politique - Enquête auprès de femmes et d'hommes dans les parlements met en évidence les facteurs qui influent sur l'entrée des uns et des autres en politique. Les préjugés et les perceptions culturelles concernant le rôle des femmes, ainsi que le manque de moyens financiers, demeurent parmi les principaux obstacles à l'entrée des femmes en politique. Pourtant, lorsqu'elles parviennent à faire de la politique, les femmes apportent de nouveaux points de vue, de nouvelles compétences et de nouvelles perspectives. Si les femmes parlementaires ne sont pas un groupe homogène, elles partagent des expériences communes qui influent sur leur manière de définir les priorités politiques. Dans les parlements, les plus fervents défenseurs des femmes sont les femmes. C'est grâce à elles si les préoccupations des femmes et les questions les concernant figurent désormais dans le programme de travail des parlements. Malheureusement, l'égalité des sexes n'est qu' « occasionnellement » voire « rarement » prise en compte dans tous les aspects de la vie parlementaire. Si certains parlements et partis politiques se sont réformés pour mieux prendre en compte les besoins des hommes et des femmes, l'égalité des sexes au Parlement est encore un idéal et non une réalité.
- L'analyse de l'UIP intitulée Les femmes au Parlement en 2008 : Regard sur l'année écoulée peut être téléchargée à l'adresse suivante : http://www.ipu.org/french/perdcls.htm#wmn-year
- Les statistiques de l'UIP sur la représentation des femmes dans les parlements nationaux sont accessibles à : http://www.ipu.org/wmn-f/world.htm
- La publication complète intitulée Egalité en politique peut être téléchargée à : http://www.ipu.org/french/surveys.htm#equality08