Les mutilations sexuelles féminines : une atteinte à la dignité humaine
La 106ème Conférence de l'Union interparlementaire, tenue à Ouagadougou, a été l'occasion d'un débat parlementaire sur le thème "Une violence contre les femmes : les mutilations sexuelles féminines". Dirigée par le Président de l'Assemblée nationale du Burkina Faso, M. Mélégué Traoré (interview ci-après) et animée par des experts burkinabé et des parlementaires de plusieurs pays, la table ronde avait pour objet de présenter diverses pratiques traditionnelles, telles l'excision et l'infibulation, qui affectent des millions de fillettes et de femmes dans plus de trente pays, spécialement en Afrique sahélienne, et aussi de sensibiliser les parlementaires, hommes et femmes, à l'importance de parvenir à l'élimination de ces pratiques dans le respect des cultures et des personnes.
Des suggestions quant aux dispositions à prendre aux niveaux national, sous-régional et international ont été émises. Les participants sont convenus qu'une législation de nature à prévenir, combattre et punir les mutilations sexuelles féminines doit être adoptée dans les pays où ces pratiques perdurent et qu'il est souhaitable que les législations et programmes en la matière soient harmonisés afin d'éviter que les jeunes filles d'un pays touché par l'interdiction ne soient soumises à ces pratiques dans un pays où la loi reste tolérante. Ils ont aussi mis l'accent sur l'importance des campagnes de sensibilisation et des programmes éducatifs, la reconversion des exciseuses, sur l'octroi des ressources budgétaires nécessaires pour soutenir les programmes, institutions et ONG engagés dans la lutte contre les mutilations sexuelles féminines, et sur un contrôle étroit de l'action du gouvernement s'agissant de ces questions.
L'Union interparlementaire a été appelée à susciter la mise en place, avec l'Union parlementaire africaine, d'une cellule de réflexion comprenant des hommes et des femmes parlementaires des pays où ces pratiques traditionnelles persistent ainsi que des pays d'émigration de leurs ressortissants, pour échanger des informations sur les législations, les programmes et les bonnes pratiques à promouvoir en réponse à ce phénomène complexe. L'UIP a entrepris de recueillir les textes des lois existant à ce sujet, et elle entend contribuer à la création d'une banque de données sur la question, pour soutenir une action coordonnée de la communauté internationale. Ce sujet préoccupe également les Nations Unies. Le Secrétaire général de l'ONU, M. Kofi Annan, présentera un rapport intitulé "Pratiques traditionnelles ou pratiques coutumières affectant la santé des femmes et des fillettes" lors de la 56ème session de l'Assemblée générale.
"On peut être un bon Africain et fidèle à la tradition sans faire exciser les filles"
Q : Lors de la 106ème Conférence interparlementaire, que vous avez présidée, vous avez souhaité organiser un panel sur l'excision et les autres mutilations sexuelles féminines. Pourquoi ?
Mélégué Traoré: Parce que l'excision est une question importante. Nombreuses sont les sociétés qui en Afrique connaissent le phénomène des mutilations sexuelles des femmes, notamment l'ablation du clitoris. Ce phénomène, très connu au Burkina Faso mais aussi dans un certain nombre de pays d'Afrique et d'ailleurs, se base sur des motifs religieux et culturels, c'est-à-dire sur les traditions. Il faut être conscients de la gravité et de l'étendue du problème. Il existe des ethnies au Burkina Faso qui considèrent qu'une femme ou une jeune fille qui n'est pas excisée n'a pas de chance de trouver un mari. Il faut une prise de conscience des parlementaires à ce sujet. Au Burkina Faso, l'Etat a créé le Comité national de lutte contre l'excision, dirigé par Mme Bassolé. Il s'agit d'une administration permanente dont les membres sont salariés par l'Etat et dont le travail principal consiste à animer toutes les activités de lutte contre l'excision et à mobiliser tous les acteurs qui sont en mesure de lutter contre cette pratique. Certains de ces acteurs étaient, au départ, favorables à l'excision, comme les chefs religieux, surtout islamiques et les chefs coutumiers ; le Burkina Faso reste un pays composé à 50-60% d'animistes. Dans notre tradition, l'initiation est très importante et il se trouve que l'une des justifications de l'excision est justement le rite initiatique, lequel ne peut pas se faire, pour les femmes, sans l'excision. Autrement dit, l'excision est l'un des éléments clé du rite initiatique.
Q : Qui peut rassurer les parents qui font exciser leurs filles de peur qu'elle ne puissent trouver un mari, si elles ne le sont pas ?
M.T.: Je suis connu au Burkina pour être un traditionaliste, puisque je suis un chef coutumier qui officie les sacrifices et immole les animaux. Mes enfants ne portent ni des noms chrétiens ni des noms musulmans, mais des noms de chez nous. Je vous dit cela, car je pense que la principale justification à l'excision ne tient plus la route aujourd'hui. J'ai deux filles et j'ai refusé de les faire exciser. Les gens au village ont compris qu'il n'y avait rien dans les traditions de l'ethnie Sénoufo - dont je suis issu - qui justifie l'excision. C'était valable à l'époque de la grande initiation, qui a disparu aujourd'hui au profit de l'école. Il ne reste qu'une partie du pays Sénoufo, en Côte d'Ivoire, où l'initiation continue d'exister. Mais même dans ce cas-là, il est facile d'admettre aujourd'hui qu'une fille n'a pas besoin d'être excisée pour avoir sa place dans le monde Sénoufo. Et ce qui est vrai chez les Sénoufo l'est ailleurs. Il faut commencer par faire admettre à tout le monde que la principale justification à l'excision n'existe plus. Je dis toujours aux villageois d'arrêter d'exciser les filles car cela ne correspond plus à rien aujourd'hui. Ils les font souffrir inutilement car aucun enseignement des ancêtres ne prône l'excision. Non seulement je dirai à mon fils qu'il peut épouser une fille non excisée, mais je vous dirais qu'aujourd'hui, dans mon village, tous les jeunes ont compris que ce n'est pas parce qu'une fille est excisée qu'elle est plus fidèle !
Q : Comment expliquez-vous alors que cette pratique persiste ?
M.T.: Le phénomène persiste parce que la tradition continue. Dans les années 60, on pensait qu'au lendemain de l'indépendance les traditions n'existeraient plus dans les années 70. On sait aujourd'hui qu'il ne faut pas détruire les traditions mais qu'il faut se les réapproprier et leur donner une autre signification, conforme à notre monde actuel et liée à la valorisation du monde africain. Cela est possible, sans avoir besoin d'exciser les filles. C'est par là qu'il faut commencer. On peut être un bon africain sans exciser les filles. Il faut aussi réprimer. Non pas dans les villages, mais j'estime que l'excision qui est pratiqué dans les hôpitaux ou dans les cabinets médicaux, par des agents de l'Etat, doit être réprimée, même si elle est considérée comme étant plus saine. Au Burkina, la loi interdit l'excision : il s'agit d'un délit pénal. Par contre, s'agissant des sociétés qui l'appliquent en tant que système, il n'y a que la sensibilisation qui puisse en venir à bout. Les exciseuses sont surtout de vieilles femmes, car chez nous, l'âge est chargé de prestige et de respect.
Q : Cette question semble vous toucher profondément ...
M.T.: Je me souviens que ma sœur aînée est tombée de vertige le jour où elle a été excisée. Aujourd'hui je prends conscience du traumatisme qu'elle a subi à l'époque. Je ne pouvais pas savoir, car alors tout le monde estimait qu'elle était d'une faiblesse coupable. Elle avait 16 ans et elle a perdu beaucoup de sang. Le fait qu'elle perde connaissance était considéré comme un scandale. Je sais que cela sera long, mais je crois que nous pouvons venir à bout de l'excision. Ici au Burkina, nous avons eu des résultats, notamment grâce à la contribution des chefs religieux, imams, chefs coutumiers, prêtres catholiques et pasteurs protestants.
Q : Etes-vous prêt à faire campagne auprès de vos homologues des pays concernés pour lutter contre l'excision ?
M.T.: Je suis tout à fait prêt à faire campagne et je lance un appel pour qu'une législation uniforme contre l'excision soit mise en place dans les Etats de cette zone de l'Afrique de l'Ouest. Cette campagne de sensibilisation ne va pas à l'encontre de la tradition. C'est un chef coutumier qui vous le dit !
El Hadj Ibrahim Zougmore, Membre du Comité de lutte contre la pratique de l'excision au Burkina Faso :
"Un mythe qui n'a aucun fondement réel"
Ceux qui entretiennent les mutilations sexuelles féminines ont aussi inventé des justifications considérées comme des éléments essentiels dans le processus de socialisation de la femme depuis sa naissance à l'âge adulte. Ces justifications, qui n'ont aucun fondement réel, s'expriment autour de six principaux domaines, qui sont : la maîtrise de la sexualité de la fille et la femme, la reproduction, l'intégration sociale de la fille et la femme, la santé d'une manière générale et l'hygiène en particulier, la religion, et enfin la conception psycho-sexuelle de certaines ethnies qui attribuent un pouvoir maléfique à l'organe génital de la femme. Les religions qui encouragent la pratique des mutilations génitales féminines soutiennent que la femme non excisée est impure vis-à-vis des pratiques religieuses, notamment la prière. D'autres trouvent que même si la prière d'une femme non excisée peut être acceptée, elle n'a pas la même valeur spirituelle que celle d'une femme excisée. Mais actuellement, sur ce point il y a divergence de point de vue au niveau de certains religieux. Les mutilations constituent un mythe dynamique qui n'a aucun fondement réel.
| Panel sur les mutilations sexuelles féminines lors de la 106e Conférence de l'IPU à Ouagadougou |
Mme Viola Furubjelke, Présidente du Comité de coordination des femmes parlementaires et Présidente de la Commission des Affaires étrangères du Parlement de la Suède :
"Une violation des droits de l'enfant"
Ce panel était une bonne initiative, car c'est seulement grâce à un débat public que nous pouvons susciter une évolution des attitudes. En tant que parlementaires, nous devons utiliser les instruments juridiques existants et trouver des mécanismes pour les mettre en œuvre, voire même essayer adopter des lois plus sévères. La question a été abordée de façon directe, non seulement du point de vue du langage, mais aussi du point de vue des photos et de la vidéo qui ont été montrées. Le premier réflexe était de ne pas regarder ces images insoutenables, mais il a fallu se ressaisir et se dire que pour être à même de changer les choses, il fallait les regarder en face et écouter les témoignages terribles des victimes.
L'excision viole la Convention relative aux droits de l'enfant. De nombreuses filles sont âgées de moins de dix-huit ans, certaines n'ayant que quatre ou cinq ans. Et si les filles ont plus de dix-huit ans, alors il s'agit d'une violation de la Convention contre toutes les formes de discrimination à l'encontre des femmes, puisque l'excision est une façon de ne pas reconnaître leur droit à la sexualité.
M. Mohammed Farouk Cassim, Membre de l'Assemblée nationale de l'Afrique du Sud :
"Exercer une forte pression sur la famille"
Nous devrions responsabiliser l'Etat pour qu'il protège davantage les fillettes. La loi devrait être plus sévère à l'encontre des personnes qui pratiquent l'excision. La peine de prison devrait être de vingt ans pour ceux et celles qui pratiquent ces mutilations. Nous devrions aussi envisager qu'avant son mariage, une jeune fille puisse présenter un certificat délivré par un centre médical attestant qu'elle n'a pas subi de mutilations sexuelles. L'idée est d'exercer une forte pression sur la famille, car le rêve de toute famille est de voir ses filles faire un beau mariage et être heureuses. La famille pourrait reconsidérer la chose si elle sait que la jeune fille risque de ne pas obtenir de certificat.
Quant à ceux qui soutiennent ces pratiques, qu'il s'agisse de responsables communautaires ou de chefs religieux, ils devraient également être passibles de poursuites judiciaires et non en être exempts. Les responsables de ces mutilations brutales devraient en répondre devant la justice. Nous devrions également tenter d'obtenir le soutien des grands centres de pouvoir religieux, tels que Rome et La Mecque, qui devraient condamner sans équivoque ces pratiques afin qu'il soit clair, une fois pour toutes, qu'elles sont inacceptables et qu'elle n'ont le soutien ni des autorités religieuses ni des autorités politiques ou judiciaires. Il faudrait aussi faire un film qui décrive les épreuves, la douleur, le chagrin et la souffrance des victimes pour que les gens réfléchissent à l'absurdité et à la cruauté de ces pratiques. Car une image en dit plus que mille mots. En tant qu'homme, Sud-Africain et Musulman, je pense que ceux qui pratiquent l'excision au nom de l'Islam devraient être dénoncés. Il faudrait condamner les gens, les pays et les institutions qui mutilent les femmes et leur infligent de telles souffrances, car ces pratiques ne figurent nulle part dans le Coran.
Mme Kaïdiatou Coulibaly, Troisième Vice-Présidente de l'Assemblée nationale du Mali :
"Le problème se situe au niveau des femmes"
Les mutilations génitales, et surtout l'excision, existent chez nous. Cela fait des années que les associations et les organisations non gouvernementales se battent pour mettre fin à cet acte barbare, mais elles n'y arrivent pas. Les traditions persistent, la religion aidant. Au Mali, nous, femmes, connaissons les conséquences de l'excision. Le problème ne se trouve pas au niveau des hommes, mais au niveau des femmes. Au Mali, pays à 90% musulman, il s'agit d'une mauvaise interprétation du Coran : les gens pensent que ne pas exciser les filles est contraire à l'Islam. Des personnes qui soutenaient les associations qui se battent contre l'excision se sont rétractées après un Congrès que les femmes islamiques ont tenu à ce sujet. Pour que nous puissions trouver une solution au Mali, il faut passer par la loi, il faut absolument que le gouvernement s'implique et mette en place une véritable politique d'éradication , sinon cela va continuer. Les exciseurs et les exciseuses auront au moins peur de la loi.
Mme Félicité Bassolé, Secrétaire permanente du Comité national de lutte contre l'excision Burkina Faso :
"L'excision est une mauvaise interprétation du Coran"
La stratégie la plus efficace est l'information. Il faut sensibiliser tout le monde : hommes, femmes, exciseurs, exciseuses. Il faut mettre l'accent sur les pratiquants car si ces derniers refusent de pratiquer l'acte, il n'y aura plus d'excision. Il faut donc une loi pour protéger les femmes et les filles sans défense. La peur d'aller contre la loi, loi qui existe chez nous depuis 1996, est dissuasive. Notre stratégie est efficace. Il y a eu plusieurs arrestations. Plusieurs autres pays ont adopté des lois contre l'excision : la Côte d'Ivoire, le Ghana, le Nigeria et aussi le Sénégal qui a maintenant emboîté le pas...Mais il faut continuer de faire passer le message, surtout dans les campagnes où la télévision et la radio n'arrivent pas toujours. Il faut aussi plus de ressources pour sensibiliser les populations, ne serait-ce que pour les déplacements. La collaboration des imams et des chefs coutumiers est très importante. L'excision n'est pas recommandée par le Coran, c'est une mauvaise interprétation du Coran, une duperie, en quelque sorte.
Mme Marie-José Boucher Camara, Secrétaire générale adjointe de l'Assemblée nationale du Sénégal :
"Expliquer les dangers liés à l'excision"
Nous faisons d'énormes progrès, lents, certes, car il s'agit d'une tradition bien implantée qui ne pourra vraiment être vaincue que nous menons une grande campagne d'information qui explique les dangers auxquels sont confrontées les femmes et les petites filles. Au Sénégal, le collectif des femmes parlementaires a harmonisé son programme avec celui de l'ensemble des groupements de femmes pour essayer de faire comprendre qu'il faut se départir de cette pratique, parce qu'elle cause beaucoup de problèmes à la santé de femmes, dans l'immédiat et après.
Mme Rebecca Alitwala, Vice-Président du Parlement de l'Ouganda :
"Un crime contre l'humanité"
L'excision est une torture, elle est inhumaine et dégradante pour les fillettes. Nous, responsables politiques, devons nous engager en faveur des filles de tout notre continent. Je souhaite que l'excision soit considérée comme un crime contre l'humanité, que les personnes qui commettent ce crime, qui qu'elles soient et où qu'elles se trouvent, soient arrêtées et jugées pour violation des droits de la personne. Il est important que les hommes se joignent à nous parce que la justification avancée est que les femmes doivent devenir de bonnes épouses. On leur inflige cette souffrance pour protéger les hommes, mais ce sont les hommes qui devraient être à la pointe de ce combat, parce qu'ils en sont les bénéficiaires. Ils devraient dire qu'ils ne veulent pas de femmes excisées. Dans mon pays, une tribu pratique l'excision. Malheureusement, dans cette tribu, les Sabine, les hommes épousent des femmes excisées et ils les quittent ensuite pour aller avec des femmes non excisées !
Mme Florence Aya, Membre de la Chambre des Représentants du Nigeria :
"L'engagement des dirigeants"
Ce panel a été très riche parce qu'il a montré l'importance d'un engagement de la part des dirigeants. Nous avons vraiment besoin d'une législation et les faiseurs d'opinions, ministres, parlementaires doivent prendre ouvertement position. Cela aidera ensuite à sensibiliser les communautés. Nous respectons beaucoup les traditions mais l'excision est une violence et une souffrance à l'encontre de notre société. Législation et engagement vont donc de pair. J'ai été très frappée par la vidéo qui nous a été présentée. Lorsque l'on voit à quel point cette pratique est brutale et cruelle, personne ne peut s'opposer à ce qu'on légifère contre cette tradition nuisible. Nous avons besoin de la coopération des parlementaires et de l'Exécutif pour venir à bout de cette coutume.
Mme Marion Roe, Membre de la Chambre des Communes du Royaume-Uni :
"Amendes et prison ferme pour ceux qui violent la loi"
L'excision n'est pas seulement pratiquée sur le continent africain ; elle est également pratiquée ailleurs dans le monde, au sein des communauté immigrées. En 1985, j'ai introduit une loi à la Chambre des Communes du Parlement britannique pour interdire l'excision. Cette loi prévoit des peines telles que les amendes et la prison ferme pour ceux et celles qui pratiquent l'excision. Mais bien que nous ayons une loi, il est très difficile de juger les coupables, parce que les enfants ne veulent pas témoigner contre leurs familles.
Certaines fillettes ont été envoyées en Afrique pour des "vacances" et c'est là qu'elles ont subi l'opération. Elles sont ensuite revenues en Grande-Bretagne. Nous avons alerté les médecins, infirmières et les travailleurs sociaux pour voir s'il existe des symptômes qui indiquent que des fillettes pourraient avoir subi cette pratique, mais aussi à titre préventif ou pour sévir à l'encontre des responsables de ces actes.
Lorsque j'ai introduit ma proposition de loi, en 1985, j'ai dû faire l'éducation de mes collègues masculins qui n'avaient aucune idée de ce qu'était l'excision, parce qu'ils n'en avaient jamais entendu parler ! J'ai aussi eu des problèmes avec la communauté immigrées à Londres qui m'a harcelée, me traitant de raciste et en m'accusant d'aller à l'encontre des libertés religieuses. J'ai également convaincu le gouvernement d'allouer des fonds substantiels pour mettre sur pied un programme d'éducation au sein des communautés immigrées. Il faut expliquer non seulement aux mères mais également aux grands-mères le tort terrible qu'elles infligent aux jeunes filles, que cette pratique est nocive et qu'elle peut les affecter pour le restant de leur vie. Cette loi a eu un impact. Les jeunes générations disent aujourd'hui à leurs parents et à leurs grands-parents que l'excision viole la loi et qu'elles ne veulent pas l'infliger à leurs enfants.
Mme Ethiopia Beyene, Membre du Conseil des Représentants du Peuple de l'Ethiopie :
"Mutilations pratiquées par presque tous les groupes religieux
Les mutilations sexuelles féminines sont la pratique traditionnelle la plus nocive, dont sont victimes 75-80% des femmes et jeunes filles en Ethiopie. Elles sont pratiquées dans toutes les régions, même si leur degré varie. La Sunna (ablation seulement du prépuce) et l'ablation du clitoris sont communément pratiquées dans la plupart des régions et peuvent concerner 45%. L'excision et l'infibulation (excisions de la lèvre) touche 19% et 10% des victimes, respectivement. Les mutilations sexuelles féminines sont pratiquées tant dans les zones rurales que dans les zones urbaines, par presque tous les groupes religieux et plus particulièrement par les Chrétiens et les Musulmans. Les conséquences les plus nocives sont la douleur, les hémorragies, le choc, la rétention d'urine, les infections bactériologiques, qui peuvent aller jusqu'à la septicémie, et aux pires des cas, elles peuvent provoque l'infection du virus VIH, le tétanos et même la mort. Cela peut aussi avoir des complications gynécologiques, comme la perte de fonction, pendant la grossesse ou au moment de l'accouchement, qui peuvent même entraîner la mort. Sans oublier les conséquences sur le plan psychologique et social, telles que l'anxiété, la dépression et la psychose.
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