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PLACE DU PETIT-SACONNEX
1211 GENEVE 19, SUISSE
 

TURQUIE
CAS N° TK/39 - Leyla Zana
CAS N° TK/40 - Sedat Yurtdas
CAS N° TK/41 - Hatip Dicle
CAS N° TK/42 - Zübeyir Aydar
CAS N° TK/43 - Mahmut Alinak
CAS N° TK/44 - Ahmet Türk
CAS N° TK/48 - Sirri Sakik
CAS N° TK/51 - Orhan Dogan
CAS N° TK/52 - Selim Sadak
CAS N° TK/53 - Nizamettin Toguç
CAS N° TK/55 - Mehmet Sinçar
CAS N° TK/57 - Mahmut Kilinç
CAS N° TK/58 - Naif Günes
CAS N° TK/59 - Ali Yigit
CAS N° TK/62 - Remzi Kartal

Résolution adoptée sans vote par le Conseil interparlementaire
à sa 166ème session (Amman, 6 mai 2000)


Le Conseil interparlementaire,

se référant à l'exposé du cas des anciens membres susmentionnés de la Grande Assemblée nationale de Turquie (GANT), qui figure dans le rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires (CL/166/16c)-R.1), et à la résolution qu'il a adoptée à sa 165ème session (octobre 1999),

tenant compte des informations et observations communiquées par des membres de la délégation turque à la 103ème Conférence de l'Union interparlementaire (avril-mai 2000),

rappelant les éléments ci-après, versés au dossier :

  • Le 2 mars 1994, la Grande Assemblée nationale de Turquie (GANT) a levé l'immunité parlementaire de Mme Zana, MM. Dicle, Türk, Sakik, Dogan, Sadak et Alinak, ce qui a conduit à leur arrestation et à l'engagement de poursuites contre eux pour séparatisme en vertu de l'article 125 du Code pénal turc. Le 16 juin 1994, la Cour constitutionnelle a dissous leur parti, le Parti de la démocratie (DEP), ce qui a eu pour effet de priver tous les députés de ce parti, sauf trois, de leur siège. MM. Toguç, Kilinç, Günes, Yigit et Kartal ont fui à l'étranger et, par la suite, ont été accusés également de séparatisme.
  • Le 8 décembre 1994, la Cour de sûreté de l'Etat d'Ankara a déclaré Mme Zana, MM. Dicle, Türk, Dogan et Sadak coupables d'appartenance à une organisation armée et les a condamnés à 15 ans d'emprisonnement. M. Yurtdas a été déclaré coupable de soutien à une organisation armée et a été condamné à une peine de sept ans et six mois d'emprisonnement. MM. Alinak et Sakik ont été déclarés coupables de propagande séparatiste t condamnés à trois ans et six mois d'emprisonnement et à une amende de 70 millions de livres turques. Compte tenu de leur peine, il sont privés de leurs droits politiques à vie et MM. Alinak et Yurtdas, tous deux avocats, se voient interdire à vie l'exercice de leur profession.
  • Mme Zana, MM. Dicle, Dogan et Sadak, qui purgent actuellement la peine de 15 ans d'emprisonnement à laquelle ils ont été condamnés en décembre 1994, n'ont jamais été accusés d'avoir commis des actes de violence ou prôné la violence; pour prouver leur appartenance au PKK, le verdict s'est essentiellement fondé sur des discours publics des députés et sur des écrits cités dans l'acte d'accusation.

considérant qu'à l'audience la délégation turque a longuement invoqué l'hospitalité que Leyla Zana aurait accordée à un membre du PKK pour prouver la complicité de terrorisme; rappelant à ce sujet que, selon les éléments versés au dossier, c'est M. Dogan et non Mme Zana qui a été déclaré coupable d'avoir hébergé un membre du PKK, fait que M. Dogan n'a pas nié dans l'entretien qu'il a eu avec la délégation du Comité en avril 1996; toutefois, comme il l'a expliqué, la tradition d'hospitalité en Turquie veut que toute personne qui frappe à votre porte, même s'il s'agit d'un inconnu, soit accueillie en invité, à plus forte raison si elle frappe à la porte d'un représentant qu'elle a élu au Parlement; cette personne était venue chez lui, on l'avait fait entrer, et elle s'était avérée plus tard être un membre du PKK,

rappelant aussi que Mme Zana, MM. Dicle, Dogan et Sadak ont déjà purgé cinq ans de la peine de 15 ans de prison prononcée contre eux; que, selon leurs avocats, s'ils avaient été condamnés par un tribunal ordinaire, ils bénéficieraient d'une remise de peine et seraient libérés au bout de six ans; cependant, comme ils ont été condamnés par une Cour de sûreté de l'Etat, ils devront purger 12 ans au moins; rappelant à ce sujet que, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, les tribunaux où siègent des juges militaires ne satisfont pas aux critères d'un tribunal indépendant et impartial énoncés à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme; que la Constitution turque a été modifiée le 1er janvier 1999 pour se mettre en conformité à cet arrêt de la Cour, de sorte que des membres des forces armées ne siègent plus aux tribunaux turcs,

rappelant que Mme Zana s'est vu infliger en 1998 une peine supplémentaire d'un an de prison, apparemment pour un article qu'elle a publié fin 1997 dans un journal du parti HADEP; que la Cour aurait assimilé l'usage du terme " kurdes " à une incitation à la haine; que M. Hatip Dicle a été condamné à une peine supplémentaire de dix ans d'emprisonnement pour des articles qu'il a publiés alors qu'il était en prison; que 14 accusations ont été portées contre lui en application de l'article 8 de la loi antiterrorisme ou de l'article 312 du Code pénal, que l'affaire est encore en instance et que chaque délit qui lui est reproché emporte une peine d'un à trois ans d'emprisonnement,

rappelant que, le 8 février 1999, la Grande Assemblée nationale de Turquie a voté une loi d'amnistie qui suspend l'exécution des peines supplémentaires frappant M. Dicle et Mme Zana, pour autant qu'ils ne récidivent pas,

considérant que, selon la délégation turque, une loi d'amnistie s'est heurtée au veto du Président et est actuellement débattue au Parlement; que, toutefois, elle ne vise pas les crimes en rapport avec le terrorisme car le Parlement doit tenir compte de l'opinion publique, opposée à une telle mesure,

rappelant aussi que le cas de Mme Zana et de MM. Dicle, Dogan et Sadak est encore en instance devant la Cour européenne des droits de l'homme,

notant que l'article 61 du Règlement de la Cour européenne des droits de l'homme (1er novembre 1998) autorise le Président de la Chambre - conformément à l'article 36 (para. 2) de la Convention européenne des droits de l'homme - à inviter ou autoriser " toute personne intéressée autre que le requérant, à soumettre des observations écrites ou, dans des circonstances exceptionnelles, à prendre part à l'audience ",

  1. remercie la délégation turque des informations et observations communiquées;
  2. déplore vivement que la Grande Assemblée nationale de Turquie ne tienne pas compte des appels répétés lancés par l'Union pour que les anciens députés en question bénéficient d'une amnistie;
  3. reste convaincu, à la lumière des éléments versés au dossier, qu'ils ont été reconnus coupables et condamnés pour avoir exercé leur liberté d'expression en plaidant pour une solution politique au conflit dans le sud­est de la Turquie;
  4. réitère solennellement l'appel qu'il a lancé à la Grande Assemblée nationale de Turquie pour que ces anciens parlementaires, y compris ceux qui se trouvent en exil, bénéficient d'une amnistie puisque les faits qui leur ont été reprochés n'étaient pas des crimes de sang; est convaincu que pareille mesure concrétiserait la volonté déclarée des autorités turques de promouvoir et de respecter les droits de l'homme;
  5. décide de se prévaloir des dispositions de l'article 61 du Règlement de la Cour européenne des droits de l'homme, et prie le Secrétaire général de prendre les mesures nécessaires à cet effet et d'en informer les autorités turques, les sources et les anciens parlementaires concernés;
  6. charge le Comité des droits de l'homme des parlementaires de poursuivre l'examen de ce cas et de lui faire rapport à sa prochaine session (octobre 2000).


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