Les droits des femmes reculent
Soixante ans après l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme, qu'en est-il des droits des femmes ? Françoise Gaspard, ex-parlementaire à l'Assemblée nationale française, ex-députée au Parlement européen et première femme à avoir dirigé une ville de plus de 30 000 habitants, rappelle le contexte dans lequel fut adoptée la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, dite CEDAW.
Françoise Gaspard vient de terminer son mandat de vice-présidente du Comité de la CEDAW. Elle rappelle ici la polémique qui a opposé Français et Canadiens lorsqu'il s'est agit de traduire la formule Human Rights of Women en français. «Pour des raisons de formule historique, qu'on nous dit ne pas pouvoir changer, les cabines de l'ONU la traduisent par droits de l'homme de la femme ». Ce qui en dit long sur le débat idéologique et la façon dont les droits des femmes étaient pris en considération à l'époque.
Autre exemple : en 1945, lorsque la Charte des Nations Unies a été adoptée et que la question des droits de l'homme et la création d'une Commission des droits de l'homme - qui allait être présidée par Eleanor Roosevelt - a été évoquée, les organisations de femmes datant de la Société des Nations (SDN) ont demandé qu'il y ait une commission des droits de la femme. Cela a provoqué un débat très intense, puisqu'au début, Eleanor Roosevelt était contre cette idée, estimant que les droits humains comprenaient les droits des femmes. Lors de la première réunion de l'ONU à Londres en 1946 - le bâtiment de New York n'était pas construit à l'époque – Mme Roosevelt a finalement accepté qu'il y ait une commission de la condition de la femme. En anglais, ont dit « Commission on the status of women », ou CSW, traduit en français par Commission de la condition de la femme.
Mme Gaspard précise que cette commission intergouvernementale, qui s'occupe expressément des droits des femmes, représente aujourd'hui 45 Etats et qu'elle a été à l'origine de la première conférence des droits des femmes à Mexico en 1975. « Cette commission a fait adopter par l'Assemblée générale des Nations Unies un certain nombre de conventions, notamment sur les droits politiques des femmes, puisque lorsque l'ONU a été fondée en 1945 près de la moitié de ses Etats membres ne donnaient pas la pleine citoyenneté aux femmes ». La deuxième convention adoptée portait sur la nationalité et stipulait qu'une femme mariée doit pouvoir garder sa nationalité et la transmettre à ses enfants, en cas de mariage avec un étranger. La troisième convention évoquait les questions relatives au mariage et notamment au consentement. A Mexico, les gouvernements ont demandé à la Commission de rassembler toutes ces conventions pour en établir une qui couvre l'ensemble des droits propres aux femmes et qui permettent d'éliminer les discriminations dont elles étaient l'objet dans le droit et la pratique. C'est ainsi que la CEDAW a été adoptée en 1979.
Françoise Gaspard affirme que «s'il y a bien eu des progrès, certes lents, dans le droit, et si les Etats ont ratifié la convention avec des réserves sur certains articles, et notamment l'article 16 relatif la famille, dans les faits les choses évoluent moins vite et sont même susceptibles de reculer. Si certains Etats viennent devant le Comité pour faire état du retrait de leurs réserves concernant les articles octroyant aux femmes des droits égaux à ceux des hommes, la réalité dans les faits est souvent différente ».
S'agissant du rôle des parlementaires, Mme Gaspard insiste sur le fait que les élus «devraient connaître la convention, puisque ce sont les parlements qui la ratifient ainsi que les rapports faits par les Etats et les conclusions du Comité ». Elle ajoute cependant : «dans l'histoire de la CEDAW, je ne connais aucun exemple de communication à un Etat stipulant qu'il a rempli ses devoirs au regard de la convention et que les femmes sont de jure et de facto les égales des hommes. On assiste même à des reculs un peu partout ».
L'inquiétude vient de la situation dans les pays européens. « Après qu'ils eurent été des pionniers en matière de mise en place d'un mécanisme de surveillance des droits de la Femme au sein du gouvernement et de l'administration, ce service a été supprimé dans pratiquement tous les pays que nous avons examinés ». Un exemple ? «On dit à chaque ministère qu'il a une mission de promotion de l'égalité, mais ces mêmes ministères ne sont pas outillés pour cela. Et s'il n'existe plus de mécanisme pour impulser des politiques sensibles à la question du genre, il y a inévitablement des reculs, non pas dans le droit mais dans les faits ».
Des élus jordaniens recensent les mesures à prendre pour mettre en oeuvre la CEDAW
A la fin de la réunion de deux jours organisée en novembre par l'UIP et la Chambre des représentants jordanienne à Amman (Jordanie), les participants ont recensé les mesures essentielles que peuvent prendre les parlementaires pour favoriser l'application en Jordanie de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, dite CEDAW.
Ces mesures consistent notamment à encourager la ratification du Protocole facultatif à la Convention; à prier instamment l'Etat de retirer ses réserves à la Convention; à entreprendre une révision des lois à la lumière de la Convention, notamment de la loi sur la situation personnelle; à veiller à ce que le parlement joue un rôle plus actif dans l'établissement des rapports à présenter en application de la Convention; à développer la coopération avec l'appareil national de promotion de la femme, la société civile et les organisations internationales, les chefs religieux, les notables et les médias. Le séminaire avait pour thème « Le rôle du Parlement dans la mise en oeuvre des conventions internationales relatives aux droits de l'homme, en particulier de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes ». Les participants – des membres de la Chambre des représentants et du Sénat jordaniens, des représentants d'organisations internationales, nationales, gouvernementales et non gouvernementales, ainsi que des experts nationaux et internationaux et des membres d'autres parlements – ont passé en revue les instruments fondamentaux des Nations Unies relatifs aux droits de l'homme auxquels la Jordanie est partie et qu'elle a récemment intégrés à son système juridique.
« Le type de politique mené dans la région Pacifique n'est pas propice aux femmes »
En septembre 2008, l'UIP a co-organisé une réunion destinée à étudier les mesures visant à promouvoir l'accès des femmes aux parlements des Etats insulaires du Pacifique, la région du monde dans laquelle la représentation des femmes est la plus faible (moins de 3% en moyenne). L'atelier sous-régional sur les mesures spéciales en faveur des femmes était destiné aux parlementaires et aux administrateurs de la région mélanésienne. Cette réunion a permis de débattre des défis auxquels les femmes sont confrontés lorsqu'elles tentent d'être élues aux parlements du Pacifique, et de déterminer quelle serait la meilleur façon de mettre en oeuvre des mesures spéciales dans le cadre des structures électorales existantes. L'atelier s'est déroulé les 24 et 25 septembre en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Mme Carol Kidu, Ministre du développement communautaire et seule femme parlementaire de son pays, explique les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes qui font de la politique dans le Pacifique et souligne l'importance de cette réunion.
Q: En votre qualité de femme parlementaire, statut extrêmement rare dans les Iles du Pacifique, comment décririez-vous les principales difficultés auxquelles sont confrontées les femmes candidates aux élections?
C.K. : Je pense qu'il est plus qu'évident qu'il existe des barrières culturelles significatives, compliquées par des barrières logistiques et financières. Le type de politique mené dans la région du Pacifique n'est tout simplement pas propice aux femmes parce que les barrières sont devenues énormes. Il est donc absolument impératif que nous envisagions des mesures spéciales, bien que ces mesures politiques temporaires semblent faire l'objet de beaucoup d'incompréhension. Certains hommes affirment que, si des sièges sont réservés aux femmes, le reste doit leur revenir de droit. C'est une vraie impasse ! Je suis toutefois confiante et je pense que les femmes se débrouilleront très bien et qu'elles enregistreront des résultats leur permettant de remporter des sièges ouverts. Le changement doit commencer quelque part, comme nous l'avons vu au Rwanda, où le Parlement compte presque 50% de femmes, et où le changement a été incroyable. L'une des leçons que nous en tirons, bien sûr, est que l'engagement politique au niveau le plus élevé est fondamental et j'espère que nous verrons cette volonté politique se traduire par un réel changement en Papouasie-Nouvelle-Guinée également.
Q: Quelle a été l'importance de cette réunion ?
C.K. : La région du Pacifique est la région dans laquelle la représentation féminine au Parlement est la plus faible du monde. Il est très important d'aborder la question des mesures spéciales et de voir comment nous pouvons améliorer la participation des femmes à la vie politique. Il est significatif que ce travail se déroule à l'échelon subrégional, car la région du Pacifique est très variée et il faut prendre en considération le contexte culturel particulier de la zone mélanésienne. L'autre aspect important est qu'il faut rassembler les femmes et les hommes pour créer des réseaux et comparer les différentes expériences nationales. L'information fournie est de la plus haute importance et nous devons nous inspirer des progrès réalisés dans les autres pays afin de pouvoir élaborer nos propres stratégies.
Les législateurs disent non à la violence à l'encontre des femmes
Le Président de l'UIP, Theo-Ben Gurirab, a joint sa voix à celles des autres parlementaires participant à la 119ème Assemblée de l'UIP à Genève, qui se sont engagés à faire de la lutte contre la violence à l'encontre des femmes une priorité nationale et internationale en adhérant à la campagne de l'UNIFEM intitulée : Dites NON à la violence contre les femmes, soutenue par un certain nombre de personnalités en vue, parmi lesquelles l'actrice Nicole Kidman.
« La violence à l'encontre des femmes reste un point important au programme des droits de l'homme et des parlements. Nous devons tous nous engager et nous mobiliser contre cette réalité inacceptable, à laquelle il est urgent que les dirigeants politiques du monde entier s'attaquent. Ensemble – hommes et femmes – nous pouvons veiller à ce que l'éradication de ce fléau devienne une priorité », a déclaré le Président Gurirab qui est aussi Président de l'Assemblée nationale namibienne. Plus de 200 parlementaires originaires de plus de 70 pays ont souscrit à cette campagne.