>> ENGLISH VERSION
N°31
SEPTEMBRE 2008

précédent suivant Autres numéros
de la Revue

Le Monde des Parliaments
Le Président de l'UIP, Pier Ferdinando Casini

« La démocratie est la grande affaire de notre temps »

M. Pier Ferdinando Casini

Q : Le 15 septembre, l'UIP célébrera pour la première fois la Journée internationale de la démocratie instituée par l'ONU. Quel en est l'enjeu majeur ?
Pier Ferdinando Casini :
Cette journée est importante car la démocratie est la grande affaire de notre temps. La démocratie est indissolublement liée à la vie des parlements. Un parlement n'a de sens que s'il est démocratique, car s'il n'a pas de représentativité démocratique et pluraliste, s'il ne représente pas des voix, des cultures, des ethnies et des sensibilités politiques différentes, il est une fiction. Le 15 septembre devrait être pour nous l'occasion de nous pencher sur ce qu'a été l'évolution de la vie démocratique. Voir aussi comment les expériences parlementaires se sont consolidées à travers le monde. En plus, nous devons affirmer que la paix et la coexistence pacifique ne sont pas suffisantes, car il ne peut y avoir de vraie démocratie sans liberté et sans participation élargie. Autrement dit : il n'y a pas de vrai parlement sans liberté.

Q : Que peuvent faire les parlements pour renforcer la démocratie ?
P.F.C.:
Ils font déjà beaucoup de choses. Comme par exemple mettre l'accent sur une participation accrue des femmes à la vie politique. Plusieurs de nos parlements membres ont pris des mesures pour assurer une présence féminine plus conforme à la répartition démographique, car elle est encore faible au niveau parlementaire dans de nombreux pays, y compris, je dois l'admettre, dans mon pays, l'Italie, puisque les femmes sont sous-représentées au niveau législatif. Les choses bougent aussi en matière de décentralisation du pouvoir. La démocratie directe, les référendums et autres consultations populaires s'intègrent d'ailleurs à celle qui est la première des délégations démocratiques : celle que les peuples donnent aux parlements. Pour être plus clair, disons qu'entre l'opinion publique - la base populaire - et le sommet de l'Etat, le Parlement est ce filtre fondamental qui doit être capable de faire entendre la voix des citoyens. Quand le Parlement entre en crise, c'est le principe démocratique même qui est en crise. Lorsque le Parlement ne fonctionne pas, qu'il est discrédité ou qu'il perd sa légitimité, cela ne fait qu'élargir le fossé d'incommunicabilité qui existe entre les citoyens et leurs représentants politiques. C'est le début de la perte de confiance dans les institutions que nous connaissons aujourd'hui. Raison pour laquelle les parlements et les élus doivent évoluer et donner l'exemple, y compris en matière de comportement, de principes éthiques et de moralité. Les parlements doivent être à l'avantgarde dans la société et non à la traîne ou discrédités par rapport à l'opinion publique.

Q : Quels sont les défis auxquels doit faire face la démocratie?
P.F.C.:
La démocratie doit avant tout affronter des défis liés à la vie humaine, car la vie humaine est aujourd'hui menacée par le sous-développement et des pénuries alimentaires qui sont à nouveau d'actualité. De nouvelles menaces pèsent notamment sur la vie des enfants et des personnes âgées. La vie humaine n'est pas seulement menacée par les conséquences de la guerre et de l'usage des armes, mais elle est aussi menacée par une forme de recherche qui n'a parfois plus de limites, qui manipule les personnes et qui cherche à produire des formes raffinées d'euthanasie. Je veux réaffirmer que la vie et la dignité de l'être humain doivent rester au centre de nos préoccupations.

Pavel (Roumanie) Q : Que diriez-vous aux jeunes qui se désintéressent de la politique et qui s’engagent de moins en moins dans la vie sociale ?
P.F.C.:
Je leur citerais la phrase d'un illustre compatriote qui a tant oeuvré en faveur des jeunes désavantagés ou abandonnés. A ceux qui disaient que la politique est quelque chose de sale, il répondait: à quoi cela sert-il d'avoir les mains propres si vous les gardez dans les poches ? Comme lui, je dis aux jeunes qu'il faut se salir les mains avec la politique. Car plus la politique devient politicienne, plus elle s'éloigne des gens. Et donc, plus nous travaillerons ensemble pour améliorer la politique, plus celle- ci sera ouverte et transparente.