Le nombre des femmes présentes dans l’exécutif et au parlement stagne à l’échelle mondiale. Selon les données contenues dans la Carte 2017 des Femmes en politique, présentée aujourd’hui par l’Union interparlementaire (UIP) et ONU Femmes, les progrès enregistrés depuis 2015 sont négligeables. La Carte, qui classe les pays du monde selon la présence des femmes dans l’exécutif et au parlement au 1er janvier 2017, montre que, pour ces deux pouvoirs, les progrès vers l’égalité des sexes sont lents, à l’échelle tant régionale que nationale. Elle a été présentée lors d’une conférence de presse commune de l’UIP et d’ONU Femmes, tenue à New York dans le cadre de la session de la Commission de la condition de la femme.
L’émancipation politique des femmes et leur accès dans des conditions d’égalité aux postes de commandement à tous les niveaux sont indispensables à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et à l’avènement d’un monde plus juste. La représentation des femmes n’ayant que peu progressé, la marche vers l’égalité des sexes et le succès des ODD sont compromis.
L’édition 2017 de la Carte montre une légère baisse du nombre de pays ayant une femme à la tête de l’Etat et/ou du gouvernement par rapport à 2015 (17 au lieu de 19) mais une hausse sensible de ce même nombre (qui passe de 8 à 17) depuis la première édition de la Carte des Femmes UIP-ONU Femmes en 2005 .
La progression du nombre des femmes parlementaires dans le monde demeure très lente. Les données de l’UIP montrent que le pourcentage moyen des femmes dans les parlements nationaux n’a que légèrement augmenté, de 22,6 pour cent en 2015 à 23,3 pour cent en 2016. En revanche, le nombre des femmes présidentes de parlement s’est sensiblement accru puisqu’il atteint maintenant un record absolu, 19,1 pour cent, ce qui est encore bien loin de la parité. Pour en savoir plus sur le sujet, voir les statistiques de l’UIP sur les femmes au parlement et le rapport Les femmes au parlement en 2016.
"Ces évolutions montrent que les progrès vers l’égalité des sexes restent lents, quels que soient la structure du pouvoir et le type de prise de décision. Le pouvoir est toujours entre les mains des hommes et, malgré certains signes d’avancées – le nombre record de femmes présidentes de parlement dans le monde, par exemple : elles sont 53 sur 273 – il reste encore beaucoup à faire pour que les femmes jouissent des mêmes chances que les hommes", a déclaré Martin Chungong, le Secrétaire général de l’UIP. "Il n’est pas de démocratie vraiment performante et responsable sans une représentation égale des hommes et des femmes au pouvoir."
Le nombre des femmes ministres est resté pratiquement inchangé : leur total est de 732 (contre 730 en 2015) ; la proportion des femmes ministres se situe maintenant à 18,3 pour cent.
Les cinq pays qui comptent la plus forte proportion de femmes ministres sont en Europe et aux Amériques. En Bulgarie, en France, au Nicaragua, en Suède et au Canada, plus de la moitié des ministres sont des femmes. Ces résultats peuvent être attribués en grande partie à une volonté politique clairement exprimée au plus haut niveau – les dirigeants tant français que canadiens se sont engagés pour la parité au gouvernement – et à une culture politique sincèrement sensible au genre. La Suède est le premier pays au monde à avoir un gouvernement féministe autoproclamé, et la Bulgarie a vu augmenter globalement la participation et la présence des femmes dans les instances décisionnaires dans toutes les sphères du pouvoir, public et privé, à l’échelle tant nationale qu’internationale.
Au contraire, la Finlande et le Cabo Verde – qui comptaient en 2015 une forte proportion de femmes ministres et occupaient respectivement la première et la deuxième place – ont sensiblement reculé dans le classement. En Finlande, la proportion des femmes ministres a considérablement baissé en 2017, passant de 62,5 à 38,5 pour cent. Au Cabo Verde, un très bon élève en général, la proportion est descendue de 52,9 à 25 pour cent (pendant que la part des femmes ministres se réduisait de 52,8 pour cent).
"Ces données racontent en termes limpides l’histoire des femmes qui continuent à ne pas pouvoir faire entendre leur voix", a déclaré la directrice exécutive d’ONU Femmes, Phumzile Mlambo-Ngcuka. "Nous voyons qu’avec le temps la représentation générale des femmes en politique évolue dans le bon sens, bien que trop lentement sans doute. En même temps, la stagnation générale et certains revers particuliers doivent être pour nous des sonnettes d’alarme qui nous avertissent d’une certaine érosion de l’égalité et nous fassent réagir rapidement. Pour protéger les droits des femmes et conquérir une véritable égalité pour les femmes aux commandes, il faut une action commune des parlements, des gouvernements, de la société civile et des organisations internationales. Il faut notamment abroger ou amender les lois discriminatoires encore en vigueur et soutenir les femmes pour qu’elles soient représentées partout, y compris au niveau le plus élevé du gouvernement."
Aperçu par région : tendances pour les femmes ministres
Suivant une tendance amorcée en 2015, l’Afrique a vu régulièrement baisser le nombre de ses femmes ministres. Les femmes détenaient 19,7 pour cent des postes de ministre en Afrique en 2017, après avoir pour la première fois dépassé ce pourcentage en 2012 après sept années de progression rapide. Le Congo et la Zambie se démarquent du reste de la région, avec quatre et six femmes ministres de plus et des taux de représentation féminine de 22,9 pour cent et de 33,3 pour cent, respectivement.
La représentation des femmes aux Amériques a sensiblement progressé en 2017 puisqu’elle atteint 25 pour cent (contre 22,4 % en 2015) et bat un nouveau record. Pourtant, le nombre des femmes chefs d’Etat ou de gouvernement a fortement baissé lorsque les présidentes du Brésil et d’Argentine ont cessé d’exercer leurs fonctions. Le Canada et le Nicaragua sont allés au-delà de la parité tandis que la Trinité-et-Tobago et l’Uruguay se sont approchés des 30 pour cent ou les ont dépassés. Au Brésil, par contre, la tendance à la baisse s’est poursuivie avec un taux de représentation qui, de 25,6 pour cent en 2014, est descendu à 15,4 pour cent en 2015 et finalement à 4 pour cent en 2017.
En Asie, les femmes occupaient 11 pour cent des postes ministériels (contre 10,6 % en 2015). C’est en Indonésie que le pourcentage des femmes au gouvernement a été le plus élevé (25,7 %), mais il s’est brutalement replié au Viet Nam et au Népal où il est descendu en dessous de 5 pour cent.
Les progrès ont été mineurs dans les Etats arabes, où la proportion des femmes à l’exécutif a atteint 9,7 pour cent (contre 9,5 % en 2015). La proportion des femmes parlementaires a augmenté sensiblement en Tunisie, où elle est passée de 10,5 pour cent en 2015 à 23,1 pour cent en 2017, après que deux femmes de plus eurent rejoint le gouvernement. La présence des femmes au gouvernement s’est aussi renforcée dans les Emirats arabes unis (26,7 %). Ce sont les deux seuls pays de la région où elle dépasse les 20 pour cent.
En Europe, le pourcentage moyen s’est situé à 22,5 pour cent (légèrement en hausse par rapport à 2015 où il s’établissait à 21,6 %). Il est à noter qu’alors que les pays nordiques étaient traditionnellement en tête pour ce qui est de la présence des femmes en politique, il ressort des statistiques de 2017 que cette région est celle qui a connu les plus durs revers avec une baisse globale de 6,2 pour cent du nombre de femmes ministres par rapport à 2015, bien que, dans l’ensemble de la région, l’Exécutif soit encore composé de femmes à 43,5 pour cent. La Bulgarie, où la représentation des femmes est passée de 17,6 pour cent en 2010 à 52,9 pour cent, a gravi rapidement les échelons et se taille cette année la première place alors qu’elle était classée 45ème. Le Royaume-Uni et la Roumanie ont gagné le plus grand nombre de femmes ministres en chiffres absolus (trois), tandis que l’Estonie, le Bélarus et l’Italie en ont perdu le plus (deux).
Après une progression régulière de la représentation des femmes depuis 2012, on constate une tendance à la stagnation dans la région du Pacifique (avec un taux de 13 pour cent comme en 2015). Comme la région ne compte que peu de pays (14 seulement), de légers changements de chiffres ont d’importantes répercussions sur le pourcentage des postes détenus par des femmes.
Portefeuilles des questions "annexes"
La Carte des Femmes de l’UIP et d’ONU Femmes, qui bénéficie du soutien des Affaires mondiales Canada, le Ministère canadien du développement international et de l’assistance humanitaire, montre aussi que les femmes continuent à détenir la part du lion des portefeuilles censément "annexes". On observe cependant des signes avant-coureurs de changements : pour la deuxième fois depuis 2005, le portefeuille des affaires familiales/des enfants/jeunes/personnes âgées/handicapées n’est pas parmi les deux ministères le plus souvent confiés à des femmes. Pour la première fois, le Ministère de l’environnement/des ressources naturelles/de l’énergie est celui qui est le plus souvent dirigé par une femme (8,7 %), suivi du Ministère des affaires sociales (8,2 %).
Les statistiques relatives aux femmes ministres révèlent que 30 pour cent des ministres de l’environnement sont des femmes (47 sur 161), soit une augmentation de 10 pour cent par rapport à 2015. Les recherches de l’UIP indiquent que la montée en puissance de l’environnement est probablement due à l’apparition récente de nouveaux ministères comme ceux des changements climatiques et du développement durable qui sont le plus souvent dirigés par des femmes. On notera en particulier que le nombre des femmes chargées des affaires féminines a diminué de 10 pour cent (elles sont 64 sur un total de 77 ministères, ce qui signifie que le nombre des hommes à la tête de ce ministère est en hausse).
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