IPU Logo-top   
 IPU Logo-middleUnion interparlementaire  
IPU Logo-bottomPlace du Petit-Saconnex, Case postale 438, 1211 Genève, Suisse  

MADAGASCAR
CAS N° MAG/01 - JEAN EUGENE VONINAHITSY
Résolution adoptée sans vote par le Conseil interparlementaire
à sa 170ème session (Marrakech, le 23 mars 2002)


Le Conseil de l'Union interparlementaire,

se référant au cas de M. Jean-Eugène Voninahitsy (Madagascar), exposé dans le rapport du Comité des droits de l'homme des parlementaires (CL/170/13.c.ii)-R.1), et à la résolution qu'il a adoptée à ce sujet à sa 169ème session (septembre 2001),

tenant compte des observations communiquées par le Président de l'Assemblée nationale par lettre en date du 14 janvier 2002; tenant également compte d'une communication de la source datée du 6 mars 2002,

rappelant les éléments suivants versés au dossier :

  • M. Voninahitsy a été arrêté le 23 décembre 2000 en flagrant délit pour avoir offensé le chef de l’Etat dans une déclaration faite deux mois auparavant, le 26 octobre précisément, dans laquelle il avait révélé que le pont flottant que le chef de l’Etat avait prétendu avoir acheté aux autorités ukrainiennes était en fait un don destiné à la population malgache;
  • le 26 décembre 2000, il a été également inculpé pour avoir émis neuf chèques sans provision en juin, juillet et août 2000 et il a été placé sous mandat de dépôt pour chacun de ces délits, considérés par les autorités comme des délits flagrants;
  • le 27 décembre 2000, après avoir rejeté les exceptions d’inconstitutionnalité et d’irrégularité de procédure soulevées par les avocats, le tribunal correctionnel de Tananarive a déclaré M. Voninahitsy coupable des deux délits; cependant, si la Cour d’appel a cassé le jugement dans la première affaire, au motif que le défaut de flagrance invoqué par la défense était fondé, elle a confirmé le jugement portant sur l’émission de chèques sans provision, en ramenant néanmoins la condamnation de 40 à six mois d’emprisonnement; selon la source, M. Voninahitsy a réglé tous les chèques, ce qui expliquait l'absence de plaignants ou de parties associées;
  • par arrêt N° 141 en date du 21 juin 2001, la Chambre d'accusation de la Cour suprême a confirmé la condamnation prononcée en appel contre M. Voninahitsy qui, ayant purgé entre-temps sa peine, a été libéré le 23 du même mois;
  • sa condamnation étant devenue définitive, M. Voninahitsy a été déchu de son mandat parlementaire, conformément aux Articles 9.6 et 25 de l’ordonnance N° 93-007 du 24 mars 1993 et, le 19 juillet 2001, la Haute Cour constitutionnelle a pris acte de la vacance de son siège et l'a remplacé;

considérant qu’en vertu des Articles 9.6 et 25 de l’ordonnance N° 93-007 du 24 mars 1993, qui prévoit qu'une personne condamnée pour crime ou délit n'est pas éligible, M. Voninahitsy a été non seulement exclu de l’élection présidentielle en décembre 2001, mais également déclaré inéligible à vie,

rappelant que, dans sa lettre du 27 février 2001, le Président de l'Assemblée nationale se réfère à la jurisprudence française en expliquant le caractère de flagrant délit que revêt l'émission de chèque sans provision par M. Voninahitsy; que, dans sa lettre du 14 janvier 2002, il réitère ces vues, à savoir que l'Article 206 du Code de procédure pénale, identique à l'Article 53 du Code français de procédure pénale, classe parmi les crimes et délits flagrants le crime ou le délit qui se commet actuellement ou qui vient de se commettre, et le crime ou le délit déjà commis, non connu, sauf par son auteur ou son complice au moment de sa commission mais qui a été révélé par la suite par un indice apparent ne laissant aucun doute sur l'évidence de l'infraction et l'identification de son auteur; il réitère en outre que la date exacte de la commission de l'infraction importe peu dans ces conditions, la flagrance se trouvant fixée, non au moment où l'infraction a été réellement commise, mais à l'instant où elle est révélée, cette découverte devant donner lieu tout simplement à une suite ininterrompue d'actes d'information; il affirme enfin que le droit malgache, en faisant référence au cas de flagrant délit, vise la procédure d'information sommaire et non une catégorie d'infractions,

considérant que le Président de l'Assemblée nationale, en commentant la résolution adoptée sur ce cas à l'occasion de la 106ème Conférence, déclare que le principe de l'inviolabilité parlementaire ne saurait être un refuge pour commettre des infractions et échapper à toute poursuite judiciaire, juge inquiétante la position du Comité "dans la mesure où il attache beaucoup plus d’importance à la procédure qu’au fond de l’affaire", et estime que "les dispositions de la résolution n’ont pas porté sur la matérialité des faits et leur imputabilité au condamné",

considérant enfin que le Président de l’Assemblée nationale a déclaré, dans sa lettre du 14 janvier 2002, que, tout en étant convaincu de la culpabilité de M. Voninahitsy au regard du droit malgache, l’Assemblée nationale était disposée à examiner tout projet de texte visant à lui accorder une amnistie; rappelant que deux précédentes propositions d’amnistie présentées au Parlement en faveur de l’intéressé ont été rejetées,

  1. remercie le Président de l’Assemblée nationale de ses observations;
  2. affirme qu’en matière pénale le respect des règles de procédure est fondamental pour éviter que des individus soient injustement punis, et souligne que ces règles sont dès lors essentielles à la protection des droits de l’homme;
  3. relève que l’immunité parlementaire est une garantie contre toute poursuite pouvant être motivée par des considérations politiques et qu’il est dès lors de l’intérêt du Parlement de veiller à la faire respecter;
  4. réitère que le flagrant délit, selon l’entendement commun et comme l’a reconnu le Président, est une procédure spéciale visant à permettre aux autorités policières et judiciaires d’agir avec diligence pour ne pas perdre des preuves manifestes et brouiller les pistes menant au coupable; elle confère donc aux enquêteurs des pouvoirs accrus, apporte des garanties moindres de respect des libertés individuelles et est strictement limitée dans le temps;
  5. réaffirme que l’arrestation d’un parlementaire accusé d’avoir émis des chèques sans provision quatre, voire six mois, auparavant, ne saurait se faire au titre de la procédure de flagrant délit et requiert par conséquent la levée de l’immunité parlementaire; ne comprend toujours pas pourquoi le ministère public n’a pas ordonné l'arrestation de M. Voninahitsy lorsque la Banque centrale lui a notifié que son compte bancaire n’était pas suffisamment approvisionné et pourquoi il a attendu, pour ce faire, que M. Voninahitsy ait été arrêté pour diffamation, de nouveau en flagrant délit et à tort, comme l’a confirmé l’arrêt de la Cour d’appel en l’espèce;
  6. continue à craindre que les autorités n'aient en l'espèce recouru à la procédure de flagrant délit pour éviter que l’affaire soit examinée au Parlement;
  7. réaffirme qu’en faisant la déclaration qui lui a valu sa première arrestation, M. Voninahitsy n’a fait qu’exercer son droit à la liberté d’expression et son mandat parlementaire, qui comprend nécessairement la possibilité de critiquer et de dénoncer d’éventuels abus du pouvoir exécutif de l’Etat;
  8. note donc avec une vive préoccupation qu’en vertu de l’Article 9.6 de l’ordonnance N° 93-007, M. Voninahitsy restera inéligible pour le restant de ses jours;
  9. engage de nouveau l’Assemblée nationale à accorder une amnistie à M. Voninahitsy et à lui permettre de recouvrer ainsi son éligibilité;
  10. prie le Secrétaire général de communiquer cette résolution au Président de l’Assemblée nationale et à la source;
  11. prie le Comité des droits de l’homme des parlementaires de poursuivre l’examen de ce cas et de lui faire rapport à sa prochaine session (septembre 2002).

Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 107ème Conférence et réunions connexes de l'Union interparlementaire" au format PDF (taille du fichier environ 452K). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement.Get Acrobat Reader

PAGE D'ACCUEILred cubeDROITS DE L'HOMMEred cubeDOMAINES D'ACTIVITESred cubeSTRUCTURE ET DOCUMENTS