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Union interparlementaire  
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ZIMBABWE
CAS N° ZBW/20 - JOB SIKHALA
CAS N° ZBW/27 - PAUL MADZORE
CAS N° ZBW/44 - NELSON CHAMISA

Résolution adoptée à l'unanimité par le Conseil directeur
à sa 194ème session (Genève, 20 mars 2014)

Le Conseil directeur de l'Union interparlementaire,

se référant aux cas de MM. Job Sikhala, Paul Madzore et Nelson Chamisa, parlementaires de l’opposition au moment où la plainte a été déposée, et à la résolution qu’il a adoptée sur les trois cas à sa 190ème session (avril 2012), ainsi qu’à celle qu'il a adoptée à sa 192ème session (mars 2013) sur le cas de M. Chamisa,

se référant aux communications de la source, en décembre 2013, sur le cas de M. Job Sikhala,

notant que les lettres adressées récemment par le Secrétaire général de l'UIP au Président de l'Assemblée nationale sont restées sans réponse,

notant également que le Secrétaire général de l'UIP n'a pas reçu d'informations à jour des sources sur les cas de MM. Madzore et Chamisa depuis plus de trois ans et que ses communications sont restées sans réponse,

tenant compte du fait que seul M. Madzore est toujours membre du parlement à ce jour,

rappelant que ces trois cas concernent l'impunité dont continuent de jouir les agents de l'Etat responsables des tortures infligées en janvier 2003 et en mars 2007 à M. Sikhala et à M. Madzore, ainsi que le fait que les autorités ne soient pas intervenues lorsque M. Chamisa a été battu par des agents de sécurité en 2007 et que les auteurs de ces actes sont toujours impunis,

rappelant les informations suivantes versées au dossier :

  • M. Sikhala et M. Madzore ont été torturés par des policiers en janvier 2003 et mars 2007 respectivement; M. Sikhala a joint à sa plainte pour torture des certificats médicaux et a indiqué les noms des suspects, qui ont même été divulgués dans la presse à l'époque; M. Madzore a informé le tribunal des tortures qu'il avait subies lorsqu'il a comparu le 20 mars 2007 avant d'être placé en détention; il a déclaré qu'alors qu'il était en détention provisoire, il avait reçu régulièrement la visite d'agents de l'Organisation centrale de renseignement (CIO) et du renseignement militaire qui l’avaient emmené pour des séances de torture; il avait dû être transféré dans un hôpital privé, où il avait été placé en soins intensifs en raison des tortures qu'il avait subies;

  • malgré l'existence de plaintes et de preuves, les auteurs de ces actes n'ont pas été poursuivis; M. Madzore a intenté une action en dommages-intérêts à laquelle les tribunaux n’ont donné aucune suite; M. Sikhala a soumis une requête tendant à contraindre la police à enquêter réellement sur sa plainte, mais aucune décision n'a été prise à ce propos par la High Court;

  • en mai 2012, la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples a jugé que l'Etat du Zimbabwe était responsable des actes de torture subis par M. Gabriel Shumba, qui était l'avocat de M. Sikhala à l'époque et qui avait été arrêté et torturé en même temps que lui;

  • M. Chamisa avait été gravement blessé, le 18 mars 2007, à l'aéroport international de Harare lorsqu'il avait été agressé par des hommes, qui seraient des agents de la sécurité, sous les yeux de policiers qui n'étaient pas intervenus; M. Chamisa n'avait jamais officiellement porté plainte à la police pour cette agression, car il estimait que cela n'aboutirait à rien, étant donné que la police était présente durant cet incident et n'avait pris aucune mesure pour le protéger; faute d'inscription sur la main courante de la police, les autorités ont toujours affirmé que la police et le Parquet ne pouvaient entamer de poursuites et porter l'affaire à l'attention du Procureur général et des tribunaux;
considérant qu'en décembre 2013, la source a réaffirmé que M. Sikhala avait clairement identifié les policiers qui l’avaient torturé dès sa première plainte, à savoir : i) M. Chrispen Makadenge, qui est toujours en exercice au sein de la police de la République du Zimbabwe et a même été promu au poste de commissaire principal au service de renseignements de la police; ii) M. Matsvimbo, qui a été promu lui aussi et travaille actuellement au service de sécurité de la police; et iii) et iv) MM. Garnet Sikovha et Mashashu qui sont décédés,

rappelant que la Loi sur l’ordre et la sécurité publics (POSA), promulguée en 2002 et modifiée en 2007, donne à la police de très larges pouvoirs; qu’elle a été décriée comme une grave restriction à la liberté d’expression, de réunion et d’association, vu en particulier la façon dont la police s’en est servie pour justifier un emploi excessif de la force et décourager les dissidents d’organiser des manifestations et de tenir des rassemblements publics; que cette loi n'a pas été révoquée et qu'aucune réforme institutionnelle et législative n'a été entreprise pour garantir réellement l'impartialité de la police, des forces de sécurité et de la justice et pour faire rendre des comptes aux responsables d'abus,

rappelant aussi que le Zimbabwe est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et tenu, à ce titre, de respecter l’interdiction de la torture et des autres mauvais traitements (art. 7), le droit à la liberté et à la sécurité de la personne (art. 9) et le droit à la liberté d’expression (art. 19) et de "garantir que toute personne dont les droits et libertés reconnus dans le présent Pacte auront été violés disposera d’un recours utile" (article 2.3 a); rappelant en outre que l'interdiction de la torture est une norme impérative du droit international et que, en application de la Déclaration des Nations Unies sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, "Chaque fois qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'un acte de torture (…) a été commis, les autorités compétentes de l'Etat considéré procèdent d'office et sans retard à une enquête impartiale"; soulignant une nouvelle fois que le Zimbabwe, en tant que partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, est tenu, non seulement d’interdire la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants, mais aussi d'ouvrir d’office des enquêtes sur les allégations connues de torture, afin de poursuivre les responsables de ces actes et que l'absence de plainte officielle concernant une agression dont les autorités ont connaissance ne saurait être invoquée pour justifier l'inaction,

  1. conclut que la torture de trois parlementaires appartenant à l'opposition constitue une grave violation des droits de l'homme et que les autorités zimbabwéennes n'ont pas pris de mesures effectives pour entamer des poursuites contre les agents de l’Etat responsables de ces actes; considère que le Parlement zimbabwéen n'a pas, quant à lui, exercé efficacement sa fonction de contrôle et ne s’est pas non plus acquitté de son devoir, qui relève aussi de son intérêt, d'assurer la protection de ses membres, de manière à ce qu'ils puissent exercer leur mandat sans entraves;

  2. est fermement convaincu que l'impunité, grave violation des droits de l'homme en soi, sape l'état de droit et le respect des droits de l'homme dans le pays et ne peut qu'encourager la répétition de tels actes, comme il ressort à l'évidence des cas en question;

  3. note avec consternation à ce propos que les efforts déployés par les victimes pour obtenir justice et réparation ont été systématiquement ignorés par les autorités compétentes et qu'aucune enquête sérieuse n'a été ouverte, malgré les preuves disponibles et l'identification sans ambiguïté par les victimes des auteurs présumés et que, dans le cas de M. Sikhala, plutôt que de prendre des mesures contre les auteurs présumés, les autorités en ont promu certains au sein des forces de sécurité;

  4. décide néanmoins de clore les cas de M. Madzore et M. Chamisa, compte tenu du fait que les sources n'ont pas répondu depuis longtemps aux communications qui leur ont été adressées, ce qui place le Comité dans l'impossibilité de poursuivre efficacement l'examen de ces cas;

  5. souligne toutefois que, nonobstant cette décision, il n'en est pas moins impératif pour les autorités, conformément à leurs obligations légales, ainsi qu'aux normes internationales relatives aux droits de l'homme auxquelles le Zimbabwe a souscrit, de poursuivre les auteurs présumés de ces actes et les prie instamment de prendre, pour tous ces cas, les mesures voulues sans retard;

  6. prie le Secrétaire général de communiquer la présente résolution aux autorités parlementaires et à la source;

  7. prie le Comité de poursuivre l'examen du cas de M. Sikhala et de lui faire rapport en temps utile.
Note : vous pouvez télécharger une version électronique du texte intégral de la brochure "Résultats de la 130ème Assemblée et réunions connexes de l'Union interparlementaire" au format PDF (taille du fichier 881 Ko). Cette version nécessite Adobe Acrobat Reader que vous pouvez télécharger gratuitement.Get Acrobat Reader

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